Publié le 26 juin 2024
Mis à jour le 05 août 2024
Suivi des émissions de gaz à effet de serre
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’origine humaine entraînent un réchauffement de la température moyenne de la surface terrestre et perturbe les équilibres écosystémiques. La lutte contre le changement climatique vise à maintenir les conditions d’habitabilité de la Terre.
Objectifs internationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre
Au niveau mondial, l’Accord de Paris fixe l’objectif de maintenir la température mondiale « nettement en dessous » de 2 °C d’ici à 2100 par rapport aux niveaux préindustriels, et de « poursuivre les efforts » pour limiter ce réchauffement global à 1,5 °C.
Pour relever ces défis et faire de l’Europe le premier continent neutre pour le climat en 2050, l’Union européenne (UE) s’est dotée d’une feuille de route : le pacte vert pour l’Europe, lancé en 2019.
Elle a traduit cette ambition en inscrivant dans le droit européen le principe de la neutralité climatique en 2050 et prévoit des jalons intermédiaires s’agissant de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. À l’horizon 2030, l’Union européenne et ses États membres se sont engagés collectivement à réduire les émissions de gaz à effet de serre européennes de 55 % net en 2030 par rapport à 1990 (contre -40 % brut antérieurement).
Objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre
En lien avec son engagement pris lors de l’Accord de Paris, la France s’est fixé l’objectif d’atteindre la neutralité carbone, c’est-à-dire l’équilibre entre nos émissions et les absorptions de gaz à effet de serre, dès 2050.
Pour mener sa politique d’atténuation du changement climatique, la France a mis en place un outil de planification : la Stratégie nationale bas-carbone, dont la deuxième édition en vigueur (SNBC-2) a été adoptée en avril 2020.
Cette stratégie prévoit des réductions majeures d’émissions de GES dans tous les secteurs d’activité émetteurs : transport, bâtiments, industrie, agriculture, production d’énergie, déchets.
L’objectif national actuel à l’horizon 2030, tous secteurs confondus, est de réduire d’au moins 40 % nos émissions brutes de GES par rapport à 1990. La SNBC-3 en cours d’élaboration rehaussera cet objectif de réduction à -50 % entre 1990 et 2030, soit l’atteinte de 270 MteqCO2 (millions de tonnes en équivalent CO2)1.
Pour réussir la transition vers une économie décarbonée et durable, la SNBC fixe des objectifs contraignants à court et moyen terme – les budgets carbone, arrêtés par décret – et donne les orientations stratégiques sectorielles de long terme.
1 Ce résultat est basé sur une itération de modélisation préparée sur la base de l'inventaire national des émissions de gaz à effet de serre établi par le Citepa en 2023 (Secten 2023).
Suivi des émissions de gaz à effet de serre et comparaison aux objectifs
La comparaison des émissions de la France (sur la base des inventaires les plus à jour) au budget carbone de la période considérée est un indicateur clé du suivi de la mise en œuvre de la stratégie. Elle permet notamment de constater l’impact récent de mesures passées.
Sources des données d’émissions de gaz à effet de serre
Plusieurs dispositifs sont mis en place au niveau national pour suivre les émissions de gaz à effet de serre :
Inventaire Secten
L’inventaire au format Secten (secteurs économiques et de l’énergie), établi par le Citepa, sert au suivi de la politique climatique nationale. Dans cet inventaire, les GES sont alloués aux secteurs économiques ou aux activités qui les ont émis. Il comprend 7 secteurs : industrie de l’énergie, industrie manufacturière, résidentiel/tertiaire, transports, agriculture, déchets, utilisation des terres et changement d’affectation des terres et foresterie. Cet inventaire est établi annuellement avec, à chaque nouvelle édition, une pré-estimation des émissions de GES pour l’année n-1 et les données consolidées à partir de n-2.
Baromètre
Pour répondre au besoin de réactivité lié aux enjeux de l’urgence climatique et de qualité de l’air, le Citepa propose des estimations mensuelles des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques dans l’année en cours. Le baromètre des émissions mensuelles est calculé en cohérence avec les émissions annuelles. Il permet de suivre l’évolution des émissions au fils des mois de l’année en cours et de comparer les émissions mois à mois avec l’année précédente. Il est établi trimestriellement.
Analyse des dernières données d’émissions annuelles de GES disponibles
En 2023, les émissions de gaz à effet de serre nationales hors UTCATF (utilisation des terres, changement d'affectation des terres et foresterie) se sont élevées à 372,9 MteqCO2, en baisse de -5,8 % par rapport à 2022 (395,7 MteqCO2), représentant -23 MteqCO2 de différence, selon la pré-estimation « proxy » du Citepa. Avec UTCATF, les émissions sont estimées à 352,2 MteqCO2 en 2023, en baisse de -6,6 % par rapport à 2022 (377,2 MteqCO2), soit 25 MteqCO2 d’écart, selon le proxy du Citepa.
Les émissions de 2023 sont à un niveau inférieur à celles de 2020, qui représentaient déjà un record historique (389,5 MteqCO2 sans UTCATF, 368,1 MteqCO2 avec UTCATF).
Ces 5,8 % de baisse représentent la troisième baisse d’émissions record après 2020 (-9,2 %) et 2014 (-6,7 %). Ce rythme de réduction des émissions entre l’année 2022 et 2023 est le rythme de réduction d’émissions que nous devrions conserver pour respecter nos objectifs climatiques.
(Source : Secten 2024)
Analyse des dernières données d’émissions trimestrielles de GES disponibles
Selon les estimations du Citepa, les émissions françaises de gaz à effet de serre enregistrent une baisse de 5,3 % au premier trimestre 2024 (hors puits de carbone), pour s’établir à 101 MteqCO2.
Cette baisse des émissions s’explique par une diminution de tous les grands secteurs émetteurs :
• la production d’énergie : -16,8 %, soit -2 MteqCO2, en raison de l’accélération de la production d’électricité décarbonée ;
• les bâtiments : -7,1 %, soit -1,6 MteqCO2, Cette baisse résulte principalement de la baisse des émissions du chauffage (-7,8 %) et est le résultat combiné d’un trimestre au global plus doux que l’an passé et de la poursuite des comportements de sobriété ;
• l’industrie : -5,6 %, soit -1,1 MteqCO2 et plus particulièrement l’agroalimentaire (-9,3%), la construction (-7,6 %) et le papier, carton (-7,6 %) ;
• les transports : - 3 %, soit -0,9 MteqCO2, avec à la fois une diminution pour le transport routier (-3,1 %), portée par la baisse observée des émissions associées aux véhicules diesel, et le transport aérien français (-2,8 %).
Source : Baromètre juin 2024
Les émissions nationales depuis 1990
Figure 1 : Évolutions des émissions territoriales de GES brutes (hors émissions et absorptions associées à l’usage des terres et à la foresterie) et nettes (incluant les émissions et absorptions associées à l’usage des terres et à la foresterie) depuis 1990.
(Sources : données Secten de juin 2024, dont l’année 2023 est une estimation)
Les émissions nationales depuis l’Accord de Paris
Figure 2 : Émissions brutes de gaz à effet de serre et comparaison aux budgets carbone
(Sources : données Secten de juin 2024, dont l’année 2023 est une estimation dite « proxy »).
À noter : (i) Le budget carbone 2015-2018 a été clôturé en 2020. Il ne fait plus l’objet « d’ajustements techniques » et il n’est ainsi plus opportun de recalculer le solde de ce budget carbone sur la base d’inventaires ultérieurs au risque de créer une distorsion dans l’analyse ; (ii) ce graphe fait apparaître les budgets carbone de la SNBC-2 ajustés, à titre indicatif et provisoire, en 2024. L’ajustement final du budget carbone 2019-2023 sera effectué en 2025 sur la base des données d’inventaires consolidées pour 2023.
Les émissions sectorielles entre 1990 et 2022 (année consolidée)
Les transports constituent le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre en France : ses émissions se sont élevées à 131 MteqCO2 en 2022, soit environ 33 % des émissions nationales. Ses deux grands sous-secteurs sont le transport de voyageurs, où les émissions de GES liées aux voitures particulières sont de 69 MteqCO2 en 2022 et le transport de marchandises, où les émissions de GES liées aux poids lourds représentent 31 MteqCO2 en 2022 (Citepa, Secten 2024).
Le secteur de l’agriculture constitue le deuxième secteur émetteur de gaz à effet de serre en France : ses émissions se sont élevées à 74 MteqCO2 en 2022, soit 19 % des émissions brutes de la France, dont 59 % des émissions liées à l’élevage, 26 % liées aux cultures et 14 % liées à la combustion dans les engins, moteurs et chaudières des secteurs. Les émissions de l’agriculture sont pour la plupart inhérentes au processus même de production.
L’industrie constitue le troisième secteur émetteur de gaz à effet de serre en France : ses émissions se sont élevées à 71 MteqCO2 en 2022, soit environ 18 % des émissions nationales. Trois secteurs représentent 72 % des émissions de l’industrie : la métallurgie (16 MteqCO2), la chimie (17 MteqCO2) les minéraux non-métalliques et les matériaux de construction (19 MteqCO2). Par ailleurs, les 50 sites industriels les plus émetteurs sont responsables de 55 % des émissions du secteur.
Le secteur des bâtiments constitue le quatrième secteur émetteur de gaz à effet de serre en France : ses émissions se sont élevées à 62 MteqCO2 en 2022, soit environ 16 % des émissions nationales. Ces émissions ont entamé une décroissance à partir de la fin des années 2000. Les deux sous-secteurs sont le résidentiel, c’est-à-dire les logements (y compris du parc social), responsables de 63 % des émissions du secteur, et le tertiaire, regroupant bureaux, surfaces commerciales ou institutionnelles détenus par des acteurs publics (notamment bâtiments de l’État et des collectivités locales) et privés, responsable d’environ 37 % des émissions.
Le secteur de la production et de la transformation d’énergie a émis 43 MteqCO2 en 2022, soit 11 % des émissions brutes de la France. Ces émissions sont en décroissance depuis les années 1990, notamment sous l’effet de la décarbonation de notre système électrique. Les émissions de l'énergie sont réparties entre la production d'électricité (51 %), le chauffage urbain (9 %), le raffinage du pétrole (16 %), la valorisation énergétique des déchets (17 %), ainsi que d'autres transformations et pertes (8 %).
Le secteur des déchets a émis 14 MteqCO2 en 2022, soit 3,6 % des émissions brutes de la France. Ces émissions sont principalement liées au méthane issu de la dégradation des déchets fermentescibles dans les installations de stockage de déchets non dangereux (ISDND), ainsi qu’au méthane et au protoxyde d’azote issu du traitement des eaux usées. Les émissions liées au recyclage sont comptées dans l’industrie et celles liées à l’incinération avec valorisation énergétique sont comptées dans l’énergie (nomenclature Secten). Ces émissions sont comparables à celles de 1990, mais en décroissance depuis le milieu des années 2000.
Le secteur UTCATF (utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie) est un secteur permettant des absorptions de CO2 au global. En 2022, l’absorption du secteur est de 18 MteqCO2. Le puits de carbone que représente ce secteur a fortement diminué en l’espace de 10 ans, en grande partie à cause des effets du changement climatique, se traduisant par une hausse de mortalité et une baisse de croissance des forêts (sécheresse, canicule, parasites, incendies).