Publié le 16 octobre 2017

Mis à jour le 16 juin 2025

Temps de lecture : 9 minutes

Canalisations et Réforme anti-endommagement

  • Équipements et produits à risques

Pour en savoir plus sur les canalisations et la réforme anti-endommagement

Canalisations de transport de matières dangereuses 

Le réseau français de canalisations de transport mesure 51 000 km, dont 37 000 km pour le gaz naturel, 10 000 km pour les hydrocarbures, et 4 000 km pour les produits chimiques. Une dizaine de transporteurs assurent la gestion des principaux réseaux.

Les canalisations de transport permettent l’acheminement du gaz naturel, des produits pétroliers ou chimiques vers des réseaux de distribution, d’autres ouvrages de transport, des entreprises industrielles ou commerciales, des sites de stockage ou de chargement (les réseaux de distribution de gaz en ville ne rentrent pas dans cette catégorie). Ces canalisations peuvent mesurer jusqu’ à un mètre de diamètre et fonctionner sous des pressions pouvant aller jusqu’à une centaine de bars. Elles sont enfouies à au moins 80 cm de profondeur pour assurer leur protection. Leur présence est néanmoins indiquée en surface par des bornes (rouge pour les hydrocarbures, jaunes pour le gaz, blanche ou orange pour les produits chimiques).

Accidentologie

Des fuites et ruptures de canalisations peuvent survenir en dépit d’inspections régulières menées par les exploitants de réseaux et causer une pollution des milieux naturels ou des phénomènes accidentels dangereux pour les personnes (explosion, incendie, nuage toxique…).

On recense en moyenne entre 15 et 30 fuites par an sur l’ensemble des 50 000 km de réseau, toutes tailles de brèches confondues, avec quelques évènements notables (rupture de canalisation, fuite enflammée, …). Ces fuites font systématiquement l’objet d’une analyse approfondie et d’un retour d’expérience, contribuant à la décroissance significative de leur nombre (diminution de plus de moitié depuis les années 70). Des accidents majeurs peuvent cependant survenir de manière exceptionnelle, comme ce fut le cas lors de la rupture d’un gazoduc en 2004 à GHISLENGHIEN (Belgique) faisant 24 morts et 130 blessés.

Les atteintes à l’environnement peuvent être conséquentes, notamment en cas de déversement accidentel de produits pétroliers comme en témoigne la pollution d’une zone naturelle protégée dans la Plaine de la Crau en 2009 (rejet de 5000m3 de pétrole brut) ou encore d’une zone agricole dans les Yvelines en 2019 (rejet de 900m3 de pétrole brut). Des évolutions réglementaires successives ont conduit à renforcer l’inspection des réseaux de transport d’hydrocarbures liquides et à réduire les délais de mise en sécurité pour limiter les volumes rejetés en cas de fuite. 

Protection des réseaux

Les canalisations de transport de matières dangereuses sont soumises à autorisation pour leur construction et exploitation. Des études de dangers identifient les zones à risque le long du tracé et les mesures compensatoires de sécurité adaptées à mettre en œuvre. Elles font l’objet d’un réexamen tous les 5 ans pour prendre en compte l’évolution de l’urbanisation.

Un vaste programme de renforcement de la sécurité a de plus été entrepris pour les réseaux existants depuis 2009, notamment par l’installation de plusieurs centaines de kilomètres de dalles de protection mécanique dans les zones les plus urbanisées pour se prémunir du risque d’accrochage par des engins de chantier. L’ensemble des mesures se sont échelonnées jusqu’en 2018 pour les tronçons les moins sensibles.

La réforme anti-endommagement de 2012 introduit également un guichet unique informatique permettant aux responsables de projets et entreprises de travaux de réaliser leurs démarches en ligne ainsi qu’une campagne de mesures pour la localisation précise des réseaux. Il convient en effet de rappeler que les travaux tiers sont la première cause de rupture de canalisation de transport. Pour plus d’information, voir la section « réforme anti-endommagement ».

Maîtrise de l’urbanisation

Des servitudes d’utilité publique sont instaurées autour des canalisations de transport de matières dangereuses pour réglementer l’implantation des établissements recevant du public (ERP) et des immeubles de grande hauteur (IGH). Tout projet d’aménagement dans la bande de servitude dite « SUP1 » doit ainsi faire l’objet d’une analyse de compatibilité visant à déterminer les mesures de protection nécessaires le cas échéant. 

Ces servitudes sont consultables sur le site internet du Géoportail de l’urbanisme (GPU) ou en mairie en annexe des PLU. Pour plus d’information, voir la plaquette de l’INERIS sur les SUP.

Inspection des réseaux

Un règlement de sécurité fixe les prescriptions techniques générales pour la conception, la construction, l’exploitation, la maintenance, la mise à l’arrêt des canalisations de transport. La moyenne d’âge des canalisations étant élevée (près de 50 ans), l’inspection régulière des conduites par des méthodes non destructives est donc nécessaire pour s’assurer de leur intégrité et effectuer les réparations qui s’imposent.

Ces inspections sont réalisées au minimum tous les 10 ans ou tous les 4/6 ans pour les réseaux d’hydrocarbures liquides ou liquéfiés de plus de 30 ans. Les exigences en matière d’inspection ont par ailleurs été renforcées suite à la rupture du Pipeline de l’Ile-de-France en 2019.

Des actions de recherche subventionnées en partie par l’Etat sont également menées par les transporteurs dans le cadre du plan de modernisation des installations industrielles depuis 2010. Elles permettent l’étude de sujets techniques importants pour la sécurité et ainsi d’améliorer la connaissance de l’ensemble des parties prenantes (analyse des effets de toit, traversées sous fourreaux, comparaison des résultats d’inspection, …).

Actions de contrôle menées par les services de l’Etat

L’élaboration et le suivi de la réglementation relative à la sécurité des canalisations de transport relève au niveau national de la DGPR (direction générale de la prévention des risques). Les actions d’instruction et de contrôle sont mises en œuvre par les services déconcentrés de l’Etat (DREAL, DEAL, DRIEAT) et portent notamment sur : 

  • l’instruction des autorisations de canalisations nouvelles ou modifiées ainsi que l’analyse des notices de réexamen quinquennal des études de dangers,
  • l’élaboration et la mise à jour des servitudes d’utilité publique liées aux dangers des canalisations nouvelles ou existantes,
  • l’habilitation et la surveillance des organismes de contrôle pour les épreuves initiales de canalisations de transport,
  • la vérification du bon respect des exigences réglementaires par les exploitants de canalisations de transport au moyen d’inspections périodiques,
  • la vérification de la bonne mise en œuvre de la réforme anti-endommagement.

Les réseaux présentant un intérêt pour la défense nationale font l’objet d’un suivi particulier par le service en charge des canalisations du ministère des armées. 

Références réglementaires 

Code de l’environnement : 

  • Procédure d’autorisation (L555-1 à 16, R555-2 à 29),
  • Servitudes d’utilité publique (L555-25 à 30, R555-30 à 36),
  • Prescriptions techniques (L554-5 à 9, R554-40 à 62).

Règlement de sécurité : 

  • Arrêté ministériel du 5 mars 2014 portant règlement de sécurité des canalisations de transport de gaz naturel ou assimilé, d’hydrocarbures et de produits chimiques. 

Pour l’accidentologie, consulter le site internet du BARPI.

La Réglementation anti-endommagement des réseaux

Contexte

On compte environ 4,5 millions de km de réseaux aériens ou souterrains sur le territoire national.


Ces réseaux peuvent faire l’objet de dommages lors de travaux à proximité. Les conséquences les plus fréquentes de ces dommages sont : des arrêts de chantiers, une perte de continuité des services publics fournis par les réseaux (l’eau, l’électricité, le gaz, les télécoms, etc.), et des perturbations de la circulation sur les voies publiques. S’y ajoutent dans certains cas des dégâts matériels lourds, voire des accidents de personnes (salariés des entreprises de travaux ou riverains), ou des atteintes à l’environnement.


Ces dommages résultent notamment de la mauvaise préparation des projets de travaux, de la mauvaise localisation des réseaux enterrés, ou encore de l’absence de qualification des intervenants.


Afin de limiter au maximum ces risques, une réforme réglementaire a été menée en 2012. Cette réforme a permis de réduire quasiment de moitié le taux de dommages observés à l’occasion de travaux.
 

Un guichet unique opérationnel depuis le 1er juillet 2012 pour recenser tous les réseaux et leurs exploitants

L’État a confié à l’INERIS la mise en place d’un guichet unique sous la forme d’une plateforme de téléservice Internet : https://www.reseaux-et-canalisations.ineris.fr. Cette plateforme est accessible gratuitement aux usagers, maîtres d’ouvrage et entreprises de travaux depuis le 1er juillet 2012. Elle permet d’identifier l’ensemble des exploitants de réseaux présents dans une zone où des travaux sont prévus afin d’obtenir auprès d’eux, des données précises sur la localisation des réseaux en leur envoyant des formulaires cerfa numériques Déclaration de projet de Travaux (DT) et Déclaration d’Intention de Commencement de Travaux (DICT).


En 2024, plus de 2,7 millions de consultations préalables aux travaux ont été effectuées, soit par utilisation directe du guichet unique, soit par le biais des prestataires d’aide à la déclaration ayant passé une convention avec le guichet unique et bénéficiant ainsi de la même base de données sur les réseaux. 
 

Principales dispositions à mettre en œuvre à l’occasion de travaux

La réglementation a instauré en 2012 une responsabilité renforcée des maîtres d’ouvrage de travaux dans la préparation des projets, de sorte que la compatibilité de ces projets avec les réseaux existants soit toujours vérifiée et que les entreprises d’exécution des travaux disposent de la meilleure connaissance possible de la localisation des réseaux et des précautions à prendre avant d’entreprendre les travaux. De plus, les maîtres d’ouvrage ont l’obligation d’intégrer des clauses techniques et financières dans les marchés de travaux pour prendre en compte notamment l’incertitude de localisation des ouvrages.


Par ailleurs, la réglementation impose aux exploitants de réseaux une amélioration progressive de la cartographie des réseaux, des réponses plus précises aux déclarations préalables faites par les maîtres d’ouvrage et les entreprises, et une anticipation des situations de crise afin que la mise en sécurité en cas de dommage soit aussi rapide que possible. Dans l’attente de l’amélioration de cette cartographie par les exploitants, des investigations complémentaires doivent être effectuées dans la phase de préparation des projets de travaux. De plus, l'utilisation du fond de plan unique PCRS (Plan Corps de Rue Simplifié) sera obligatoire au plus tard le 1er janvier 2026 pour les exploitants de tous les ouvrages, sensibles et non sensibles, et pour la transmission des données de localisation des réseaux aux déclarants.


Enfin, la réglementation fixe des obligations de compétences pour les maîtres d’ouvrage et pour les entreprises de travaux, et encadre les techniques de travaux employées par ces dernières à proximité immédiate des réseaux. Ainsi, depuis le 1er janvier 2018, tous les acteurs (les maîtres d'ouvrage publics et privés de travaux ainsi que leurs appuis en maîtrise d’œuvre, et les entreprises de travaux) sont concernés par une obligation de compétences pour les personnels intervenant à proximité des réseaux. Cela est concrétisé par une Autorisation d’Intervention à Proximité des Réseaux (AIPR) délivrée sur la base de la réussite à l’examen « QCM AIPR ». En 2024, plus de 2000 centres d’examens sont répartis sur le territoire et ont fait passer environ 180 000 examens.


Les collectivités locales sont concernées à différents titres : en tant que maîtres d’ouvrage publics de travaux, en tant qu’exploitants de réseaux, parfois en tant qu’exécutant de travaux en régie, et aussi en tant que coordonnateurs des travaux effectués sur la voirie et dans le domaine public, et responsables de la police de la sécurité sur le territoire communal. Mais, les maîtres d’ouvrage privés (entreprises ou particuliers qui effectuent des travaux susceptibles d’avoir un impact sur les réseaux) sont également concernés.
 

Les actions de contrôle

Les actions de contrôle menées par la DGPR et les DREAL portent sur :

  • les actions régionales d’information et sensibilisation des 3 acteurs concernés – maîtres d’ouvrage de travaux, exploitants de réseaux, entreprises de travaux – à l’application de la réforme, avec l’appui notamment des Observatoires régionaux DT-DICT ;
  • la surveillance des chantiers de travaux, par des inspections programmées et inopinées d’une part, et des inspections réactives à la suite d’accidents d’autre part ;
  • la gestion des rappels à l’ordre, avertissements, et sanctions administratives et pénales consécutifs aux inspections.

 

Références réglementaires

  • articles L. 554-1 à 4 et R. 554-1 à 39 du code de l’environnement
  • arrêté du 15 février 2012 modifié pris en application du chapitre IV du titre V du livre V du code de l'environnement relatif à l'exécution de travaux à proximité de certains ouvrages souterrains, aériens ou subaquatiques de transport ou de distribution
  • Guide d’application de la réglementation composé de trois fascicules, élaboré par l’Observatoire national DT-DICT et approuvé par l’État pour permettre à chacun de s’emparer des principes de la réglementation :
    • Fascicule 1 : dispositions générales
    • Fascicule 2 : guide technique, accompagné de fiches techniques
    • Fascicule 3 : formulaires et autres documents pratiques

L’ensemble des textes sont accessibles sur le site du guichet unique.