Publié le 29 avril 2024
Mis à jour le 05 mars 2025
Capture, valorisation et stockage du carbone (CVSC, Carbon Capture, Utilization and Storage – CCUS)
La capture, la valorisation et le stockage du dioxyde de carbone (CCUS) font partie des innovations technologiques qui vont nous permettre d’atteindre la neutralité carbone et notre objectif de réindustrialisation.
Le CCUS : de quoi s’agit-il ?
Le CCUS (Carbon Capture, Utilisation and Storage) se réfère à un ensemble de technologies visant à capturer les émissions de dioxyde de carbone (CO₂) :
- pour injecter et stocker le CO₂ dans des formations géologiques adaptées, et donc éviter qu’il ne soit simplement relâché dans l’atmosphère où il contribuerait au réchauffement climatique ;
- pour l’utiliser comme ressource dans la fabrication de produits.
Le CCUS implique une succession d’étapes :
- La capture sur un site industriel vise à extraire le CO₂ issu du processus industriel et à le concentrer.
- Le transport : une fois capté, le CO₂ est acheminé vers des lieux de stockage ou d’utilisation, situés en mer ou sur terre, par canalisations ou bateaux, ou, dans le cas de volumes plus réduits, en trains, barges, camions, etc.
- Le stockage : l’injection de CO₂ sous forme dense dans des structures fermées, des bassins sédimentaires, ou dans d’anciens gisements d’hydrocarbures déplétés, permet de stocker le CO₂ de manière sûre et permanente dans le sous-sol.
- La valorisation (ou « utilisation »), alternativement au stockage, consiste à utiliser le CO₂ capté pour la fabrication de produits.
Les technologies CCUS deviennent matures, et plusieurs projets commencent déjà à être déployés à l’échelle industrielle dans le monde, et notamment en Europe. En France, des projets de démonstrateurs industriels CCUS existent pour le captage et stockage de CO₂.
Le CCUS, un levier de décarbonation majeur pour l’atteinte de la neutralité carbone
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), dans son évaluation des trajectoires permettant d’atteindre des émissions mondiales net zéro de CO₂ (condition clé de la stabilisation du réchauffement planétaire) évalue le rôle de la capture et séquestration du carbone (CCUS) comme une option crédible pour contribuer à la réduction des émissions provenant de grands systèmes industriels ou énergétiques. Par ailleurs, le GIEC estime que le déploiement des technologies CCUS est à ce jour largement inférieur à celui cohérent avec une limitation du réchauffement sous 2°C.
En outre, l’Agence internationale de l’énergie estime que le CCUS permettrait de réduire d’environ 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) à horizon 2050. L’intérêt de recourir aux technologies de CCUS pour lutter contre le changement climatique a également été acté dans la décision de la COP28 qui s’est tenue à Dubaï en décembre 2023.
Dans les orientations de la Commission Européenne, le CCUS est largement considéré comme un levier nécessaire à l’atteinte de la neutralité carbone, notamment pour la décarbonation des activités pour lesquelles il n’existe pas de technologie bas-carbone accessible techniquement ou économiquement. Aussi, le stockage géologique du CO₂ ne peut s’envisager qu’après captage et transport d’émissions de CO₂ assez centralisées et ne peut en aucun cas se substituer à des actions de baisse des émissions.
Le 13 juin 2024, la Commission Européenne a publié le règlement Net-Zero Industry Act (NZIA), qui définit le CCS comme une option stratégique clé pour l’atteinte de la neutralité carbone à horizon 2050, au même titre que l’hydrogène, les énergies renouvelables électriques et le nucléaire. Ce cadre prévoit ainsi le développement de 50 millions de tonnes de capacité annuelle de stockage géologique de CO₂ au sein de l’Union européenne d’ici 2030, ainsi que des obligations pour les producteurs d’hydrocarbures de contribuer à l’atteinte de ces objectifs.
Stratégie nationale
Au niveau français, les premières orientations stratégiques du déploiement du CCUS ont été publiées en juin 2023 et ont fait l’objet d’une consultation publique ainsi que d’un avis du Haut conseil pour le climat, confortant l’approche française en matière de CCUS.
Publié le 4 juillet 2024, le document « État des lieux et perspectives de déploiement du CCUS en France » constitue la suite des travaux entrepris depuis l’année dernière.
Étude EVASTOCO2, estimation du potentiel de stockage de CO₂ sur le territoire français
À la suite de la publication en juillet 2024 de la stratégie nationale détaillant les actions stratégiques envisagées concernant le développement de la filière CCUS, la DGEC publie l’inventaire des capacités techniques potentielles de stockage géologique de CO₂ sur le territoire métropolitain.
Les résultats de cette étude, dénommée EVASTOCO2, ont ainsi permis d’estimer une ressource (volumes potentiellement disponibles et utilisables pour stocker du CO2 qui ne seront cependant pas nécessairement économiquement exploitables dans le futur) d’environ 1,1 Gt de stockage de CO2 dans des structures fermées et de 3,7 Gt dans des aquifères salins hors structures (1 Gt = milliard de tonnes). Un piège géologique fermé empêche toute migration du CO2 en dehors du réservoir de stockage.
Cet inventaire a été réalisé par le BRGM, AKKODIS, AVENIA, CVA, GEOSTOCK, l’IFPEN, TEREGA, TOTALENERGIES et l’Université de Lorraine, sous la direction de la DGEC et avec l’appui de l’ADEME. La réalisation de cet inventaire répond également aux obligations de publication d’un atlas national sur les capacités potentielles de stockage géologique du CO2 du règlement européen Net Zero Industry Act (NZIA), publié en juin 2024.
En matière de stockage de CO2, la France travaille dans le cadre européen et bilatéral pour faciliter l’accès aux stockages en mer du Nord et en Méditerranée, qui constituent à court terme les premiers exutoires opérationnels potentiels pour les émissions françaises. À l’horizon 2030, la stratégie française sur le CCUS envisage le développement de capacités de stockage sur le territoire métropolitain. L’étude EVASTOCO2 s’inscrit dans ce contexte et constitue une avancée significative en tant que première estimation du potentiel de stockage géologique de CO2 en France. Il ne s’agit néanmoins à ce stade que de ressources potentielles et non de réserves (capacités techniques et économiquement viables).
L’étude EVASTOCO2 est une évaluation préliminaire et ne préjuge pas des résultats qui seraient obtenus au stade du développement d’un projet de stockage. Tout projet industriel sera précédé d’une phase de recherche détaillée et fera l’objet des procédures de concertation auprès des parties prenantes prévues par le code de l’environnement et le code minier.
Quel que soit le type de stockage, il conviendra de s’assurer que le CO2 y sera stocké de manière sûre et permanente conformément à la directive européenne 2009/31/CE relative au stockage géologique du CO2 (dite « directive CSC »).
Le piégeage sûr et durable du CO2 pourrait ainsi contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à la lutte contre le changement climatique.
Documents disponibles (également sur le site de l'ADEME) :
- Résumé de l’étude EVASTOCO2 (5 pages)
- Rapport de synthèse (70 pages)
- Rapport complet (+ 300 pages ) à venir : http://ficheinfoterre.brgm.fr/document/RP-74263-FR
- SIG : à venir
EVASTOCO2 : Résumé et rapport de synthèse
Appel à manifestation d’intérêt sur le CCS
Le gouvernement français a lancé au printemps / été 2024 un appel à manifestation d’intérêt (AMI) non engageant pour identifier les industriels intéressés par le développement de la chaîne de captage et séquestration du carbone (CCS) en France dès 2025.
Un total de 113 manifestations d’intérêt a été reçu, montrant un fort dynamisme et une volonté d’expérimenter rapidement des solutions CCS. Conformément à « l’état des lieux et perspectives de la filière de Captage, Utilisation et Stockage du Carbone (CCUS) en France » de juillet 2024, rappelons que le CCUS est considéré comme un levier essentiel pour atteindre la neutralité carbone, notamment pour les secteurs industriels où les alternatives bas-carbone ne sont pas encore viables.
La réduction des émissions de CO2 dans l’industrie nécessite une transformation profonde des filières, en mobilisant divers leviers de décarbonation, dont le captage du CO2. 33 entreprises ont répondu à l’AMI pour mettre en œuvre des solutions de captage de leurs émissions de CO2. Les activités couvertes incluent la méthanisation, la production d’engrais, la fabrication de pâte à papier, la fabrication de ciment, la production de chaux, les aciéries et le traitement des déchets industriels dangereux.
Parallèlement, 23 entreprises ont proposé des solutions innovantes pour le captage de CO2, que ce soit dans les fumées industrielles produites par l’industrie lourde ou directement dans l’air.
Par ailleurs, le déploiement du CCUS nécessitera de connecter les bassins industriels aux hubs d’export ou de stockage. 15 entreprises ont manifesté leur intérêt pour des infrastructures de transport de CO2 : réutilisation de canalisations existantes, développement de hubs d’export, de flotte de camions…
De plus, des actions stratégiques - dont le présent AMI - sont en cours pour développer des capacités de stockage souveraines, soit en « aquifères salins » impropres à la consommation, soit dans des champs déplétés d’hydrocarbures. Au total, 16 acteurs du sous-sol ont répondu à l’AMI : producteurs d’hydrocarbures, géothermiciens, et même énergéticiens français souhaitant expérimenter l’injection de CO2 dissous dans les saumures des aquifères salins à partir de centrales géothermiques.
Corrélativement, 18 sociétés spécialisées dans le sous-sol ou bureaux d’études ont proposé de mettre à profit leurs moyens d‘études ou expertise pour optimiser les activités nécessaires à l’exploration géologique (études géologiques, campagnes sismiques, forages exploratoires - dans l’objectif de trouver des capacités de stockage) ou à l’exploitation (monitoring).
Parallèlement, 4 entreprises ont manifesté leur intérêt pour convertir du CO2 biogénique en carburant maritime ou d’aviation durable (alternatives aux fossiles) ou en séquestrant du CO2 par carbonatation.
Enfin, 10 experts du domaine en général, dont le CLUB CO2, ont manifesté leur intérêt en proposant d’apporter leur expertise pour contribuer au développement de la filière CCS en France.
Les résultats de cet AMI, couplés aux résultats de l’évaluation des capacités de stockage géologique de CO₂ en France (étude EVASTOCO2) et aux données dont dispose la DGEC visent à permettre de soutenir des actions permettant d’améliorer la connaissance du sous-sol et de favoriser la recherche de capacités de stockage de CO₂ en France.