Publié le 07 février 2019

Mis à jour le 06 septembre 2024

L'économie de la fonctionnalité

  • Consommation et production responsables

L’économie de la fonctionnalité est une voie pertinente pour soutenir la transition écologique car elle propose un nouveau modèle économique visant à réduire la consommation matérielle de biens et de ressources. Pour atteindre cet objectif, le concept de l’économie de la fonctionnalité repose sur la mise à disposition d’un usage plutôt que la possession d’un bien. Autrement dit, il ne s’agit plus d’acheter un bien et d’être propriétaire de ce bien, mais de payer un service qui est rendu à l’aide du bien en question.

Qu'est-ce que l’économie de la fonctionnalité ?

Les trois grands principes de l’économie de la fonctionnalité 

L’économie de la fonctionnalité est un modèle économique tourné vers le service et s’appuie sur trois grands principes directeurs :

  • Sortir de la logique de volume et agir en prenant en compte les aspects environnementaux et sociaux (sobriété matérielle, qualité de vie, création d’emplois, rallongement de la durée de vie des biens, réemploi, reconditionnement…).
  • Développer les services rendus aux usagers et coupler la création de richesse au développement des ressources immatérielles (compétences, santé, connaissances, qualité des relations…).
  • Développer la coopération entre les acteurs d’un territoire (citoyens, collectivités, entreprises…) pour générer un impact positif sur leurs modes d’organisation et des dynamiques territoriales qui intègrent les enjeux du développement durable.

L’économie de la fonctionnalité en pratique

Avec l’économie de la fonctionnalité, le vendeur reste propriétaire du bien tout au long de son cycle de vie mais offre un usage assorti d’un contrat qui permet d’assurer la performance et la robustesse du bien sur le long terme.

La centralité de la performance d’usage et le fait de ne pas passer par la possession d’un bien pour répondre à un besoin du client sont des moyens pour sortir d’une logique économique qui est elle, centrée sur la vente et donc sur les volumes, en partant des besoins des clients

Cette approche répond ainsi à des objectifs de développement durable car elle permet d’ajuster l’offre au plus proche des besoins des clients tout en favorisant le réemploi, la réparation et l’entretien des biens utilisés par le client.

Par exemple, un service de location de vélos électriques qui est assorti d’un contrat de maintenance et d’entretien régulier s’inscrit dans une approche EF. On peut également citer l’exemple de la mise à disposition par une entreprise spécialisée dans l’entretien, de vêtements professionnels à d’autres entreprises incluant un service d’entretien (réparation, blanchissement, etc.) après chaque utilisation du vêtement.

Ce modèle économique intéresse tous les maillons de la chaîne de valeur : entreprises, consommateurs, acheteurs privés et publics mais aussi des collectivités qui souhaitent s’engager avec les acteurs économiques dans un mode de développement territorial résilient.

L’économie de la fonctionnalité implique un « changement de modèle » 

L’approche EF suppose une transformation en profondeur des modèles d’affaires et des compétences des collaborateurs de la structure, de l’entreprise ou de la collectivité. Dans la mesure où ces offres sont co-construites avec le client, elles demandent de la part des « offreurs » une compréhension fine des besoins pour aboutir à un engagement contractuel de long terme, dépassant ainsi le format transactionnel classique qui consiste à vendre plus. Autrement dit, cette contractualisation repose sur des effets utiles (bénéfices sociaux et environnementaux) et l’offre s’adapte aux besoins réels des personnes, des entreprises et des collectivités.

Quelles différences avec la location simple ?

L’économie de la fonctionnalité et de la coopération se distingue du concept de location car elle s’inscrit dans une perspective d’engagement à long terme avec une dimension environnementale et sociale.

L’exemple classique est celui de la distinction entre des offres de location « simple » de voiture ou de vélos, des services plus complets qui visent à accompagner l’usager au moins par une adaptation et une souplesse de l’offre en fonction de ses usages. 

Plusieurs exemples illustrent bien cette distinction :

  • La mise à disposition de vêtements et chaussures reconditionnés et de seconde main via un abonnement mensuel.
  • La mise à disposition de bancs et d’abribus sous forme d’abonnement. Les bancs bénéficient d’un service d’entretien et de maintenance régulier et sont équipés de prises alimentées par des panneaux solaires sur les toits des abribus.
  • La vente d’une solution d’éclairage sous la forme d’un service d’éclairage opéré par une entreprise qui se charge de la conception de lampes et d’ampoules, en passant par l’installation, la maintenance et la gestion de la fin de vie. Le contrat repose notamment sur l’atteinte d’indicateurs de consommation énergétique.

Les locations avec option d’achat ne s’inscrivent a priori pas dans l’économie de la fonctionnalité, d’une part parce qu’elles peuvent conduire à l’achat des biens, et donc s’inscrire dans la logique de maximisation des volumes propre l’économie de la propriété, d’autre part parce qu’elles peuvent conduire à une limitation dans le temps de l’offre servicielle (les entreprises pouvant avoir intérêt à transférer la propriété au consommateur avant la survenue des premières pannes).
 

Quelles actions des pouvoirs publics en faveur de ce modèle économique ? 

L’économie de la fonctionnalité et de la coopération (EFC) est un modèle économique soutenu par les pouvoirs publics, notamment par l’Ademe, mais aussi dans le cadre de France 2030.

Les Clubs EFC et le programme Coop’ter sont les deux dispositifs d’accompagnement respectivement mis en œuvre au sein des très petites, petites et moyennes entreprises et des collectivités par l’Ademe pour accélérer leurs transitions vers ce modèle économique et écologique.

Les Clubs EFC visent à soutenir des parcours d’accompagnement collectifs ou individuels d’entreprises (TPE/PME), tout secteur d’activité confondu. S’étendant sur 12 à 18 mois, ces parcours visent à accompagner et outiller les dirigeants et leurs collaborateurs dans la transformation de leur modèle économique pour tendre vers une offre plus sobre en consommation de ressources naturelles. À ce jour, environ 500 entreprises ont été accompagnées à l’aide de ce programme. À noter qu’un parcours d’accompagnement similaire de 6 grandes entreprises est lancé et porté depuis septembre 2022 par l’Ademe.

De plus, l’Ademe développe aussi des projets économiques territoriaux multi-acteurs afin de soutenir la transition écologique et sociale. À ce stade, 25 projets sont en cours de réalisation dans le cadre du programme COOP’TER (territoires de Services et de Coopérations).

L’enveloppe globale de ces trois dispositifs à destination des très petites, petites, moyennes et grandes entreprises, et des collectivités est d’environ 2,5 millions d’euros à 3 millions d’euros par an, en fonction des années.  

Enfin et en complément, l’ADEME amorce deux chantiers importants :

  • L’évaluation environnementale et sociale des entreprises ayant bénéficié d’un parcours d’accompagnement ainsi que la formation à l’évaluation qualitative des délégués généraux des structures d’animation de l’EFC en régions.
  • Le développement de relations avec les réseaux d’entreprises et d’intermédiation afin de sensibiliser et accompagner leurs adhérents vers un changement de modèle économique tendant vers plus de sobriété.

S’agissant de la filière du numérique, bien qu’il existe des programmes expérimentaux au sein des grands comptes tels que les opérateurs télécoms, l’économie de la fonctionnalité constitue un modèle en émergence encore peu déployé. 

La stratégie d’accélération numérique écoresponsable du programme d’investissement France 2030 apporte dès aujourd’hui un appui spécifique pour accroître l’ampleur de ces démarches : elle prévoit 12 mesures, dont l’AAP Econum qui adresse le modèle de l’économie de la fonctionnalité et de la coopération.

Cet appel à projets, doté de 50 millions d’euros, et lancé en juillet 2023, finance l’innovation et le soutien au développement d’une économie numérique innovante, circulaire et à moindre impact environnemental. Les thématiques de l’appel à projets portent sur l’écoconception des produits numériques ; la réparation, le réemploi et le reconditionnement du matériel informatique, les modèles de production responsable. Plus précisément, ce troisième axe vise à soutenir les projets innovants visant à développer une offre en économie de la fonctionnalité. 

Les projets pourront être proposés soit par des entreprises, des associations, des acteurs de l’économie sociale et solidaire ayant pris la décision d’intégrer ce modèle économique dans leur stratégie ou ayant fait le choix d’une activité principale centrée sur une offre de service prenant appui sur ce modèle économique alternatif.

La commande publique est également un levier majeur pour encourager les acteurs publics à mettre en œuvre l’économie de la fonctionnalité dans leurs achats. Dans le cadre du plan national pour des achats durables 2022-2025, de nombreux outils sont mis en place pour permettre aux acheteurs d’intégrer des considérations environnementales dans leurs marchés, y compris avec des solutions relevant de l’économie de la fonctionnalité. Pour aider les acheteurs à inclure des considérations environnementales dans leurs marchés, une formation ouverte à distance (Mooc) sur les fondamentaux de l’achat durable a été lancé à la rentrée 2023, explicitant les concepts de l’achat durable, pour aider les acteurs à questionner leur besoin, dès l’étape de la définition du besoin.

Enfin, en 2023 le Conseil National de la Consommation (CNC) a été saisi dans le cadre de la planification écologique pour l’économie circulaire sur le sujet de l’économie de la fonctionnalité. L’objet du mandat attribué au CNC vise à contribuer au « développement des modèles d’affaires qui visent à intensifier l’usage du produit », et à « sortir de la logique volumique (vendre plus de biens, même éco conçus, pour augmenter le chiffre d’affaires et le bénéfice) pour développer de nouvelles offres répondant au juste besoin, en lien avec le client et l’écosystème associé, en créant de la valeur différemment (dont majoritairement une offre servicielle et de proximité) ». Ce modèle économique étant soutenu par les pouvoirs publics depuis une dizaine voire une quinzaine d’années, il s’agissait avant tout de poursuivre une réflexion déjà engagée sur la viabilité, la sécurisation et le développement de ce modèle, et de le faire mieux connaître. Le rôle de ce GT était de proposer des mesures visant à développer l’économie de la fonctionnalité dans des conditions économiques et juridiques sûres et adaptées. Le rapport du CNC sur cette thématique sera publié d’ici fin 2024. 

L’entreprise Clarlight (grand prix entreprises et environnement 2015) propose d’acheter de la lumière plutôt que des équipements. Clarlight ne vend pas d’équipements d’éclairage mais la lumière que produisent ses propres équipements. Les luminaires cessent de ce fait d’être des consommables qu’il faut amortir, entretenir et renouveler. Clarlight libère ainsi les entreprises de l’investissement que représente l’achat de luminaires et des dépenses d’entretien pour leur apporter une rentabilité immédiate.

Pour fournir la lumière la mieux adaptée à chaque besoin, Clarlight utilise les sources de lumière les plus performantes et s’appuie sur une innovation de rupture française dans l’éclairage fluorescent. Ainsi, la qualité de la lumière n’est jamais sacrifiée au profit de la performance énergétique.

Pour optimiser la lumière utile, Clarlight fournit de la lumière intelligente, c’est-à-dire programmable en tenant compte de l’éclairage naturel et de la présence des individus pour l’adapter au plus près du besoin. Pour rendre compte de la performance, Clarlight connecte la lumière à Internet. Le consommateur accède ainsi aux bilans énergétiques et Clarlight est automatiquement averti d’éventuelles défaillances, ce qui lui permet d’assurer la maintenance et garantir la fourniture. En proposant des équipements qui durent plus longtemps, Clarlight permet une diminution de la consommation des ressources naturelles, et une diminution de la production de déchets.