Le Lundi 2 octobre 2023
Le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF), également connu sous l’acronyme anglais CBAM (Carbon Border Adjustment Mechanism) est un nouvel instrument règlementaire européen qui vise à soumettre les produits importés dans le territoire douanier de l’Union Européenne à une tarification du carbone équivalente à celle appliquée aux industriels européens fabriquant ces produits. L’objectif premier de ce dispositif est de lutter contre les fuites de carbone, dans un contexte de renforcement de l’ambition climatique au niveau européen.
Le MACF entrera en vigueur dans sa phase transitoire à compter du 1er octobre 2023.
Les obligations de déclaration et les informations demandées aux importateurs de marchandises MACF, ainsi que la méthode provisoire de calcul des émissions importées ont été précisées dans un règlement d’exécution adopté par la Commission Européenne le 17 août 2023. En plus d'un ensemble de documents explicatifs, la Commission organisera 6 webinaires sectoriels, entre le 15 septembre et le 5 octobre, en anglais, pour présenter le MACF.
Un webinaire en français, organisé par les services nationaux, s'est tenu le mardi 19 septembre à partir de 10h. L'enregistrement du webinaire, qui débute vers 31:00, est disponible au lien suivant. Le support de la présentation est largement repris dans le guide pratique à destination des importateurs, disponible plus bas sur cette même page.
Les fuites de carbone
Le concept de fuite de carbone ("carbon leakage") décrit le phénomène selon lequel la mise en œuvre de mesures climatiques contraignantes, visant à réduire les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES), dans une seule région du monde (ex : le marché carbone dans l'Union Européenne) entraîne une augmentation des émissions de GES dans le reste du monde.
Plusieurs phénomènes contribuent, positivement ou négativement, aux fuites de carbone :
Les études économiques existantes suggèrent que, de manière agrégée, les risques de fuites de carbone sont relativement modérés (de l’ordre de 20% i.e. une baisse des émissions de 1 tCO2eq dans une région induit 0,2tCO2eq d’émissions supplémentaires dans le reste du monde). Néanmoins, ces études considèrent généralement un prix du carbone relativement faible (autour de 20-30 €/tCO2). Par ailleurs, il s’agit d’un chiffre global qui masque des disparités par secteurs , où certains produits exposés à la concurrence internationale et pour lesquels les procédés de production sont très émetteurs de GES, seraient particulièrement à risque.
Pour l’Union Européenne, la problématique des fuites de carbone est donc double. Du point de vue climatique, les fuites de carbone minent les efforts européens pour réduire les émissions de GES au niveau mondial. Du point de vue de la souveraineté industrielle, du maintien de l'activité économique et des emplois, l’existence de fuites de carbone reflète un traitement inégal des producteurs européens et extra-européens, qui accentue les problématiques de délocalisation et de désindustrialisation.
Une pièce du paquet législatif européen "Fit for 55"
Historiquement, l’allocation de quotas gratuits dans le cadre du marché carbone européen a été la solution pour limiter les risques de fuites de carbone. Ce système a progressivement révélé plusieurs limites. En particulier, l’allocation de quotas gratuits dégrade fortement le signal-prix moyen de la tonne de carbone. En effet, si on alloue gratuitement 85% des quotas, par exemple, comme a longtemps été le cas pour le ciment ou encore l’aluminium, un prix du quota de 100€/tCO2eq est ressenti comme étant de seulement 15€/tCO2eq. Cette limitation de la tarification effective du carbone explique en partie que les réductions d’émissions ont été plus faibles pour les secteurs industriels que pour le secteur de la production d’électricité, surtout avant 2022 où le prix du carbone était inférieur à 30€/tCO2.
La montée en charge du MACF est donc indissociable de la disparition progressive des quotas gratuits dans le SEQE-UE (i.e. le marché carbone européen). C’est pour cette raison que le règlement MACF et la révision de la directive ETS ont dû être négociés conjointement au niveau européen.

La France a longtemps défendu la mise en œuvre d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, afin de lutter plus efficacement contre les fuites de carbone et d’appliquer un prix du carbone aux importations équivalent à celui payé par les producteurs européens.
Après des mois de négociation entre la Commission, le Parlement et les Etats-Membres suite à la publication d’un premier projet de règlement MACF en juillet 2021, un accord politique sur la création du Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) a été trouvé en trilogue en décembre 2022. Le texte définitif a été publié le 10 mai 2023 (règlement 2023/956).
Produits concernés
Afin de limiter la complexité du dispositif, le MACF s’appliquera, dans un premier temps, uniquement à certaines marchandises dites « simples » fortement exposés au risque de fuite de carbone :
- Acier
- Ciment
- Aluminium
- Engrais azotés
- Hydrogène
Ces secteurs représentent en cumulé environ la moitié des émissions industrielles dans l’UE. La liste précise des produits concernés, identifiés par leurs codes CN, est disponible dans les annexes au règlement MACF.
L’objectif affiché de la Commission est d’élargir progressivement ce périmètre de marchandises à d’autres secteurs de l’industrie, notamment le raffinage et la chimie, ainsi qu’à certains produits de l’aval afin de limiter les risques de contournement par l’aval proche, via l’importation de produits semi-transformés qui tombent en dehors du champ d’application du MACF.
Suite aux inquiétudes de certains pays européens vis-à-vis de l’augmentation croissante des importations d’électricité depuis des pays frontaliers de l’UE, le règlement couvre également les importations d’électricité, mesurées en kWh. Pour la France, cela ne concernera directement que les importations d’électricité en provenance du Royaume-Uni.
Qui est concerné ?
Le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières créé de nouvelles obligations règlementaires pour les importateurs, c'est-à-dire les acteurs économiques (identifiés par leur numéro EORI) responsables de la mise en libre pratique des produits visés au paragraphe précédent dans le territoire douanier de l’Union Européenne.
Le document ci-dessous donne un vision plus précise des conséquences pratiques de l'entrée en vigueur du MACF à partir d'octobre 2023.
Calendrier prévisionnel

Calendrier législatif
10 Mai 2023
- Adoption du règlement MACF
Juillet-Août 2023
- Adoption de l’acte d’exécution pour la période de transition
2024 – 2025
- Adoption progressive des actes délégués et d’exécution
Fin 2025
- Rapport sur l’extension à d’autres secteurs
Après 2026
- Suivi des flux de marchandises
- Révision des pays exemptés et produits couverts
Calendrier pratique
Juin-Juillet 2023
- Consultation publique sur l’acte d’exécution
Octobre 2023
- Ouverture de la plateforme informatique
Janvier 2024
- Première déclaration MACF trimestrielle pour Q4 2023
Juillet 2024
- Date limite d’amendement des déclarations trimestrielles
Janvier 2025
- Ouverture des candidatures « Déclarant MACF »
Janvier 2026
- Obligation de détenir une autorisation « Déclarant MACF »
- Début de la mise en vente des certificats MACF
- Dernier rapport trimestriel
Avril 2026
- Stock minimum de certificats MACF
Mai 2027
- Première déclaration MACF pour 2026
- Restitution de certificats pour les imports de 2026
Conformément au règlement MACF, il faut distinguer deux phases dans la mise en œuvre :
Période de transition (1er Oct 2023 – 31 Déc 2025)
Période de fonctionnement effectif (à partir de janvier 2026)
Pour aller plus loin
Cette page Web pourra être mise à jour afin d’apporter des informations complémentaires. N’hésitez pas à la consulter régulièrement.