Biocarburants

Le Lundi 26 février 2024

Les biocarburants et biocombustibles couvrent l'ensemble des carburants et combustibles liquides, solides ou gazeux produits à partir de la biomasse et destinés à une valorisation énergétique dans les transports et le chauffage.

Les biocarburants sont majoritairement utilisés sous forme d’additifs ou de complément aux carburants fossiles. On distingue trois générations de biocarburants selon l’origine de la biomasse utilisée et les procédés de transformation associés. Aujourd’hui, la première génération a atteint le stade industriel et la seconde génération est en phase de développement. La réglementation des biocarburants s’effectue également en fonction de la nature de la matière première utilisée : les biocarburants conventionnels élaborés à partir d’une matière première en concurrence avec l’alimentaire et les biocarburants avancés élaborés à partir d’autres matières premières. L’incorporation de biocarburants conventionnels est aujourd’hui plafonnée à 7% de l’énergie contenue dans les carburants.

Que sont les biocarburants ?

Les biocarburants sont des carburants de substitution obtenus à partir de la biomasse (matière première d’origine végétale, animale ou issue de déchets). Ils sont généralement incorporés dans les carburants d’origine fossile.

Il existe deux grandes filières de production des biocarburants : la filière des biocarburants « essence » et celle des biocarburants « gazole ».

La filière bioessence

La filière biocarburant « essence », pour les véhicules essence, comprend l’éthanol et son dérivé l’ETBE (éthyl tertio butyl éther) ainsi que les bio-essences de synthèse.

En France en 2019, 7,9% de l’énergie contenue dans les essences était d’origine renouvelable.

L’éthanol

En France, la betterave à sucre et les céréales (blé, maïs) sont les principales ressources utilisées pour la production d’éthanol d’origine agricole, aussi appelé bioéthanol. Il peut être également obtenu avec certains résidus vinicoles (marcs de raisin et lies de vin).

Les sucres (glucose ou saccharose) contenus dans les plantes sucrières (betterave à sucre, canne à sucre) et les plantes amylacées (céréales comme le blé ou le maïs) sont transformés en alcool par un procédé de fermentation industrielle. L’alcool est ensuite distillé et déshydraté pour obtenir du bioéthanol. Les coproduits obtenus lors du processus de production (drêches et pulpes) sont destinés à l’alimentation animale.

Schéma Bioéthanol

Schéma Bioéthanol

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Bioéthanol : transformation de betterave ou de canne à sucre en sucres fermentescibles ou transformation de blé, maïs ou pomme de terre en amidon puis en sucres fermentescibles. Les sucres sont transformés par fermentation en éthanol. L'éthanol est ensuite incorporé aux carburants.

Crédits IFPEN

En France, les cultures utilisées pour la production de bioéthanol destiné à un usage carburant représentent environ 3% de la surface agricole française globale de céréales et de plantes sucrières.

La répartition des matières premières utilisées pour produire l’éthanol mis à la consommation sur le territoire national en 2019 est la suivante :

En 2019, 83% des matières premières utilisées pour produire du bioéthanol mis à consommation en France sont d’origine française et à 99.6% d'origine européenne.

En France, le bioéthanol est utilisé en mélange dans les essences commerciales :

  • De manière systématique dans le SP95-E5 (5%) et le SP95-E10 (10%)
  • À haute teneur dans le carburant superéthanol E85, qui contient entre 65 et 85 % en volume d’éthanol. Ce carburant est disponible en station-service depuis 2007 et est destiné à des véhicules dédiés, appelés véhicules Flex Fuel (ou véhicules à carburant modulable), qui disposent des adaptations nécessaires à l’utilisation du superéthanol E85 (système d’injection, réglages du moteur, compatibilité des matériaux plastiques et des joints, dispositions spécifiques pour assurer le démarrage à froid). L'éthanol peut également être utilisé sous forme d'ED95, carburant composé à 95% de bioéthanol et destiné à des véhicules munis d'un moteur de type Diesel spécifiquement conçus pour ce carburant, et pour des flottes captives disposant d'une logistique d'approvisionnement et de maintenance dédiée.

L’usage du supercarburant SP95-E5 contenant 5% volume d’éthanol ne nécessite aucune adaptation du moteur et du véhicule. Le supercarburant SP95-E10 contenant 10% en volume d’éthanol peut ne pas être compatible avec certains véhicules anciens du parc roulant en France (mise en circulation avant 2000).

Disponible dans les stations-service depuis le 1er avril 2009, le SP95-E10 est compatible avec près de 90% des véhicules essence actuellement en circulation et avec tous les véhicules neufs (sauf exception). Pour savoir si votre véhicule est compatible, veuillez consulter la liste de véhicules compatibles avec le supercarburant sans plomb SP95-E10.

Supercarburant

Teneurs en
éthanol pur

Date mise à consommation

Compatibilité moteur

SP95-E5

Jusqu'à 5% en volume

2000

Tout véhicule essence

SP95-E10

Jusqu'à 10% en volume

2009

Véhicules essence circulant après 2000

Super Éthanol E85

de 65 à 85% en volume

2007

Véhicules dédiés
(Flex Fuel/Carburant modulable)

L’ETBE (éthyl tertio butyl éther)

L’ETBE est fabriqué à partir d’éthanol (d’origine agricole) et d’isobutène (actuellement d’origine chimique). Il est destiné à être incorporé dans les essences commerciales au maximum à hauteur de :

Supercarburants

Teneurs en ETBE

Dans le SP95-E5

Jusqu'à 15% en volume

Dans le SP98

Jusqu’à 16% en volume

Dans le SP95-E10

Jusqu'à 22% en volume

La répartition des matières premières utilisées pour produire l’éthanol entrant dans la composition de l’ETBE mis à la consommation sur le territoire national en 2019 est la suivante :

L’éthanol servant à l’élaboration de l’ETBE mis à la consommation en France en 2019 est issu à 40% de matières premières cultivées en France et 94% en Europe. Les pays européens fournisseurs de matières premières destinées à l’élaboration de cet éthanol sont principalement l’Ukraine (19%), l’Allemagne (8,2%) et la Roumanie (8%). Les 6% restants proviennent de canne à sucre brésilienne et bolivienne, et de maïs des Etats-Unis. 

Historiquement, l’ETBE constitue la voie privilégiée d’incorporation d’éthanol dans l’essence car il pose moins de difficultés techniques que l’éthanol à être incorporé. Cependant, l’ETBE est un composé d’origine partiellement renouvelable, à la différence du bioéthanol qui est 100% d’origine renouvelable. Dans la comptabilisation des quantités de biocarburants incorporés dans les carburants, seule la part énergétique d’origine renouvelable (37% pour l’ETBE) est prise en compte.

Néanmoins, de l’isobutène entièrement durable (produit à partir de sucre) devrait être prochainement mis sur le marché. L’ETBE issu de cet isobutène et d’éthanol permettra de réaliser un biocarburant entièrement durable.

 

La bioessence de synthèse

La bioessence de synthèse peut notamment être obtenue par hydrotraitement d’huiles (dans ce cas, elle peut être dénommée Huile Végétale Hydro Traitée Essence, ou HVHTE) ou par procédé Fischer – Tropsch à partir d’un gaz de synthèse. Ce sont des processus industriels « lourds » opérés dans des unités de production du type raffineries et bio-raffineries.

La bioessence de synthèse est totalement miscible à l’essence et peut être incorporée à hauteur de quelques pourcents. En 2019, la bioessence de synthèse incorporée dans les carburants a été produite à partir d'huile de palme (89%), de colza (7%) et d'effluents d'huileries de palme et rafles (POME, 4%).

 

La deuxième génération : l’éthanol d’origine lignocellulosique

Afin de diversifier les ressources en matières premières et d’éviter la concurrence avec les productions à des fins alimentaires, une priorité est donnée au développement des biocarburants dits "avancés", avec le soutien à des projets pilotes portant sur la valorisation de la part non alimentaire de la plante, sur l’utilisation de la biomasse (résidus agricoles, cultures dédiées) et sur la valorisation de déchets.

Pour l’éthanol, une voie privilégiée est l’utilisation de biomasse lignocellulosique, soit le bois ou la paille. Les différentes étapes conduisant à la production de bioéthanol à partir de matériaux lignocellulosiques sont schématisées ci-après :

Schéma éthanol ligno-cellulosique

Schéma éthanol ligno-cellulosique

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Éthanol de deuxième génération : la lignocellulose est prétraitée pour séparer les composants en lignine, cellulose et hémicellulose. Ces composés sont traités par hydrolyse, la cellulose est scindée en glucose, l'hémicellulose est scindée en différents sucres et la lignine est séparée du reste. Les sucres (glucose + sucres de l'hémicellulose) sont alors fermentés en éthanol.

La filière biogazole

La filière des biocarburants gazole, souvent regroupés sous l’appellation « biodiesel », comprend différents produits, fabriqués à partir d’huiles issues de plantes oléagineuses, de graisses animales ou d’huiles usagées. En 2019, 7,3% de l’énergie contenue dans le gazole provenait de biocarburants.

Les esters méthyliques d’acides gras (EMAG)

Ces esters méthyliques d’acides gras peuvent être obtenus à partir :

  • d’huiles végétales extraites de plantes oléagineuses (colza, tournesol...) : on parle alors d’EMHV (Ester Méthylique d’Huile Végétale),
  • de graisses animales : on parle alors d’EMHA (Ester Méthylique d’Huile Animale),
  • d’huiles végétales alimentaires usagées et récupérées par un circuit de collecte identifié : on parle alors d’EMHU (Ester Méthylique d’Huile Usagée),
  • de déchets graisseux (déchets industriels, POME,...)

Les EMAG ont représenté en 2019 83.4% des volumes de biocarburants incorporés dans le gazole (77.4% sous forme d’EMHV, 5.5% sous forme d’EMHU et 0.5% sous forme d’EMHA).

Les huiles végétales et les graisses animales ne peuvent pas être utilisées telles quelles (même en mélange dans le gazole) pour l’alimentation des moteurs Diesel modernes. C’est pourquoi elles sont « estérifiées », c’est-à-dire transformées en esters d’acide gras, par une réaction chimique de transestérification.

La réaction de transestérification consiste à faire réagir un corps gras (les triglycérides contenus dans les huiles ou les graisses) avec un alcool (méthanol ou éthanol) pour obtenir un ester d’acide gras :

  • Si l’alcool utilisé pour la réaction est du méthanol, on obtient un Ester Méthylique d’Acide Gras (EMAG). C’est actuellement la voie la plus utilisée.
  • Si l’alcool utilisé pour la réaction est de l’éthanol, on obtient un Ester Ethylique d’Acide Gras (EEAG). Cette voie est encore peu développée car elle présente des contraintes techniques de production. Il s’agit cependant d’un procédé innovant qui offre des débouchés pour le bioéthanol dans la filière gazole

Les Esters Méthyliques d'Huile Végétale (EMHV) ou biodesel

Les Esters Méthyliques d'Huile Végétale (EMHV) ou biodesel

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Biodiesel : de l'huile de colza ou de tournesol est transestérifiée en esters d'huiles végétales (ou biodiesel) qui sont ensuite incorporés au gazole.

Crédits IFPEN

Les différentes étapes de la production de biodiesel produisent des « co-produits », soit des produits ne pouvant être transformés en biocarburant. Ces différents produits sont toutefois réutilisés dans d’autres industries :

  • Le tourteau, provenant du broyage des graines (colza, soja, tournesol…), est un résidu solide valorisé dans le domaine de l’alimentation animale.
  • La glycérine (ou glycérol), obtenu lors de l’étape de transestérification des corps gras en EMAG ou en EEAG. Elle peut être valorisée dans les domaines pharmaceutique (crèmes, dentifrice), cosmétique (produits de beauté) ou alimentaire

En France, le colza est la matière première la plus utilisée pour la fabrication des EMHV.

La répartition des matières premières utilisées et de leurs origines pour produire les EMHV mis à la consommation sur le territoire national en 2019 est la suivante :

L'Europe est la zone d'origine de la matière première pour 60% des volumes produits. Les deuxième et troisième zones pourvoyeuses de matière première sont l'Amérique (28% ; soja en provenance d'Argentine notamment, et colza canadien) et l'Asie (9% ; huile de palme).

Aujourd’hui, les EMAG sont utilisés en mélange dans le gazole B7 commercial de manière banalisée à hauteur maximale de 7% en volume. Les EMAG peuvent également être incorporés à hauteur de 10% dans le gazole B10, de 30% en volume dans le gazole B30, et jusqu'à 100% dans le B100. Le B30 et le B100 ne sont pas commercialisés en station-service car ils ne sont pas compatibles avec les moteurs de nombreux véhicules Diesel déjà mis en circulation. Le B30 et le B100 sont réservés à une utilisation en « flotte captive », c’est-à-dire pour des flottes de véhicules qui disposent de leur propre logistique d’approvisionnement et de distribution et de conditions de maintenance adaptées.Environ 51% des volumes d’huiles usagées utilisées pour produire des EMHU proviennent d’Europe (France, Espagne et Belgique notamment), et 32% d’Asie (22% de Chine). Les graisses animales utilisées pour les EMHA proviennent d’Europe.

Les biogazoles de synthèse

Ces biogazoles peuvent être obtenus :

1. Hydrotraitement d’huiles végétales ou de graisses animales : Huiles Végétales Hydro Traitées Gazole (HVHTG)

L’hydrotraitement consiste à traiter à l’hydrogène des corps gras contenus dans les huiles végétales ou les graisses animales. Il existe deux procédés pour le réaliser :

  • dans une unité dédiée de type « bioraffinerie »,
  • en co-traitement dans une raffinerie (l’huile est mélangée en amont de l’unité de désulfuration à un flux pétrolier de gazole) : ce procédé est appelé « co-processing ».

A l’heure actuelle, les unités d’hydrogénation des huiles nécessitent des investissements importants : à capacité équivalente, ce type d’installation s’avère plus onéreux qu’une unité de production d’EMAG. En 2019, 16,5% des volumes de biocarburants incorporés dans le gazole étaient des HVHTG, principalement produits à 95% à partir d’huile de palme.

2. Voie thermochimique : Biomass to Liquid (BtL)

La conversion thermochimique de la biomasse (gazéification et synthèse Fisher-Tropsch), aussi appelée BtL (Biomass to Liquid), comprend les étapes suivantes :

  • conditionnement de la biomasse (préparation, trituration, torréfaction)
  • gazéification de la biomasse (obtention d’un gaz de synthèse)
  • purification du gaz de synthèse
  • synthèse Fisher-Tropsch pour transformer le gaz en biogazole de synthèse

Les biogazoles de synthèse ou obtenus par hydrotraitement ont des propriétés comparables voire supérieures à celles du gazole et sont utilisés en mélange dans le gazole commercial.

Recherche et Développement

Parallèlement aux filières actuelles, la recherche sur les biocarburants de deuxième et troisième génération est privilégiée. Ces filières du futur se développent avec de nouveaux procédés industriels utilisant des sources de biomasse non destinées à l’alimentation humaine ou animale.

Les biocarburants de « deuxième génération » sont issus de la transformation de la lignocellulose contenue dans les résidus agricoles (paille) et forestiers (bois), dans des plantes provenant de cultures dédiées (taillis à croissance rapide) ou de la valorisation des déchets industriels.

Deux voies sont développées pour transformer la lignocellulose des plantes : 

  • La voie thermochimique pour obtenir du biogazole de synthèse : on parle aussi de filière BtL (pour Biomass to Liquid),
  • La voie biochimique pour obtenir de l’éthanol.

Les filières du futur

Les filières du futur

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Filières du futur : utilisation de résidus agricoles (pailles) ou forestiers, ou utilisation de cultures dédiées (taillis à croissance rapide). Deux voies de transformation sont possibles :
1) Voie thermochimique (gazéification), obtention de gaz de synthèse, synthétisés en hydrocarbures puis mélangés au gazole
2) Voie biochimique (hydrolyse enzymatique), obtentions de sucres, fermentés en éthanol qui est ensuite mélangé à l'essence

Crédits IFPEN

Ces nouvelles filières présentent des bilans énergétiques plus favorables et permettent en outre de limiter les problématiques d’usage des sols et de concurrence avec les débouchés alimentaires. 

Des financements sont mis en place par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), tels que le programme Bioénergies 2010 qui a pour objectif la valorisation énergétique de tous les constituants de la biomasse (sous forme de chaleur, d’électricité, de gaz de synthèse et biocombustibles liquides, utilisables en substitution des énergies fossiles), ainsi que le comité de bioéconomie créé en 2017.

De plus, le gouvernement a confié à l’ADEME la gestion d’un fonds afin de soutenir les recherches engagées dans les différents domaines des nouvelles technologies de l’énergie. Dans ce cadre, l’agence a lancé un appel à manifestation d’intérêt (AMI) sur les biocarburants de deuxième génération.

Les projets soutenus concernent toutes les filières de carburants consommés en France (essence, gazole, gaz) :

  • Futurol basé sur un procédé biochimique de transformation de la biomasse pour produire de l’éthanol 
  • BioTfuel basé sur un procédé thermochimique de transformation de la biomasse puis de la synthèse Fischer Tropsch pour produire principalement un biogazole et un biokérosène de synthèse 
  • Gaya basé sur un procédé de gazéification - méthanation pour produire un biocarburant gazeux

Pourquoi développer les biocarburants ?

L’utilisation des biocarburants en mélange avec les carburants traditionnels dans le secteur des transports a pour but de répondre à cinq enjeux essentiels :

  • réduire les émissions de gaz à effet de serre
  • anticiper l’épuisement des réserves mondiales de pétrole
  • réduire la dépendance énergétique pétrolière
  • offrir un débouché supplémentaire aux filières agricoles
  • créer une filière de valorisation des déchets

Dans un contexte de réchauffement climatique lié aux émissions de gaz à effet de serre, de la fluctuation des prix du pétrole, de préoccupations sur la sécurité des approvisionnements en énergie, les biocarburants constituent une ressource énergétique alternative et renouvelable, produite à partir de biomasse.

La loi de transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 fixe des objectifs ambitieux visant à réduire nos consommations d’énergies fossiles. L’augmentation de la part des énergies renouvelables et notamment celle des biocarburants avancés dans les transports routier et aérien permettra de contribuer au respect de cet objectif, ainsi que celui de l’Accord de Paris qui vise à maintenir le réchauffement climatique en dessous de 2 °C, voire 1,5 °C.

Objectifs européens et durabilité

Comment est assurée la durabilité des biocarburants en Europe ?

En 2009, le paquet Énergie-Climat a défini une politique européenne commune. Il fixe un objectif européen dit « 3 x 20 » qui consiste d’ici 2020 à :

  • diminuer de 20 % les émissions de gaz à effet de serre (par rapport à 1990) ;
  • augmenter de 20 % l’efficacité énergétique ;
  • augmenter à 20 % la part des énergies renouvelables (23 % pour la France).

En effet, la maîtrise de la consommation énergétique européenne et l’augmentation de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables constituent des éléments importants du paquet de mesures requises afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de se conformer, notamment, au protocole de Kyoto et à la convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique. Ces facteurs ont également un rôle non négligeable à jouer pour la sécurité des approvisionnements en énergie, le développement technologique, l’innovation, ainsi que pour la création d’emplois et le développement régional (en particulier dans les zones rurales et les zones isolées).

Parmi les textes du paquet Énergie-Climat, deux directives européennes définissent des critères de durabilité pour les biocarburants et les moyens de vérification du respect de ces critères par les opérateurs économiques.

La directive européenne 2009/28/CE relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (appelée directive EnR) fixe un objectif d’utilisation d’énergies renouvelables dans le bouquet énergétique de 23% pour la France en 2020 et un objectif au moins égal à 10% d’énergies renouvelables dans le secteur des transports en 2020.

La directive européenne 2009/30/CE, dite « qualité des carburants » modifiant la directive 98/70/CE en ce qui concerne les spécifications relatives à l’essence, au carburant diesel et aux gazoles, fixe un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre produites sur l’ensemble du cycle de vie des carburants ou de l’énergie utilisée pour le transport de 10% (dont 6% pour les carburants) en 2020.

Selon ces deux directives, seuls les biocarburants consommés dans l’Union européenne, répondant à des critères conformes aux exigences du développement durable, dénommés ci-après « critères de durabilité » pourront être pris en compte pour évaluer le respect de ces objectifs et bénéficier d’une aide financière pour leur consommation.

En 2015, la directive 2015/1513 dite « CASI » (Changement d’Affectation des Sols Indirect) modifie les directives EnR et 2009/30/CE et précise notamment les modalités d’application suivantes :

  • la directive confirme l’objectif de 10 % d’EnR dans les transports en 2020 avec :
    • un plafond de 7 % pour les biocarburants en concurrence alimentaire,
    • un objectif indicatif de 0,5 % en 2020 pour les biocarburants avancés.
  • elle définit la liste des matières premières qui permettent d’élaborer des biocarburants avancés

La révision de la directive EnR (directive 2018/2001 appelée EnR2), a été publiée le 21 décembre 2018 :

  • Elle fixe un objectif d’énergie renouvelable de 14% dans les transports en 2030, en confirmant le plafond de 7% pour les biocarburants de première génération.
  • Elle reprend et renforce les critères de durabilité définis dans la première directive EnR et décrits ci-après.
  • Elle vise à limiter l’effet de changement d’affectation des sols indirect décrit ci-dessous en identifiant les matières premières les plus à risque, en plafonnant leur incorporation puis en les éliminant progressivement d’ici 2030.

Critères de durabilité auxquels sont soumis les biocarburants :

Critères quantitatifs liés aux émissions de GES (Gaz à Effet de Serre)

Les biocarburants participent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans la mesure où le CO2 dégagé lors de leur combustion est compensé par le CO2 absorbé durant la croissance des végétaux.

Tout biocarburant doit prouver une réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre d’au moins 50% par rapport à l’équivalent fossile (60% pour les unités les plus récentes), calculée selon une méthode en Analyse du Cycle de Vie « du puits à la roue ». Les modalités de calcul sont décrites précisément dans la directive Énergies Renouvelables. L’effet de Changement d’Affectation des Sols Indirect créé des émissions non intentionnelles de carbone en raison de l’utilisation de terres cultivées existantes aux fins de la production de biocarburant et du déplacement consécutif de la production alimentaire (ou autre) vers de nouvelles terres arables, ce qui peut entraîner de la déforestation et la disparition de réservoirs de carbone. Cet effet, très difficile à quantifier, pourrait dégrader le bilan carbone global des biocarburants de première génération. C’est pourquoi la révision de la directive énergie renouvelables confirme le plafond à 7% des biocarburants conventionnels et prévoit par un acte délégué en février 2019 de caractériser les matières premières les plus à risque et de les éliminer progressivement jusqu’en 2030, tout en mettant l’accent sur le développement de biocarburants de deuxième génération.

Critères qualitatifs, liés aux terres

Les biocarburants ne doivent pas être produits à partir de terres riches en biodiversité et de terres présentant un important stock de carbone ou de tourbières. En plus, pour les productions européennes, les conditions d’attribution des aides de la politique agricole commune et les bonnes conditions agro-environnementales doivent être respectées pour la production de matières agricoles.

Ces critères s’appliquent également aux biocarburants produits à partir de matières premières en provenance de pays tiers, pour toute la chaîne de production et de distribution des biocarburants, dont les étapes vont du champ jusqu’à la distribution des carburants destinés à la consommation. En cas de mélange de lots de matières premières, de produits semi-finis ou de biocarburants, les opérateurs économiques doivent mettre en œuvre un système de bilan massique. Les opérateurs économiques qui prennent part à cette chaîne doivent être en mesure de démontrer que les critères de durabilité ont été respectés, que les informations sont fiables et qu’un contrôle indépendant des informations a été mis en œuvre.

A cette fin, les opérateurs économiques concernés ont le choix entre trois systèmes :

  • un système national mis en place par chaque État membre ;
  • un système volontaire, mis en place généralement par les opérateurs économiques, qui doit faire l’objet d’une validation par la Commission européenne (CE). Ces systèmes peuvent couvrir une partie ou la totalité des critères de durabilité ;
  • un accord bilatéral ou multilatéral conclu par l’Union européenne avec des pays tiers. A ce jour, il n’existe pas de tels accords.

L’ensemble des nouvelles dispositions relatives à la mise en œuvre des critères de durabilité pour les biocarburants constitue le régime général de durabilité, appelé « système de durabilité ».

 

Calcul de l'atteinte de l'objectif européen de 10% d'énergie renouvelable dans les transports prévu pour 2020 à l'article L641-6 du code de l'énergie :

  1. Seuls l'essence, le gazole, les biocarburants et l'électricité, y compris l'électricité utilisée pour la production de carburants liquides et gazeux renouvelables, d'origine non biologique, destinés au secteur du transport, consommés dans les transports routier et ferroviaire sont pris en compte au dénominateur ;
     
  2. Tous les types d'énergie, produite à partir de sources renouvelables, consommés dans tous les modes de transport sont pris en compte au numérateur.

L'apport de l'électricité produite à partir de sources renouvelables et consommée dans tous types de véhicules électriques et pour la production de carburants liquides et gazeux renouvelables destinés au secteur du transport, d'origine non biologique, pour l'application du 1° et du 2°, est calculé sur la base de la part moyenne nationale que représentait deux ans avant l'année considérée l'électricité produite à partir de sources renouvelables dans la production totale d'électricité ; en outre, les consommations d'électricité produites à partir de sources renouvelables par le secteur ferroviaire et les véhicules routiers sont, respectivement, considérées comme représentant deux fois et demie et cinq fois le contenu énergétique de l'apport d'électricité produite à partir de sources renouvelables ;

Les biocarburants et les bioliquides produits à partir de déchets et de résidus, de matières cellulosiques d'origine non alimentaire et de matières lignocellulosiques sont comptabilisés pour le double de leur valeur réelle en pouvoir calorifique. La liste de ces biocarburants et bioliquides est fixée par un arrêté conjoint des ministres chargés, respectivement, de l'écologie, de l'énergie, des douanes et de l'agriculture. Cet arrêté précise les modalités du double comptage pour exclure toute utilisation frauduleuse.

  • La part d'énergie des biocarburants produits à partir de céréales et d'autres plantes riches en amidon, sucrières et oléagineuses et à partir de cultures cultivées en tant que cultures principales essentiellement à des fins de production d'énergie sur des terres agricoles n'est pas supérieure à 7 % de la consommation finale d'énergie dans les transports en 2020.

Chaque année l’administration française rapporte auprès de la Commission Européenne la part d’énergie renouvelable incorporée dans les transports. En 2018, cette part s'élevait à 9%, dont 1,46% pour l'électricité renouvelable.

En 2020, les objectifs d’incorporation de biocarburants imposés à tous les opérateurs mettant à consommation des carburants via le mécanisme de la TIRIB permettront de contribuer à l'atteinte de l'objectif européen à hauteur de :
 

  • 8% pour les gazoles (routiers et non routiers)
  • 8.2% pour les essences

Pour ce mécanisme, les règles de calcul suivantes s'appliquent :

  • La part énergétique des biocarburants produits à base d’huile de palme ne peut être comptabilisée.
  • La part d'énergie des biocarburants produits à partir de céréales et d'autres plantes riches en amidon, sucrières et oléagineuses et à partir de cultures cultivées en tant que cultures principales essentiellement à des fins de production d'énergie sur des terres agricoles n'est pas supérieure à 7 % de la consommation finale d'énergie dans les gazoles et essences.
  • La part d'énergie des biocarburants produits à partir des égouts pauvres de deuxième extractions et de l’amidon résiduel n’est pas supérieure à 0.6% de la consommation finale d'énergie dans les essences.
  • La part d'énergie des biocarburants produits à partir des matières premières listées à l’annexe IX-B de la directive européenne 2018/2001 n’est pas supérieure à 0.9% de la consommation finale d'énergie dans les gazoles et essences et peut valoir le double de son contenu énergétique.
  • La part d'énergie des biocarburants produits à partir des matières premières listées à l’annexe IX-A de la directive européenne 2018/2001 peut valoir le double de son contenu énergétique, jusqu'à 1,2% dans les essences et 1% dans les gazoles.

Quelle politique des biocarburants en France ?

La France s’est engagée dans un programme de développement des biocarburants et met en œuvre une série de mesures permettant d’encourager leur production et leur mise sur le marché tout en respectant la biodiversité. Ce plan a fixé des objectifs ambitieux d’incorporation de biocarburants dans les carburants traditionnels d’origine fossile.

L’article 32 de la loi de finances pour 2005 a introduit une taxe (TGAP, renommée Taxe Incitative relative à l’Incorporation de Biocarburants dans la loi de finances 2019) sur la mise à la consommation d’essence d’une part et de gazole d’autre part basée sur le prix de vente hors TVA. Elle encourage l’incorporation et la distribution de biocarburants en pénalisant les opérateurs qui mettent à la consommation une proportion de biocarburants inférieure à l'objectif d'incorporation dans chacune des filières.

Évolution des objectifs d'incorporation de biocarburants en France depuis 2009 (en % énergétique)

 

2009 à 2013

 2014

 2015

 2016

2017

2018

2019

2020

2021

Essence

7

7

7

7

7.5

7.5

7.9

8.2

8.6

Gazole

7

7,7

7,7

7,7

7.7

7.7

7.9

8

8

 

Par ailleurs, la directive 2015/1513 dite « CASI » (Changement d’Affectation des Sols Indirect) impose que les états fixent un objectif d’incorporation de biocarburants avancés. La prise en compte de cet objectif est progressivement intégrée dans la taxe.

En parallèle des dispositifs fiscaux incitatifs, deux types de mesures ont été mis en œuvre pour permettre l’atteinte de ces objectifs ambitieux d’incorporation :

  • relever les pourcentages maximaux d’incorporation dans les carburants distribués avec le lancement de l’essence SP95 E10 en 2009 et l’incorporation jusqu’à 10 % en volume d’EMAG dans le gazole B10 en 2015 ;
  • autoriser des carburants à teneur élevée en biocarburants avec le lancement du superéthanol E85 (contenant entre 65 et 85 % en volume d’éthanol) en 2007, ainsi que le gazole B30 (contenant 30 % en volume d’EMAG) et en 2016 le carburant ED95 (contenant jusqu’à 95 % en volume d’éthanol), puis en 2018 le carburant B100 destinés aux flottes captives.

L’article 43 de la Loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte prévoit qu’il convient désormais d’accorder la priorité au développement des biocarburants avancés tout en préservant les investissements réalisés dans les filières de production des biocarburants conventionnels. Les objectifs d’incorporation de biocarburants avancés dans les carburants sont définis dans la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie

 

2023

2028

Filière essence

1,2%

3,8%

Filière gazole

0,4%

2,8%

La production de biocarburants en France

La France est un des pays européens où les biocarburants sont les plus développés.

La France est le quatrième pays producteur mondial de biocarburants (5 % de la production mondiale) après les États Unis, le Brésil et l’Allemagne, avec plus de 2 millions de tonnes de biocarburants produits sur le territoire.

Comment les biocarburants sont-ils distribués en stations-service ?

Les biocarburants sont essentiellement utilisés en mélange avec les carburants d’origine fossile.

La distribution en station-service des biocarburants se fait de la façon suivante :

  • les supercarburants SP95 et SP98 contiennent jusqu’à 5 % en volume d’éthanol ou 15 % en volume d’ETBE
  • le supercarburant SP95-E10 contient jusqu’à 10 % en volume d’éthanol ou 22 % en volume d’ETBE
  • le gazole B7 contient jusqu’à7  % en volume d’EMAG (esters méthyliques d’acide gras)
  • Le Gazole B10 contient jusqu’à 10% en volume d’EMAG
  • le superéthanol E85 contient entre 65 % et 85 % en volume d’éthanol

En dehors des carburants distribués en stations-service, les biocarburants peuvent être utilisés dans des conditions spécifiques :

  • les  gazole « B30 » et « B100 » contiennent respectivement jusqu’à 30 % et 100% en volume d’EMAG (esters méthyliques d’acide gras). Il sont autorisés pour les véhicules de flottes captives disposant d’une logistique d’approvisionnement en carburant dédiée. Ces carburants ne sont pas disponibles à la vente au grand public, car il ne sont pas compatibles avec les moteurs de nombreux véhicules Diesel déjà mis en circulation et ils nécessitent des conditions de maintenance adaptées.
  • le carburant « ED95 » contient jusqu’à 95 % d’éthanol, le reste étant composé d’additifs permettant l’auto-inflammation du mélange. Ce carburant est destiné à l’utilisation dans des moteurs à allumage par auto-inflammation (de type « Diesel » spécifiquement adaptés).
  • les huiles végétales pures (HVP) : les agriculteurs et les pêcheurs sont autorisés à utiliser de l’huile végétale pure dans les moteurs des tracteurs et autres engins agricoles ainsi qu’à bord des navires de pêche.
  • Les collectivités locales peuvent utiliser, à titre expérimental, des huiles végétales pures ou en mélange, dans leurs véhicules non destinés au transport de passagers, sous réserve d’avoir préalablement signé avec l’État un protocole précisant notamment les obligations de suivi et de contrôle régulier des véhicules
A la suite de la décision du Conseil d'État du 25 janvier 2023, l'arrêté du 11 avril 2022 modifiant l'arrêté du 21 juin 2016 a été annulé. L'État prend acte du jugement du Conseil d'État. L'arrêté du 4 octobre 2022 est quant à lui toujours en vigueur et encadre la situation règlementaire des demandeurs de vignettes Crit'air. Les poids lourds, autobus et autocars Euro 6 à motorisation exclusive B100 continuent ainsi de se voir délivrer la vignette Crit'air 1.

Les biocarburants aériens

Que sont les biocarburants aériens ?

Les biocarburants aériens, aussi appelés biokérosène ou biojet sont des biocarburants pouvant être utilisés en substitution du kérosène, jusqu'à 50% d'incorporation dans le kérosène fossile.

Les biocarburants aériens doivent répondre à des caractéristiques techniques particulières pour assurer la sécurité des passager, certifiés par ASTM (American society for testing material).

Politique Française pour les biocarburants aériens

Les biocarburants aéronautiques durables constituent un levier stratégique pour la réduction à court et moyen terme des émissions nettes du secteur qui dispose de peu d’alternatives énergétiques.

Signé en décembre 2017, l’Engagement pour la croissance verte (ECV), sur les biocarburants aéronautiques a permis de lancer la réflexion sur les conditions du déploiement d’une filière française. Il a associé l’État et cinq groupes industriels français : Air France, Airbus, Safran, Total et Suez Environnement.

Les ministères de la transition écologique et solidaire, de l’économie et de l’agriculture, ont défini, sur cette base, la feuille de route nationale, qui précise l’ambition et la stratégie que la France pourrait développer en matière de biocarburants aéronautiques durables dès 2025.

Cette feuille de route prévoit notamment une trajectoire de substitution à court-terme du kérosène fossile par des biocarburants durables de 2% en 2025 et de 5% en 2030. Amorcer le déploiement de ces produits à court-terme s’inscrit en cohérence avec la Stratégie nationale bas-carbone qui fixe un objectif de long terme de 50% en 2050.

Le déploiement des biocarburants aéronautiques durables constitue une des priorités du Gouvernement qui va continuer d’œuvrer en ce sens, en lien étroit avec l’ensemble des acteurs industriels concernés.

Afin de rendre très opérationnelle cette feuille de route nationale, les ministères de la transition écologique et solidaire, de l’économie et de l’agriculture lancent ce jour un appel à manifestation d’intérêt (AMI) sur la production de biocarburants aéronautiques durables. Cet AMI a pour objectif d’identifier les projets d’investissement dans des unités de production de biocarburants de deuxième génération, actuellement envisagés par les acteurs économiques en France, et en particulier les projets d’investissement dans des unités de production de biocarburants à destination de l’aéronautique.

Appel à manifestation d'intérêt

Plus d'informations sur l'appel à manifestation d'intérêt sur le site de la Direction Générale des Entreprises.

Les candidatures au présent appel à manifestation d’intérêt doivent être déposées à l’adresse : ami-biocarburants.dge@finances.gouv.fr

La liste des sociétés reconnues au double comptage est désormais disponible à cette adresse.

 

Conformément au guide pratique, les déclarations de durabilité peuvent être envoyées sous format électronique à l’adresse suivante :

durabilite-bio@developpement-durable.gouv.fr

Pour toute question relative à la durabilité des biocarburants, la même adresse peut être utilisée.

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