Publié le 29 mars 2019
Mis à jour le 05 novembre 2024
Scénarios prospectifs énergie-climat-air
Pour répondre aux obligations internationales et européennes et éclairer le débat national, le Ministère de la Transition Ecologique élabore régulièrement des scénarios prospectifs énergie-climat-air.
Ces projections sont réalisées à partir d’un ensemble particulier d’hypothèses sur les évolutions technologiques, le contexte économique (notamment les prix de l’énergie) ainsi que sur les politiques et des mesures favorables à la transition énergétique représentées dans les différents scénarios.
Certains scénarios élaborés sont « tendanciels » et ne reflètent que les mesures déjà adoptées. D’autres, supposant l’adoption de mesures supplémentaires à l’avenir, illustrent des trajectoires compatibles avec des objectifs ambitieux comme l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050 ou d’autres objectifs inscrits dans le code de l’Energie. Leur élaboration est collective, repose sur différents modèles et vise à informer le débat public de manière transparente. Des tests de sensibilité, des évaluations des impacts unitaires de certaines mesures et une analyse des impacts macro-économiques les complètent généralement.
Pourquoi des scénarios énergie-climat-air ?
Le Ministère de la Transition Ecologique réalise des « Scénarios prospectifs énergie-climat-air » pour que la France soit en mesure de répondre à ses obligations européennes et internationales et pour éclairer le débat et la décision publics.
Engagements européens
La France, dans le cadre de ses engagements européens, doit fournir des projections à vingt ans de ses émissions de gaz à effet de serre (GES), dans le cadre du rapport d'avancement national intégré en matière d'énergie et de climat (exigence du règlement européen 2018/1999 sur la gouvernance de l'union de l'énergie et de l'action pour le climat), et ce le 15 mars tous les deux ans (années impaires). Ce rapport permet notamment d’évaluer les progrès réalisés par les Etats-Membres vers leurs objectifs climat et énergie définis dans leurs Plans Nationaux Intégrés Energie-Climat (PNIEC).
Engagements internationaux
Au niveau international, des projections de consommations d’énergie et d’émissions de GES sont à rapporter périodiquement auprès de différentes institutions.
La France soumet un rapport bisannuel tous les deux ans et une communication nationale tous les 4 ans pour remplir les exigences l’accord de Paris et de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC).
Concernant la demande d’énergie, la France est soumise à une obligation de communication d’un scénario de référence « à caractère tendanciel » à l’Agence internationale de l’énergie (AIE) à l’occasion des revues en profondeur de la politique énergétique française tous les 4 ans ainsi qu’à un rapportage annuel auprès de l’AIE.
Ces rapports servent aux institutions concernées, européennes ou internationales, pour agréger les trajectoires énergie-climat-air et ainsi analyser si les objectifs européens ou internationaux sont en voie d’être atteints.
Éclairer la décision publique
À l’échelon national, l’élaboration de scénarios permet d’associer la société civile, des modélisateurs et des experts ministériels et sectoriels. La construction d’un scénario ainsi que ses résultats éclairent la décision publique.
Ces scénarios servent ensuite de référence pour l’élaboration de la stratégie française pour l’énergie et le climat, en particulier pour des documents programmatiques comme la Stratégie Nationale Bas Carbone ou la Programmation Pluriannuelle de l’Energie au niveau national, ou le Plan National Intégré Energie Climat au niveau européen.
Comment les scénarios énergie-climat-air sont-ils élaborés ?
L’exercice d’élaboration des scénarios est piloté par la direction générale de l’énergie et du climat, en lien avec le Commissariat général au développement durable et les autres directions du ministère. Le ministère collabore également avec l’Ademe et les autres ministères concernés (notamment chargés de l’économie et l’agriculture), et peut recourir à des prestataires extérieurs (bureaux d’étude).
Chaque exercice de prospective fournit des projections sur la consommation d’énergie, les émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, associées à un scénario donné. Deux scénarios principaux sont généralement construits : un dit « avec mesures existantes » (AME), qui reflète l’impact des politiques et mesures adoptées jusqu’à une certaine date passée, et un scénario « avec mesures supplémentaires » (AMS), qui traduit l’impact de nouvelles mesures qui seraient mises en œuvre dans le futur de manière à atteindre un certain objectif.
Cette prospective et les projections qui en résultent ne sont pas des prévisions du futur, mais des outils pour comprendre les futurs possibles, et en quoi ils dépendent de l’adoption plus ou moins poussée d’une batterie de mesures favorables à l’efficacité énergétique, au développement des énergies renouvelables, etc.
Lors de ces exercices de scénarisation prospective, l’utilisation de modèles techniques et économiques garantissent la cohérence quantitative (physique et énergétique) des états du monde futur que l’on représente.
Scénario "avec mesures existantes" 2024
Le scénario AME 2024 intègre les dernières données disponibles, ainsi que l’impact des politiques et mesures adoptées jusqu’au 31 décembre 2023 afin d’évaluer leur impact sur la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre. Il a consisté en une mise à jour du scénario AME 2023 (disponible dans la section suivante) pour répondre au rapportage européen. Le scénario AME 2024 permet ainsi d’évaluer la trajectoire actuelle d’émissions de gaz à effet de serre de la France en prenant en compte l’ensemble des politiques publiques climatiques déjà adoptées, et de mesurer l’effort restant à parcourir pour atteindre ses objectifs.
Par rapport à l’édition précédente, le scénario AME 2024 intègre les nouvelles politiques climatiques adoptées en 2022–2023, parmi lesquelles :
- La révision du Règlement européen sur les émissions des véhicules neufs, qui interdit notamment la vente de voitures thermiques à partir de 2035, ainsi que les Règlements ReFuelEU Aviation et FuelEU Maritime, qui fixent notamment des seuils de Carburants Aériens Durables à incorporer dans les carburants aériens et maritimes, à horizon 2030, 2040 et 2050. Ces Règlements déterminent fortement les hypothèses de mix énergétiques des transports.
- La loi « industrie verte » qui vise à accélérer la réindustrialisation du pays, ainsi que les lois d’accélération des énergies renouvelables et du nucléaire et la poursuite du plan France 2030 pour investir massivement dans les technologies innovantes et soutenir la transition écologique.
- Le plan stratégique national de la France pour la Politique Agricole Commune (PAC) 2023-2027, qui réhausse l’ambition de transition écologique du secteur agricole, notamment par l’éco régime et la conditionnalité renforcée en matière d’environnement.
Les grands enseignements de l’AME 2024 sont les suivants :
- L’AME 2024 atteint 326 MtCO2e en 2030, soit une réduction d’émissions de 39,5% comparé à 1990. Cela signifie que, dans un scénario théorique où aucune nouvelle mesure climatique ne serait adoptée après le 31 décembre 2023, les émissions continueraient de baisser jusqu’à -39,5 % en 2030 par rapport à 1990, sous l’effet des politiques et mesures déjà adoptées et de l’évolution de facteurs exogènes.
- En 2030, le niveau d’émissions atteint par le scénario AME 2024 est 3 MtCO2e au-dessus de l’objectif de la Stratégie nationale bas carbone en vigueur (SNBC 2) de -40 % d’émissions brutes par rapport à 1990, et 56 MtCO2e au-dessus de l’objectif futur de 270 MtCO2e de la SNBC 3, fixé par la planification écologique et correspondant à une réduction de 50% des émissions brutes par rapport à 1990.
- Sans mesures supplémentaires, les émissions de gaz à effet de serre du scénario AME 2024 continuent de baisser après 2030, sans pour autant atteindre la neutralité carbone. Cela reflète le fait que les transformations structurelles pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 nécessitent des mesures supplémentaires à celles déjà adoptées.
Les principales hypothèses ainsi que les principaux résultats issus des travaux de modélisation sont disponibles dans la synthèse du scénario, ainsi que dans le tableur récapitulatif.
Rapport de synthèse du scénario AME 2024
Tableur récapitulatif du scénario AME 2024
Scénario "avec mesures existantes" 2023
Le scénario AME 2023 intègre les dernières données disponibles, ainsi que l’impact des politiques et mesures adoptées jusqu’au 31 décembre 2021 afin d’évaluer leur impact sur la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre. Il a consisté en une mise à jour du scénario AME 2021 (disponible dans la section suivante) pour répondre au rapportage européen.
Plusieurs modifications majeures ont été apportées par rapport au scénario AME 2021 :
- Les mesures issues des lois anti gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), de la loi climat résilience ainsi que du plan de relance ont été intégrées.
- Le cadrage macroéconomique a également été actualisé du fait des impacts de la crise sanitaire liée au COVID-19 ainsi que de la crise énergétique liée à la guerre en Ukraine.
- Le scénario a utilisé de nouveaux modèles avec la mobilisation d’Enerdata pour modéliser l’industrie via EnerMed ou l’utilisation de l’outil MOSUT de Solagro pour modéliser plus finement le secteur alimentaire et agricole.
Ce scénario est le fruit d’un travail en concertation avec les parties prenantes dans le cadre de la révision de la Stratégie Française pour l’énergie le climat. Il a été élaboré en consultant les parties prenantes (organisations professionnelles, ONG, think tanks, agences de l’Etat, académiques…) au sein de 5 groupes de travail sectoriels (agriculture, forêt-sols-biomasse, industrie-énergie-déchets, transports, bâtiments) qui se sont réunis 3 à 4 fois entre septembre 2021 et décembre 2022.
L’analyse de la trajectoire montre que l’AME permet d’atteindre une réduction de -36,8% des émissions de GES par rapport à 1990, soit un écart de 17MtCO2eq avec les objectifs fixés par la loi (réduction de -40% par rapport à 1990, objectif actuel fixé dans la loi au L100-4 du code de l’énergie, sans prise en compte du « Fit for 55 »). Ainsi, la trajectoire de l’AME 2023 permet d’atteindre le second budget carbone, mais pas le 3ème et le 4ème. De plus, la première période de l’ESR (2021-2025) est respectée, mais pas la seconde. La tendance d’émissions est similaire à celle de l’AME 2021, avec davantage de réductions d’émissions dès 2030 (-23MtCO2eq), dont environ la moitié est directement attribuable à de nouvelles politiques et mesures mises en œuvre depuis 2019 (l’autre moitié étant attribuable aux changements de méthodologie et aux nouveaux paramètres de cadrage économique).
Il est toutefois nécessaire de rappeler que ce scénario très conservateur via ses hypothèses (fin des aides à la rénovation en 2022, atteinte de 50% des objectifs du décret tertiaire, 50% des projets de CCUS effectivement déployés,...), ne prend pas en compte les mesures postérieures au 31/12/2021 dont les évaluations individuelles indiquent que l’objectif du -40% sera bien atteint, voire dépassé.
Les principales hypothèses ainsi que les principaux résultats issus des travaux de modélisation sont disponibles dans la synthèse du scénario.
Liens et documents utiles
Liens et documents utiles
Scénario « avec mesures existantes » 2021
Le scénario AME 2021, co-construit en 2021 sur la même base méthodologique que le scénario AME 2023 par des experts des ministères de la transition écologique, de l’économie, et de l’agriculture, ainsi que ceux de l’ADEME et du CITEPA, évalue à l’horizon 2050 l’impact de l’ensemble des politiques et mesures mises en place jusqu’au 31 décembre 2019 sur la consommation d’énergie et les gaz à effet de serre.
Plusieurs modifications avaient été apportées au scénario AME 2021 par rapport au scénario AME 2018 :
- L’AME 2018 prévoyait une trajectoire croissante de la composante carbone de la TICPE en accord avec la LTECV (100€/tCO2 en 2030). Cette nouvelle version garde la composante carbone stable au niveau de 2018 (44,6€/tCO2).
- De nouvelles mesures, en particulier celles issues des lois LEC / LOM / EGALIM / ALUR ont été intégrées (mais pas les lois AGEC, climat et résilience, ni le plan de relance - le scénario ne devant intégrer que les mesures en place jusqu’à fin 2019).
- Les paramètres de cadrage (population, prévisions de croissance du PIB, prix des énergies, etc.) ont été revues en accord avec les recommandations de la commission européenne du fait notamment des impacts de la crise sanitaire liée au COVID-19.
La trajectoire d’émissions est similaire à celle de l’AME 2018, mais avec un décalage important d’environ -50MtCO2eq en 2050. Cela permet de se rapprocher de la trajectoire AMS à 2030, sans toutefois l’atteindre, avec un écart résiduel de l’ordre de 55MtCO2eq. L’AME 2021 atteint ainsi une réduction de 33% en 2030 comparé à 1990. En revanche, le rythme de décroissance des émissions dans la période post-2030 reste très faible par rapport à ce qui est attendu en AMS, ce qui est logique compte tenu des mesures prises en compte.
Cette trajectoire permet d’atteindre le second budget carbone (2019-2023), ainsi que la première période de l’ESR (2021-2025). L’objectif LULUCF 2021-2025 n’est en revanche pas tenu, ni les objectifs ultérieurs (budgets carbone et ESR), indiquant un besoin de politiques et mesures supplémentaires. Une partie de ces mesures se matérialise d’ailleurs déjà dans celles postérieures à 2019, intégrées dans le scénario AME 2023 (plan de relance, loi climat résilience, etc.).
Les principales hypothèses ainsi que les principaux résultats issus des travaux de modélisation sont disponibles dans la synthèse du scénario.
Scénarios énergie-climat-air 2018-2019
Deux scénarios principaux ont été construits à l’horizon 2050 :
- un scénario « avec mesures existantes », dit AME, contenant toutes les mesures mises en œuvre en France avant le 1er juillet 2017,
- un scénario « avec mesures supplémentaires », dit AMS visant à respecter les objectifs énergétiques et climatiques de la France, en particulier l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050.
Ces scénarios ont été co-construits par des experts ministériels et sectoriels. Par ailleurs, la société civile, rassemblée au sein d’un comité d’information et d’orientation, a été informée et consultée tout au long de l’exercice.
La modélisation de la demande d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre (GES), ainsi que l’évaluation macroéconomique ont été réalisées par un groupement de prestataires :
- Enerdata : modélisation du secteur industrie et modélisation du bouclage offre/demande du système énergétique national ;
- CITEPA : expertise et modélisation des émissions de GES, des polluants atmosphériques et des émissions non énergétiques (procédés industriels, gaz fluorés, agriculture, déchets et utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie) ;
- Cired : évaluation des impacts macro-économiques des scénarios avec le modèle IMACLIM.
Le Commissariat général au développement durable a été associé pour la modélisation des secteurs tertiaire (modèle tertiaire), transports (modèle MODEV) ainsi que pour la modélisation macro-économique (modèle 3ME).
L’Ademe a également été associée pour la modélisation des secteurs résidentiel (modèle MENFIS), agriculture (modèle CLIM’AGRI) ainsi que pour la modélisation macro-économique (modèle 3ME).
Le scénario AMS illustre un chemin d’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050. C’est le scénario de référence des projets de révision de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) et de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Il propose une combinaison de différents leviers sectoriels permettant d’être en phase avec les objectifs énergétiques et climatiques de la France aux horizons 2025, 2030 et 2050.
Il intègre, par exemple, l’atteinte de l’objectif de réduction de 40 % des émissions de GES en 2030 par rapport à 1990, et illustre une façon de porter à 32 % la part des énergies renouvelables en 2030.
C’est la trajectoire d’émissions de GES de l’AMS qui a permis de déterminer les budgets carbone, plafonds d’émissions définis par période de 5 ans jusqu’en 2033 dans la Stratégie nationale bas carbone.
C’est également la trajectoire de consommation d’énergie par secteur et par source d’énergie de l’AMS qui a été retenue dans la Programmation pluriannuelle de l'énergie.
Les principales hypothèses ainsi que les principaux résultats issus des travaux de modélisation sont disponibles dans la synthèse du scénario.
Scénarios énergie-climat-air 2014-2015
L’exercice de prospective réalisé en 2014-15 avait intégré dans la modélisation, à l’instar des deux précédents, les dimensions énergie, climat et air.
Deux scénarios principaux avaient été construits à l’horizon 2035 :
- un scénario « avec mesures existantes », dit AME, contenant toutes les mesures mises en œuvre en France avant le 1er janvier 2014,
- un scénario « avec mesures supplémentaires n°2 », dit AMS2. Deux variantes de l’AMS2 ont été élaborées lors de l’exercice de prospective.
Les résultats du scénario AME ont permis à la France de respecter l’obligation de rapportage auprès de la Commission européenne (règlement n°525/2013) :
- d’une trajectoire d’émissions de GES « avec mesures existantes » (donc sans mesures additionnelles, c’est-à-dire une trajectoire tendancielle) ;
- d’évaluations d’impacts sur les émissions de GES évitées grâce à la mise en œuvre de politiques et de mesures.
Le scénario AMS2 illustrait un chemin d’atteinte des objectifs fixés par la loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. C’était le scénario de référence de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC). Il proposait une combinaison de différents leviers sectoriels (mesures, technologies, comportements) permettant d’être en phase avec les objectifs énergétiques et de réduction des émissions de GES de la France.
Des analyses complémentaires avaient été menées sur ces scénarios :
- Environ 70 tests de sensibilité illustrent la robustesse et la dépendance des résultats obtenus à certaines grandes variables déterminantes comme le taux de croissance du PIB, l’évolution du prix des énergies fossiles, le niveau de la composante carbone de la TICPE, etc.
- Les impacts macro-économiques, sur le PIB, l’emploi, le commerce, etc., ont été étudiés spécifiquement à l’aide de deux modèles (NEMESIS et 3ME). Les principaux résultats apparaissent dans la synthèse.