Publié le 17 octobre 2016

Mis à jour le 27 mars 2025

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L'engagement du secteur aérien pour la décarbonation

  • Aviation et Environnement

L’année 2022 a été une année majeure en matière d’engagements internationaux pour atteindre la neutralité carbone. Elle marque un réel tournant par l’engagement à l’échelle mondiale de l’industrie et des États en faveur de la neutralité carbone du secteur aérien en 2050.

La neutralité carbone en 2050

2021

Au niveau national, l’engagement a commencé par celui des citoyens. En effet, la loi "climat et résilience" du 22 août 2021 a traduit une partie des 146 propositions de la « Convention citoyenne pour le climat » retenues par le chef de l'État. Les articles 142 à 147 de la loi, ainsi que l’article 12, sont consacrés au transport aérien. Ils prévoient en particulier, en sus de la publication de rapports : 

  • l’interdiction des vols intérieurs, dès lors qu’un transport par train direct et dans des conditions satisfaisantes est possible en moins de 2 h 30 (article 145) ;
  • l’interdiction de créer de nouveaux aéroports ou d’agrandir un aéroport, dès lors que ces travaux aboutiraient à une augmentation nette des émissions (article 146) ;
  • l’obligation pour les compagnies aériennes de compenser les émissions de leurs vols intérieurs (article 147).


Au niveau de l’Union européenne (UE), l'adoption en juin 2021 de la « loi européenne sur le climat » dans le cadre du Pacte vert a engagé l’UE à réduire ses émissions nettes à zéro au plus tard en 2050 et à viser des émissions négatives par la suite, dans la poursuite de l'objectif de température à long terme défini dans l'accord de Paris. Elle est également engagée dans un objectif intermédiaire de réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre de l’UE d'au moins 55 % d'ici 2030 par rapport aux niveaux d'émission de 1990. 

2022 

Cet engagement de l’UE a inspiré les industriels du secteur aérien qui se sont réunis en 2022 autour de l’initiative nommée « Destination 2050 ». L’année 2022 a alors marqué un réel tournant par l’engagement du secteur aérien en faveur de sa décarbonation à l’échelle mondiale de l’industrie et des États. 

En effet, l’année 2022 a été, au premier semestre, l’année de la présidence française du Conseil de l’Union européenne (PFUE), permettant à la France d’être à l’initiative du Sommet de l’aviation consacré à la décarbonation du transport aérien. Ce sommet, qui s’est tenu les 3 et 4 février à Toulouse, est parvenu à l’adoption par 42 États et de nombreux acteurs du secteur aérien de la Déclaration de Toulouse pour une neutralité carbone en 2050. Il a confirmé l’engagement de l’industrie et des États. 

Le premier semestre 2022 a également été marqué au niveau européen par l’ambition portée par la présidence française de l’Union européenne dans le cadre des négociations sur le paquet « Ajustement à l’objectif moins 55 % - Fit for 55 ». Ce paquet, proposé par la Commission européenne, contient les mesures sectorielles permettant d’atteindre l’objectif de réduction des émissions de l’UE pour 2030.

Il est composé de quatre textes concernant le secteur aérien : 

  • le règlement dit « ReFuel EU Aviation » fixant des objectifs d’incorporation de carburants d’aviation durables (CAD),
  • la révision de la directive ETS Aviation 2003/87/CE, appliquant le principe « pollueur-payeur » aux émissions de l’aviation au sein de l’UE
  • le règlement dit « AFIR » visant à établir des objectifs de déploiement d’infrastructures de distribution de carburants alternatifs,
  • la révision de la directive sur la taxation de l’énergie (DTE).

Cette impulsion française et européenne sans précédent du début d’année 2022 ne s’est pas arrêtée là. Elle a permis un engagement international historique dans le cadre de la 41e Assemblée de l’OACI d’octobre 2022 : l’adoption d’une résolution pour un objectif ambitieux de long terme de neutralité carbone en 2050 de l’aviation civile internationale (en anglais Long Term Aspirational Goal - LTAG). Elle s’appuie sur un panier de mesures pour lutter contre les émissions de CO2  provenant du secteur de l'aviation. 
 

Ce panier de mesures identifie l’ensemble des leviers de décarbonation pour réduire les émissions de CO2 du transport aérien : 

  • l’amélioration de l’efficacité énergétique des aéronefs, portée par l’innovation et les ruptures technologiques,
  • le développement des carburants d’aviation durables (CAD),
  • l’optimisation des opérations aériennes, et
  • le recours à des mesures économiques de marché pour rehausser le signal-prix du transport aérien, en lien avec son impact environnemental. 

Ce sont ces mêmes leviers qui sont identifiés et utilisés au niveau européen et national pour agir en vue de la décarbonation du secteur.

2023

En 2023, trois des textes du paquet « Ajustement à l’objectif moins 55 % - Fit for 55 » : le règlement (UE) 2023/2045 dit « ReFuelEU Aviation », la révision de la directive ETS Aviation par la directive (UE) 2023/958, et le règlement (UE) 2023/1804 dit « AFIR », ont été adoptés. 


Seules les négociations sur la révision de la directive sur la taxation de l’énergie (DTE) se poursuivent. Elles n’ont pas encore abouti en raison de l’unanimité des suffrages requise en matière de fiscalité.

Au niveau national, l’article 301 de la loi « climat et résilience », a permis au secteur aérien d’être le premier à remettre sa feuille de route, le 14 février 2023, aux ministres Agnès Pannier-Runacher, Clément Beaune et Roland Lescure.

Après un an de travail de tous les acteurs intéressés, compagnies aériennes, constructeurs, aéroports, assistants en escale, énergéticiens et producteurs de CAD, sous la houlette de la Direction générale de l’Aviation civile (DGAC) et du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS) et avec l’appui de l’Office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA).

Dans cette feuille de route nationale comme au niveau international, parmi les leviers de décarbonation les carburants d’aviation durables sont appelés à jouer un rôle majeur à court, moyen et long termes. C’est pourquoi, l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) a adopté en novembre 2023, lors de la 3e édition de la Conférence sur l’aviation et les carburants alternatifs (CAAF/3), un « Cadre global pour les SAF, LCAF et autres énergies plus propres », dont le point clé est l’objectif de réduire d’ici à 2030 l’intensité carbone des carburants de 5 %.

En d’autres termes, l’utilisation de carburants d’aviation durables (CAD), de carburants d’aviation à base de combustibles fossiles à moindres émissions (LCAF) et d’autres énergies plus propres devrait permettre de réduire les émissions de CO2 de 5 % par rapport à l’utilisation de carburants traditionnels. 

Mise en œuvre, à compter de 2024

L’évolution du cadre normatif international et du cadre règlementaire européen et national entre 2021 et 2023 a donné de la visibilité aux acteurs. Ils nécessitent toutefois un travail de mise en œuvre conséquent. Ainsi, à compter de 2024, les États, dont la France, se sont organisés pour mettre en pratique les leviers normatifs et règlementaires qui leur permettront d’atteindre leurs ambitions.

Au niveau international, à l’OACI, le Comité de la protection de l'environnement en aviation (CAEP) a développé une méthodologie de suivi de la mise en œuvre du LTAG, un outil permettant de comparer l’évolution des émissions de CO2 de l’aviation internationale avec des trajectoires de décarbonation et de quantifier les améliorations liées à chacun des leviers (technologie, opérations aériennes, carburants et autres mesures). Au sein de ce Comité, un accent particulier est mis sur les travaux liés aux carburants plus propres au sein du sous-groupe dédié le « Fuel Task Group – FTG »  afin de faciliter la mise en œuvre de l’objectif issu de la CAAF/3 de réduire l’intensité carbone des carburants de 5 % d’ici à 2030.

Au niveau européen, la mise en œuvre des dispositions réglementaires concernant le secteur aérien du paquet “Ajustement à l’objectif moins 55 % - Fit for 55“ a nécessité un travail considérable de mise en œuvre en 2024 notamment par l’adoption d’actes délégués et d’exécution précisant la mise en œuvre technique des mesures, doublé d’un travail de transposition du droit de l’UE dans le droit national.

Au niveau national, les décrets d’application de la loi climat et résilience concernant le transport aérien ont été adoptés en 2022 et 2023, permettant une application complète et maîtrisée de leurs dispositions dès 2024.

Enfin, afin de communiquer au mieux sur l’avancée des engagements du secteur, la DGAC publie chaque année son rapport environnement.