Contentieux de l’urbanisme : quelles sont les évolutions récentes?

Le Mercredi 6 octobre 2021

Le contentieux de l’urbanisme a fait l’objet de plusieurs réformes. Cette fiche présente les évolutions récentes de ce contentieux et notamment celles résultant de la loi ELAN et du décret de juillet 2018. La loi ALUR est à mentionner également car elle comporte des dispositions spécifiques au contentieux des documents d’urbanisme.

Dispositions relatives au contentieux de l’urbanisme dans la loi ELAN

En janvier 2018, un rapport intitulé « Propositions pour un contentieux des autorisations d’urbanisme plus rapide et plus efficace » a été remis au ministre de la cohésion des territoires.

La loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) du 23 novembre 2018 et le décret n°2018-617 du 17 juillet 2018 ont repris l’essentiel des dispositions proposées par ce rapport. Ces textes s’inscrivent dans le cadre de la lutte contre les recours abusifs en urbanisme annoncée par le Premier Ministre dans sa déclaration de politique générale du 4 juillet 2017.

La loi et le décret poursuivent quatre objectifs :

  • sécuriser les autorisations de construire,
  • lutter contre les recours abusifs,
  • accélérer les délais de jugement en urbanisme,
  • modifier le champ de l’action en démolition.

Sécuriser les autorisations de construire existantes

Mesures de la loi ELAN

Le nouvel article L.600-12-1 limite les effets des annulations de documents d’urbanisme sur les autorisations de construire.

L'article L.442-14 prévoit que la cristallisation des droits à construire dans un lotissement joue en cas d’annulation du document d’urbanisme pour un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au lotissement.

Les mécanismes d’annulation partielle et de sursis à statuer en matière d’autorisations de construire, prévus aux articles L.600-5 et L.600-5-1, sont renforcés.

L’article L.610-1 exonère de sanctions pénales, indépendamment des règles applicables et sauf fraude, le bénéficiaire d'une autorisation définitive qui exécute des travaux conformément à cette autorisation.

L'article L.421-9 clarifie le régime de prescription administrative applicable aux constructions illégales.

Mesures du décret du 18 juillet 2018

Le nouvel article R. 600-7 vise à faciliter la détermination du caractère définitif ou non des autorisations de construire en prévoyant la mise en place de certificats de non-recours contentieux.

L’article R.600-1 est modifié pour étendre le champ de l’obligation de notification des recours à toutes les décisions relatives à l'occupation ou à l'utilisation du sol.

Lutter contre les recours abusifs

Mesures de la loi ELAN

L’article L.600-7 facilite l’action en dommages et intérêts pour recours abusifs. Il n’exige plus un préjudice excessif et ne présume plus certains recours légitimes.

L’article L.600-3 interdit de présenter une demande de référé-suspension après la date de cristallisation des moyens (sur cette date cf ci-dessous : « accélérer les délais de jugement »).

L’article L.600-8 relatif à l’enregistrement des transactions « désistement monnayé » est modifié pour inclure les transactions antérieures au recours et pour interdire aux associations de transiger.

L’article L.600-1-1 prévoit qu’une association n’est recevable à agir que si ses statuts sont déposés en préfecture au moins un an avant l’affichage de la demande d’autorisation de construire.

Enfin l’article L.600-1-2 exclut la prise en compte des travaux de chantier pour déterminer l’intérêt à agir, ce dernier étant apprécié seulement au regard du projet. Il étend également les critères d’appréciation de l’intérêt à agir aux recours contre toutes les décisions relatives à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par code de l’urbanisme.

Mesures du décret du 18 juillet 2018

Le décret prévoit que la date d’affichage en mairie de la demande d’autorisation doit apparaître dans la décision d’autorisation ou dans le certificat d’autorisation tacite. Cette date est en effet celle utilisée pour apprécier l’intérêt à agir des particuliers et des associations. Ces dispositions sont pré-vues aux articles R. 424-5 et R. 424-13 et aux articles L. 600-1-1 et L. 600-1-3.

Par ailleurs un recours contre une autorisation d’urbanisme doit être effectué dans les 2 mois suivant l’affichage de l’autorisation sur le terrain (article R. 600-2), mais la charge de la preuve de l’affichage revient au pétitionnaire. Le nouvel article R.600-3 réduit donc à six mois à compter de l’achèvement des travaux le délai au-delà duquel le recours en annulation n’est plus possible, lorsque le pétitionnaire ne peut pas apporter la preuve de l’affichage.

L’article R.600-4 dresse une liste des pièces devant être jointes par le requérant à un recours en annulation afin de démontrer son intérêt à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol.

Accélérer les délais de jugement

Mesures de la loi ELAN

Le nouvel article L.600-5-2 oblige à contester la mesure de régularisation d’une autorisation initiale dans le cadre de l’instance en cours contre cette dernière.

Mesures du décret du 18 juillet 2018

Le nouvel article R. 600-5 met en place un nouveau système de cristallisation des moyens spécifique au droit de l’urbanisme. Il prévoit qu’aucun moyen nouveau (il s’agit des arguments contre une autorisation) n’est recevable passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense.

Le nouvel article R.600-6 fixe un délai de jugement de 10 mois pour les requêtes dirigées contre les permis de construire comportant plus de deux logements ou contre les permis d’aménager un lotissement.

Le nouvel article R. 612-5-2 du code de justice administrative prévoit que lorsqu’une requête en référé-suspension a été rejetée pour absence de doute sérieux sur la légalité de la décision, le requérant est réputé s’être désisté de sa requête en annulation ou réformation, dans un délai d’un mois à compter de la notification du rejet de la suspension, sauf s’il confirme sa requête.

Enfin, le décret prévoit, à l’article R. 811-1-1 du code de justice administrative, la prorogation jusqu’au 31 décembre 2022 de la suppression d’un degré d’appel pour certains projets de logements situés dans les communes où la taxe sur les logements vacants s’applique.

Modifier le champ de l’action en démolition

L’article L.480-13 relatif aux actions en démolition suite à une annulation d’autorisation a été modifié, pour prévoir que lorsque l’annulation et la demande de démolition résultent de recours du Préfet, l’action en démolition n’est plus restreinte aux zones protégées visées par l’article L.480-13.

Dispositions relatives au contentieux des documents d’urbanisme dans la loi ALUR

La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) du 20 mars 2014 comporte 3 dispositions relatives au contentieux des documents d’urbanisme :

  • Le juge administratif se voit doté d’un nouveau pouvoir de régularisation en la matière (article L. 600-9).
  • La possibilité d’une annulation partielle des documents d’urbanisme est consacrée dans la loi (même article)
  • La possibilité de réapprouver un PLU (plan local d’urbanisme) annulé dans le territoire d’un EPCI (établissement public de coopération intercommunale) compétent, en dérogation à l’obligation d’approuver un PLUI sur tout son territoire (article L.153-7)
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