Publié le 09 janvier 2017
Mis à jour le 21 septembre 2017
Mécanismes internationaux et nationaux de réduction des émissions
Au titre du Protocole de Kyoto, les pays industrialisés se sont engagés à respecter des quotas de limitation de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) pour la première et la seconde période d'engagement (respectivement 2008-2012 et 2013-2020).
Pour permettre aux États d'atteindre à un meilleur coût-efficacité leurs objectifs, le Protocole a prévu la création de trois mécanismes de flexibilité: l’échange d’unités de quantité attribuée (UQA), le mécanisme de développement propre (MDP), et la mise en œuvre conjointe (MOC). Ces mécanismes permettent l'achat d’unités carbone, par des États dont les émissions dépassent leur plafond. Celles-ci viennent alors s'ajouter au stock d’UQA, qui leur a été initialement délivré. Le recours à ces mécanismes se fait en complément des politiques et mesures adoptées au plan national.
La France applique le mécanisme de la MOC pour des projets réalisés sur le territoire français, ce qui constitue le dispositif des « Projets domestiques ». Il vise des émissions de GES dans les secteurs non-couverts par le marché européen de quotas.
L’Accord de Paris, adopté en 2015 et ratifié en 2016, prévoit à son article 6, la mise en place de nouveaux mécanismes de réduction des émissions : un cadre comptable pour l’échange d’efforts d’atténuation à l’international (articles 6.2 et 6.3), un mécanisme centralisé devant s'inspirer du MDP et de la MOC et les remplacer ces derniers (articles 6.4 à 6.7) et enfin, un cadre pour les approches non-marchandes (articles 6.8 et 6.9).
Le Protocole de Kyoto et les mécanismes de projet
En décembre 1997, à l’issue de deux ans et demi d’intenses négociations, la Conférence des Parties adopte à sa 3e session, à Kyoto, au Japon, un texte majeur qui complète la Convention et qui impose des obligations juridiquement contraignantes en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le Protocole de Kyoto est complété par plusieurs accords, dont les principaux sont ceux de Bonn et Marrakech en 2001, qui exposent plus précisément ses règles de mise en œuvre.
Règles de mise en œuvre du Protocole de Kyoto
Les engagements pris par les Parties au Protocole diffèrent en fonction de la catégorie à laquelle ils appartiennent. Il en existe deux :
les pays de l’Annexe I de la Convention (pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économique, OCDE, en 1992 et pays en transition de marché) devant respecter des objectifs chiffrés en termes de réduction ou de limitation des émissions de gaz à effet de serre. Seuls la Biélorussie et la Turquie, pourtant membres de l’Annexe I, ne sont pas concernés ;
- les pays hors Annexe I de la Convention qui ne sont pas soumis à de tels objectifs.
Le Protocole met l’accent sur les aspects suivants :
les objectifs juridiquement contraignants en matière d’émissions pour les pays inscrits à l’Annexe B. Ces objectifs constituent une réduction totale d’émissions de gaz à effet de serre d’au moins 5 % par rapport aux niveaux de 1990 durant la période d’engagement 2008-2012. Ils doivent être atteints en priorité des mesures à l’échelle nationale, cependant trois mécanismes de flexibilité permettent aux États d’acquérir des crédits carbone supplémentaires au cas où ces mesures se révéleraient insuffisantes (UQA, MDP et MOC) ;
les obligations de nature générale, semblables à celles de la Convention, qui s’appliquent à toutes les Parties : amélioration de la qualité des données sur les émissions, établissement de programmes nationaux d’atténuation et d’adaptation, promotion du transfert de technologies écologiquement rationnelles, collaboration aux travaux de recherche, appui à l’éducation, à la formation… ;
l’atténuation des effets sur les pays en développement, notamment par le recours au Fonds d’adaptation.
Comme de nombreux accords internationaux, l’entrée en vigueur du Protocole a été conditionnée à un processus distinct et officiel de signature et de ratification par les gouvernements. La condition arrêtée était sa ratification par 55 Parties à la Convention au minimum, parmi lesquelles les Parties visées à l’Annexe I dont le total des émissions de dioxyde de carbone représentait en 1990 au moins 55 pour cent du volume total de ce groupe. La ratification par la Fédération de Russie le 18 novembre 2004 permit l’entrée en vigueur du Protocole le 16 février 2005.
192 entités sont Parties au Protocole, dont une organisation régionale, la Communauté européenne. Les pays ayant des objectifs chiffrés en matière d’émissions de GES représentent 67,3 % des émissions des pays de l’Annexe I.
Principes de fonctionnement des mécanismes de projet MDP ET MOC
Institué par l’article 12 du Protocole de Kyoto, le « Mécanisme de développement propre » (MDP) permet à des entreprises issues des pays ayant souscrit à des engagements chiffrés de réduction des émissions au titre du Protocole de Kyoto (pays développés) de réaliser et/ou de co-financer des projets de réduction des émissions de GES dans des pays sans engagement chiffré (pays en développement, économies émergentes) et de se voir délivrer en contrepartie des crédits carbone, appelés Unités de réduction certifiées des émissions – URCE (CER en anglais). Le montant des URCE accordées à l’investisseur correspond aux émissions évitées grâce à la mise en œuvre du projet par rapport à un scénario de référence sans projet.
Le deuxième mécanisme de projet est la « Mise en œuvre conjointe » (MOC) institué par l’article 6 du Protocole de Kyoto). Elle fonctionne selon des principes et des règles proches de celles du MDP, à la différence que les projets MOC sont mis en œuvre dans des pays dotés d’engagements chiffrés de réduction des émissions. Les crédits délivrés dans le cadre de la MOC sont appelés Unités de réduction des émissions – URE (ERU en anglais).
Les mécanismes MDP et MOC ont permis d’éviter jusqu’à présent l’émission de plus de 2 milliards de tCO2e.
Le MDP a enregistré plus de 7 700 projets et levé près de 200 milliards d’USD depuis son lancement. Toutefois, ce mécanisme fait face à des critiques, notamment concernant le déséquilibre géographique dans la répartition des projets : 82 % des projets MDP sont situés dans la région Asie Pacifique, 13 % en Amérique latine et 3 % en Afrique. Cinq pays comptent pour 93 % de l’offre de crédits émis. Par ailleurs, la contribution au développement durable et le caractère additionnel (lié au fait que ce sont bien les marchés carbone qui permettent leur déploiement) de certains types de projets ont également été mis en cause.
La MOC a, de son côté, permis de développer de nombreux projets de réduction d’émissions dans les pays développés et en transition, notamment dans les pays de l’Est de l’Europe, mais aussi en France qui a accueilli 20 projets sur la période 2008-2012.
MDP et MOC à l’étranger
Ces deux mécanismes sont victimes de leur succès. En effet, s’ils ont permis de lancer de nombreux projets, la demande pour les crédits issus de ces projets est aujourd’hui quasi nulle. Le marché européen d’échange de quotas est à ce jour la principale source de demande pour ces crédits, mais les entreprises soumises à quotas peuvent restituer des crédits en proportion limitée et la capacité d’utilisation de ces crédits est proche d’être atteinte. Sur la totalité de la période 2008-2020, l’offre de crédits internationaux devrait donc largement excéder la demande. Les prix des crédits ont ainsi commencé à chuter depuis mi-2011, passant de 20 € en moyenne à un peu moins de 50 c€.
Guide spécifique aux programmes d'activités - PoA (2010)
MOC en France : le dispositif « Projets domestiques »
En s’appuyant sur le mécanisme MOC, la France a décidé en 2006 de lancer le dispositif des « Projets domestiques ». L’objectif est de stimuler les réductions d’émissions de gaz à effet de serre dans des secteurs d’activités non couverts par le marché européen d’échange de quotas, sur le territoire national. L’État puise dans son stock d’unités de quantité attribuée (UQA) pour délivrer des URE aux développeurs de projet, qui pourront ainsi intégrer le bénéfice des crédits carbone dans le plan de rentabilisation de leur investissement.
Avec ce dispositif, la France a affirmé sa détermination à être à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique grâce à l’utilisation des outils innovants et efficaces.
Une mission d’inspection interministérielle a rendu en 2015 un rapport sur le dispositif des « Projets domestiques » visant à faire le point sur le fonctionnement de ce dernier et identifiant des pistes d’amélioration des instruments. Ces pistes sont en cours d’évaluation et de mise en œuvre par le ministère de l'Environnement.
Procédure de référencement des méthodes et d’agrément de projets
Avant de procéder au référencement d’une méthode et à l’agrément d’un projet domestique, l’État doit s’assurer que les activités qui pourraient exister dans le cadre des projets :
entraîneront des réductions d’émission qui sont bien comptabilisées dans leur intégralité au sein de l’inventaire national des gaz à effet de serre ;
- rempliront le critère d’additionnalité : parmi les projets potentiellement candidats au nouveau dispositif, certains auraient eu lieu de toute façon, indépendamment de l’incitation supplémentaire apportée par les crédits carbone, soit parce que les réductions d’émissions sont déjà directement ou indirectement dictées par la réglementation en vigueur (normes sur les performances énergétiques de certains produits), soit parce que les aides publiques au sens large (subventions directes, crédits d’impôt, tarifs de rachat de l’électricité renouvelable), contribuent déjà à rentabiliser le projet. Or, l’État n’est pas censé délivrer des crédits carbone pour des projets qui auraient eu lieu de toute façon. La rémunération en crédits carbone ne doit donc venir rétribuer que la partie de l’effort qui amène le projet à faire mieux que la tendance.
Comme l’État utilise ses propres actifs carbone pour rémunérer les porteurs de projet, le bilan final de l’opération est alors en théorie neutre du point de vue de nos engagements Kyoto, les droits d’émission de la France étant censés diminuer à due concurrence des émissions de CO2 évitées grâce aux projets, tout en améliorant l’efficacité-coût de notre politique climatique.
- Code de l’environnement
- Arrêté du 26 octobre 2012 modifiant l’arrêté du 2 mars 2007 relatif à l’agrément des activités de projet du Protocole de Kyoto
- Décret n° 2014-1273 du 30 octobre 2014 relatif aux exceptions à l'application du principe « silence vaut acceptation » (le délai de réponse de l'administration sur les projets domestiques est donc porté à 6 mois avec silence vaut refus)
- Arrêté du 27 décembre 2012 spécifique aux projets domestiques de reboisement
- Dispositions relatives à la MOC introduisant des frais d’enregistrement sur le site de la CCNUCC pour les projets validés (frais qui varient selon le volume de réduction d’émissions et qui ont été introduits à la COP16/CMP6 de Cancún)
Liste des méthodes référencées et des projets agréés - Méthodes référencées
Projets agréés (valables jusqu’à fin 2012)
Rhodia Chalampé acide nitrique
COOP de France Déshydratation – Substitution
COOP de France Déshydratation – Andainage
Fédération Nationale du Bois – Production d’énergie thermique
Consultations publiques sur les méthodes et sur les demandes d’agrément de projets
Le ministère en charge de l’Environnement, conformément aux termes de l’arrêté du 26 octobre 2012 modifiant l’arrêté du 2 mars 2007 relatif à l’agrément des activités de projet du Protocole de Kyoto, est saisie de demandes de référencement de méthodes et/ou d’agrément de projets devant être réalisés sur le territoire national au titre de l’article 6 dudit Protocole. L’arrêté prévoit (articles 9 et 13) qu’à la réception des demandes, le ministère mette « le dossier à disposition du public sur son site internet dans les conditions qu’elle fixe et qu’elle porte à la connaissance du public ».
Le ministère organise en conséquence, pour les méthodes et projets individuels qui lui sont soumis, une consultation du public sur le présent site internet, dont la durée est de 15 jours ouvrés.
Le ministère en charge de l’Environnement, conformément aux termes de l’arrêté du 26 octobre 2012 modifiant l’arrêté du 2 mars 2007 relatif à l’agrément des activités de projet du Protocole de Kyoto, est saisie de demandes de référencement de méthodes et/ou d’agrément de projets devant être réalisés sur le territoire national au titre de l’article 6 dudit Protocole. L’arrêté prévoit (articles 9 et 13) qu’à la réception des demandes, le ministère mette « le dossier à disposition du public sur son site internet dans les conditions qu’elle fixe et qu’elle porte à la connaissance du public ».
Le ministère organise en conséquence, pour les méthodes et projets individuels qui lui sont soumis, une consultation du public sur le présent site internet, dont la durée est de 15 jours ouvrés.
Les commentaires et observations sont à adresser par voie électronique ou par voie postale à :
Monsieur Dimitar Nikov
dimitar.nikov@developpement-durable.gouv.fr
Ministère de l’Environnement de l’Énergie et de la Mer (MEEM)
Direction générale de l’énergie et du climat
Tour Sequoia
92 055 LA DÉFENSE Cedex
Nouveaux mécanismes issus de l’Accord de Paris
L’Article 6 de l’Accord de Paris se divise en trois :
il introduit les modalités de coopération volontaire en termes d’échange de réductions d’émissions à l’international (§1 à 3) ;
il établit un mécanisme centralisé, sous autorité de la COP pour contribuer à la réduction des émissions et remplacer le MDP et la MOC (§4 à 7) ;
il reconnaît les approches non marchandes en créant un cadre et un programme de travail sur ces dernières (§8 et 9).
La décision 1/CP.21 distingue trois agendas items séparés, chacun avec ses objectifs à atteindre. Lors des négociations à Bonn (mai 2016 – première session de négociations suite à la COP21), plusieurs Parties se sont montrées réticentes envers les demandes d’autres Parties pour des ateliers et des papiers techniques. Les conclusions se sont donc limitées à inviter les Parties à soumettre leurs vues sur les trois sujets avant le 30 septembre 2016.
Ces soumissions sont disponibles sur une page dédiée des Nations unies, ainsi que les conclusions de la COP22 de Marrakech sur les trois agendas items relatifs à l’Article 6 (agenda items SBSTA 12 a, b, c).
Conformément à la feuille de route adoptée par le Gouvernement en 2015, suite à la Conférence environnementale de 2014, l’État travaille à la création d’un label carbone national volontaire, notamment pour les projets intéressant la filière forêt-bois et la filière agricole. Le label pourrait concerner à terme tout autre secteur non couvert par le marché carbone.
Il s’agirait de certifier des projets dédiés à la compensation volontaire des émissions (donc différents des « Projets domestiques »), dont les effets en termes de réductions d’émissions de gaz à effet de serre seraient attestés selon des méthodologies proposées par les parties prenantes et approuvées par l’État. Ces méthodologies tiendraient compte des autres enjeux environnementaux, et notamment de la biodiversité. Un suivi serait mis en place avec l’ensemble des parties prenantes.