Publié le 23 août 2019
Mis à jour le 31 mai 2021
Pollution lumineuse
Les conséquences de l’excès d’éclairage artificiel ne se limitent pas à la privation de l’observation du ciel étoilé. Elles sont aussi une source de perturbations pour la biodiversité (modification du système proie-prédateur, perturbation des cycles de reproduction, des migrations…) et représentent un gaspillage énergétique considérable.
La réglementation
Loi portant engagement national pour l'environnement (Grenelle II)
L’article 41 de la loi, codifié à l'article L.583-1 du code de l'environnement précise les 3 raisons de prévenir, supprimer ou limiter les émissions de lumière artificielle lorsque ces dernières :
- sont de nature à présenter des dangers ou à causer un trouble excessif aux personnes, à la faune, à la flore ou aux écosystèmes,
- entraînent un gaspillage énergétique
- empêchent l’observation du ciel nocturne.
L'article L. 583-1, complété des articles L.583-2 et 583-5 du code de l’environnement détaillent la manière selon laquelle ces objectifs peuvent être atteints. Des prescriptions techniques peuvent être imposées à l’exploitant ou l’utilisateur de certaines installations lumineuses.
Comme le prévoit l’article L.583-2 du code de l’environnement, l’autorité compétente pour s’assurer du respect de ces dispositions est d’une manière générale le maire, sauf en ce qui concerne l’éclairage des bâtiments communaux pour lesquels la compétence échoit au préfet.
Les articles R.583-1 à R.583-7 définissent notamment les installations concernées par cette réglementation, le zonage permettant d’adapter les exigences aux enjeux des territoires concernés (agglomération, espaces naturels, sites astronomiques) ainsi que les principales prescriptions techniques qui peuvent être réglementées par arrêté.
L’arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses reprend les obligations de l’arrêté du 25 janvier 2013 abrogé par l’arrêté du 27 décembre 2018, et les complètent en étendant son champ à toutes les installations d’éclairage défini à l’article R. 583-1 et ajoute aux prescriptions de temporalité des prescriptions techniques.
Pour la temporalité, l’arrêté du 27 décembre 2018 reprend les plages horaires existantes mais précise un certain nombre de cas particuliers sur la temporalité :
Les lumières éclairant le patrimoine et les parcs et jardins accessibles au public devront être éteintes au plus tard à 1 h du matin ou 1 h après la fermeture du site ;
les éclairages intérieurs de locaux à usage professionnel doivent être éteints une heure après la fin d’occupation desdits locaux ;
les éclairages des vitrines de magasins de commerce ou d’exposition sont éteints au plus tard à 1 heure ou une heure après la fin d’occupation desdits locaux si celle-ci intervient plus tardivement. Elles peuvent être allumés à partir de 7 heures ou une heure avant le début de l’activité si celle-ci s’exerce plus tôt ;
les parkings desservant un lieu ou une zone d’activité devront être éteints 2 h après la fin de l’activité, contre 1 h pour les éclairages de chantiers en extérieur ;
les éclairages extérieurs destiné à favoriser la sécurité des déplacements, des personnes et des biens, liés à une activité économique et situés dans un espace clos non couvert ou semi-couvert, sont éteints au plus tard 1 heure après la cessation de l’activité et sont rallumés à 7 heures du matin au plus tôt ou 1 heure avant le début de l’activité si celle-ci s’exerce plus tôt.
Ces mesures (sauf les éclairages des chantiers) peuvent être adaptées si ces installations sont couplées avec des dispositifs de détection de présence ou avec un dispositif d'asservissement à l'éclairement naturel.
Le texte prévoit que les préfets peuvent prendre des dispositions plus restrictives pour tenir compte de sensibilité particulière aux effets de la lumière d’espèces faunistiques et floristiques ainsi que les continuités écologiques
Le maire peut déroger aux dispositions pour l’éclairage de mise en valeur de patrimoine et des bâtiments non résidentiel lors des veilles des jours fériés chômés et durant les illuminations de Noël.
Les préfets peuvent déroger à ces mêmes dispositions, lors d’événements exceptionnels à caractère local définis par arrêté préfectoral et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente.
Les gestionnaires d’installations d’éclairage lancent une réflexion pour éteindre leurs luminaires lorsque cela est possible.
L’arrêté fixe des prescriptions techniques (la répartition du flux lumineux sur une surface donnée, la température de couleur …) à respecter en agglomération et hors agglomération, ainsi que dans des espaces naturels protégés. L’objectif est de réduire l’intensité lumineuse des luminaires en alliant sécurité et visibilité des personnes et limitation des impacts sur la biodiversité. L’arrêté interdit également l’éclairage vers le ciel. Toute personne dont le logement est situé au-dessus d’un lampadaire ne devra donc plus être gênée par cette lumière intrusive.
Les luminaires installés après le 1er janvier 2020 devront être conformes à l’ensemble des dispositions. Pour les luminaires existants, l’entrée en vigueur varie selon la disposition et le type de luminaire. Les canons à lumière de plus de 100 000 lumens et les installations à faisceaux de rayonnement laser sont d'ores et déjà interdits dans les espaces protégés (parcs nationaux, réserves naturelles et périmètres de protection, parcs naturels régionaux, parcs naturels marins, sites classés, sites inscrits, sites Natura 2000). Les mesures liées à la temporalité seront, elles, effectives au 1er janvier 2021, lorsqu’elles ne requièrent pas la création d’un réseau d’alimentation séparé. Les mesures de temporalité concernant l'éclairage de bâtiments non résidentiels et l'éclairage intérieur émis vers l'extérieur sont en vigueur, puisqu'elles étaient déjà présentes dans l'arrêté du 25 janvier 2013.
Enfin, l’arrêté introduit un volet de contrôle : chaque gestionnaire d’un parc de luminaires devra avoir en sa possession un certain nombre d’éléments permettant de vérifier la conformité des installations d’éclairage (donnée sur l’intensité lumineuse, date de mise en fonction, puissance électrique du luminaire …).
L’arrêté du 27 décembre 2018 fixant la liste et le périmètre des sites d’observation astronomique exceptionnels en application de l’article R. 583-4 du code de l’environnement complète les textes précédents en listant onze sites d’observation astronomique devant être protégés de la lumière nocturne dans un rayon de 10 kilomètres. Une plaquette de présentation de l'arrêté a été publiée.
- Article L. 583-1 à L. 583-4 du code de l'environnement
- Article R. 583-1 à R. 583-7 du code de l'environnement
- Arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses
- Arrêté du 27 décembre 2018 fixant la liste et le périmètre des sites d'observation astronomique exceptionnels en application de l'article R. 583-4 du code de l'environnement
La loi biodiversité
Les paysages nocturnes font partie du patrimoine commun de la nation (L.110-1 du code de l’environnement). Il est du devoir de chacun de veiller à la sauvegarde et de contribuer à la protection de l'environnement, y compris nocturne. (L.110-2 du code de l’environnement).
L’introduction directe ou indirecte de sources lumineuses d’origine anthropique fait partie des sources de pollution du milieu marin (L. 219-8 du code de l’environnement).
Les objectifs de qualité paysagère mentionnés à l'article L. 333-1 (parcs naturels régionaux) visent également à garantir la prévention des nuisances lumineuses définie à l'article L. 583-1.
La loi de transition énergétique (article 188)
Dans le cadre des plans climat-air-énergie territoriaux, lorsque l’intercommunalité à l’origine de ce plan exerce la compétence en matière d'éclairage, le programme d'actions comporte un volet spécifique à la maîtrise de la consommation énergétique de l'éclairage public et de ses nuisances lumineuses.
(article 189) Les nouvelles installations d'éclairage public sous maîtrise d'ouvrage de l'Etat et de ses établissements publics et des collectivités territoriales font preuve d'exemplarité énergétique et environnementale conformément à l'article L. 583-1 du code de l'environnement.
Quelle perception ont les Français des nuisances lumineuses ?
Selon l’Ademe, les 11 millions de points lumineux qui constituent le parc d’éclairage public appellent une puissance d’environ 1300 MW, soit la puissance délivrée par une tranche nucléaire récente à pleine charge. L’éclairage public correspond à 41 % de la consommation d’électricité des communes et émet annuellement 670 000 tonnes de CO2.
Ce parc, globalement vétuste – le Syndicat de l’éclairage estime qu’au moins 40 % des luminaires en service ont plus de 25 ans –, présente un vaste potentiel de réduction des nuisances lumineuses et des consommations d’énergie grâce notamment à l’utilisation :
de lampes plus efficaces. Les lampes à vapeur de mercure qui composent 30 à 35 % du parc d’éclairage public sont deux fois moins efficaces que les lampes à vapeur de sodium par exemple ;
d’une lumière mieux orientée vers les zones à éclairer. Environ 1 million de « boules lumineuses » sont encore en service, présentant à la fois une très mauvaise efficacité lumineuse globale et générant une importante pollution lumineuse en éclairant davantage le ciel que la chaussée ;
par la mise en place de systèmes de gradation de la lumière, qui permettent d’adapter la quantité de lumière émise aux besoins, et éventuellement d’extinction de l’éclairage en pleine nuit dans certaines zones.
Villes et Villages étoilés
Soutenu par le ministère, organisé par l’Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturnes (ANPCEN), le label national « Villes et Villages étoilés » valorise les démarches d'amélioration de la qualité de la nuit et de l'environnement nocturne.
Le concours « Villes et Villages Etoilés » encourage les actions menées dans une approche globale prenant en compte à la fois les enjeux de confort et sécurité, de biodiversité, de santé des humains, les coûts économiques et gaspillages énergétiques, les relations associant les citoyens… Il encourage les meilleures pratiques en la matière.
Jusqu'à présent, les communes participaient individuellement. Depuis 2019, il est ouvert à la participation collective de communes dans différents territoires.
Les communes labellisées et territoires distingués reçoivent un diplôme individualisé et peuvent poser des panneaux « Ville étoilée » ou « Village étoilé » où figure le nombre d’étoiles obtenues ou « Territoire de Villes et Villages étoilés ».
Les éditions précédentes ont déjà reconnu 722 communes labellisées.
Le Jour de la nuit
Le Jour de la nuit est une campagne nationale de sensibilisation des collectivités et des citoyens sur les nuisances lumineuses et l’environnement nocturne qui est organisée depuis 2009 par l’association Agir pour l’environnement.
Lors de cet événement, de nombreuses animations et activités sont proposées partout en France au grand public : conférences, expositions, sorties nature, écoute des animaux, observations des étoiles, découvertes de la biodiversité nocturne, etc. En parallèle, de nombreuses villes éteignent symboliquement tout ou partie de leur éclairage public ou de leur éclairage de mise en valeur du patrimoine.
Depuis 7 ans, ce sont plus de 400 manifestations qui ont été organisées chaque année sur tout le territoire mobilisant notamment de nombreuses collectivités locales, associations et gestionnaires d’espaces naturels.
Cet événement permet d’accompagner la mise en œuvre de la réglementation relative aux nuisances lumineuses et à la maitrise des consommations d’énergie au travers d’une sensibilisation des différents publics (le grand public, les élus et les professionnels) sur la problématique et les enjeux liés aux nuisances lumineuses, et invite notamment à réfléchir à un éclairage raisonné.