Publié le 16 octobre 2017

Mis à jour le 19 mars 2024

Canalisations et Réforme anti-endommagement

  • Équipements et produits à risques

Pour en savoir plus sur les canalisations et la réforme anti-endommagement

Canalisations de transport de matières dangereuses 

Le réseau français de canalisations de transport mesure 51 000 km, dont 37 000 km pour le gaz naturel, 10 000 km pour les hydrocarbures, et 4 000 km pour les produits chimiques. Une dizaine de transporteurs assurent la gestion des principaux réseaux.

Les canalisations de transport permettent l’acheminement du gaz naturel, des produits pétroliers ou chimiques vers des réseaux de distribution, d’autres ouvrages de transport, des entreprises industrielles ou commerciales, des sites de stockage ou de chargement (les réseaux de distribution de gaz en ville ne rentrent pas dans cette catégorie). Ces canalisations peuvent mesurer jusqu’ à un mètre de diamètre et fonctionner sous des pressions pouvant aller jusqu’à une centaine de bars. Elles sont enfouies à au moins 80 cm de profondeur pour assurer leur protection. Leur présence est néanmoins indiquée en surface par des bornes (rouge pour les hydrocarbures, jaunes pour le gaz, blanche ou orange pour les produits chimiques).

Accidentologie

Des fuites et ruptures de canalisations peuvent survenir en dépit d’inspections régulières menées par les exploitants de réseaux et causer une pollution des milieux naturels ou des phénomènes accidentels dangereux pour les personnes (explosion, incendie, nuage toxique…).

On recense en moyenne entre 15 et 30 fuites par an sur l’ensemble des 50 000 km de réseau, toutes tailles de brèches confondues, avec quelques évènements notables (rupture de canalisation, fuite enflammée, …). Ces fuites font systématiquement l’objet d’une analyse approfondie et d’un retour d’expérience, contribuant à la décroissance significative de leur nombre (diminution de plus de moitié depuis les années 70). Des accidents majeurs peuvent cependant survenir de manière exceptionnelle, comme ce fut le cas lors de la rupture d’un gazoduc en 2004 à GHISLENGHIEN (Belgique) faisant 24 morts et 130 blessés.

Les atteintes à l’environnement peuvent être conséquentes, notamment en cas de déversement accidentel de produits pétroliers comme en témoigne la pollution d’une zone naturelle protégée dans la Plaine de la Crau en 2009 (rejet de 5000m3 de pétrole brut) ou encore d’une zone agricole dans les Yvelines en 2019 (rejet de 900m3 de pétrole brut). Des évolutions réglementaires successives ont conduit à renforcer l’inspection des réseaux de transport d’hydrocarbures liquides et à réduire les délais de mise en sécurité pour limiter les volumes rejetés en cas de fuite. 

Protection des réseaux

Les canalisations de transport de matières dangereuses sont soumises à autorisation pour leur construction et exploitation. Des études de dangers identifient les zones à risque le long du tracé et les mesures compensatoires de sécurité adaptées à mettre en œuvre. Elles font l’objet d’un réexamen tous les 5 ans pour prendre en compte l’évolution de l’urbanisation.

Un vaste programme de renforcement de la sécurité a de plus été entrepris pour les réseaux existants depuis 2009, notamment par l’installation de plusieurs centaines de kilomètres de dalles de protection mécanique dans les zones les plus urbanisées pour se prémunir du risque d’accrochage par des engins de chantier. L’ensemble des mesures se sont échelonnées jusqu’en 2018 pour les tronçons les moins sensibles.

La réforme anti-endommagement de 2012 introduit également un guichet unique informatique permettant aux responsables de projets et entreprises de travaux de réaliser leurs démarches en ligne ainsi qu’une campagne de mesures pour la localisation précise des réseaux. Il convient en effet de rappeler que les travaux tiers sont la première cause de rupture de canalisation de transport. Pour plus d’information, voir la section « réforme anti-endommagement ».

Maîtrise de l’urbanisation

Des servitudes d’utilité publique sont instaurées autour des canalisations de transport de matières dangereuses pour réglementer l’implantation des établissements recevant du public (ERP) et des immeubles de grande hauteur (IGH). Tout projet d’aménagement dans la bande de servitude dite « SUP1 » doit ainsi faire l’objet d’une analyse de compatibilité visant à déterminer les mesures de protection nécessaires le cas échéant. 

Ces servitudes sont consultables sur le site internet du Géoportail de l’urbanisme (GPU) ou en mairie en annexe des PLU. Pour plus d’information, voir la plaquette de l’INERIS sur les SUP.

Inspection des réseaux

Un règlement de sécurité fixe les prescriptions techniques générales pour la conception, la construction, l’exploitation, la maintenance, la mise à l’arrêt des canalisations de transport. La moyenne d’âge des canalisations étant élevée (près de 50 ans), l’inspection régulière des conduites par des méthodes non destructives est donc nécessaire pour s’assurer de leur intégrité et effectuer les réparations qui s’imposent.

Ces inspections sont réalisées au minimum tous les 10 ans ou tous les 4/6 ans pour les réseaux d’hydrocarbures liquides ou liquéfiés de plus de 30 ans. Les exigences en matière d’inspection ont par ailleurs été renforcées suite à la rupture du Pipeline de l’Ile-de-France en 2019.

Des actions de recherche subventionnées en partie par l’Etat sont également menées par les transporteurs dans le cadre du plan de modernisation des installations industrielles depuis 2010. Elles permettent l’étude de sujets techniques importants pour la sécurité et ainsi d’améliorer la connaissance de l’ensemble des parties prenantes (analyse des effets de toit, traversées sous fourreaux, comparaison des résultats d’inspection, …).

Actions de contrôle menées par les services de l’Etat

L’élaboration et le suivi de la réglementation relative à la sécurité des canalisations de transport relève au niveau national de la DGPR (direction générale de la prévention des risques). Les actions d’instruction et de contrôle sont mises en œuvre par les services déconcentrés de l’Etat (DREAL, DEAL, DRIEAT) et portent notamment sur : 

  • l’instruction des autorisations de canalisations nouvelles ou modifiées ainsi que l’analyse des notices de réexamen quinquennal des études de dangers,
  • l’élaboration et la mise à jour des servitudes d’utilité publique liées aux dangers des canalisations nouvelles ou existantes, 
  • l’habilitation et la surveillance des organismes de contrôle pour les épreuves initiales de canalisations de transport,
  • la vérification du bon respect des exigences réglementaires par les exploitants de canalisations de transport au moyen d’inspections périodiques, 
  • la vérification de la bonne mise en œuvre de la réforme anti-endommagement.

Les réseaux présentant un intérêt pour la défense nationale font l’objet d’un suivi particulier par le service en charge des canalisations du ministère des armées. 

Références réglementaires 

Code de l’environnement : 

  • Procédure d’autorisation (L555-1 à 16, R555-2 à 29), 
  • Servitudes d’utilité publique (L555-25 à 30, R555-30 à 36), 
  • Prescriptions techniques (L554-5 à 9, R554-40 à 62).

Règlement de sécurité : 

  • Arrêté ministériel du 5 mars 2014 portant règlement de sécurité des canalisations de transport de gaz naturel ou assimilé, d’hydrocarbures et de produits chimiques. 

Pour l’accidentologie, consulter le site internet du BARPI. 

La Réforme anti-endommagement

Des dommages aux réseaux trop nombreux lors de travaux effectués dans leur voisinage

On déplorait en 2008 plus de 100 000 dommages (soit 400 par jour ouvrable) lors de travaux effectués au voisinage des 4,5 millions de km de réseaux aériens ou souterrains implantés en France, dont 6 200 pour les seuls réseaux de gaz.

Les conséquences les plus fréquentes des dommages aux réseaux sont des arrêts de chantiers, une perte de continuité des services publics fournis par les réseaux (l’eau, l’électricité, le gaz, le téléphone,…), et des perturbations de la circulation sur les voies publiques. S’y ajoutent dans certains cas des dégâts matériels lourds, voire des accidents de personnes, salariés des entreprises de travaux ou riverains des réseaux, ou des atteintes à l’environnement.

Les raisons principales de ces mauvais résultats étaient la mauvaise préparation des projets de travaux, la méconnaissance de la localisation des réseaux enterrés, et l’absence de qualification des intervenants.

Un guichet unique opérationnel depuis le 1er juillet 2012 pour recenser tous les réseaux et leurs exploitants

L’Etat a confié à l’INERIS la mise en place d’un guichet unique sous la forme d’une plateforme de téléservice Internet : reseaux-et-canalisations.gouv.fr. Cette plateforme est accessible gratuitement aux usagers maîtres d’ouvrage et entreprises de travaux depuis le 1er juillet 2012.

Le guichet unique se substitue au rôle précédemment tenu par les mairies pour renseigner les maîtres d’ouvrage et entreprises de travaux sur la liste des exploitants de réseaux concernés par le lieu où les travaux sont prévus. En 2016, le guichet unique compte plus de 16 000 exploitants enregistrés, qui représentent plus de 97 % de la longueur des réseaux implantés en France.

Désormais, plus de 2 millions de déclarations préalables aux travaux sont effectuées chaque année, soit par utilisation directe du guichet unique (20% des déclarations), soit indirectement par le biais des 4 prestataires commerciaux ayant passé convention avec le guichet unique et bénéficiant ainsi de la même base de données sur les réseaux (Dict.fr, Protys.fr, Dictservices.fr, Dictdect.Axione.fr).

Une réforme législative et réglementaire en vigueur depuis le 1er juillet 2012

Les textes de la réforme instaurent une responsabilité renforcée des maîtres d’ouvrage de travaux dans la préparation des projets, de sorte que la compatibilité de ces projets avec les réseaux existants soit toujours vérifiée et que les entreprises d’exécution des travaux disposent de la meilleure connaissance possible de la localisation des réseaux et des précautions à prendre avant d’entreprendre les travaux. Ils imposent aux exploitants de réseaux une amélioration progressive de la cartographie des réseaux, des réponses plus précises aux déclarations préalables faites par les maîtres d’ouvrage et les entreprises, et une anticipation des situations de crise afin que la mise en sécurité en cas de dommage soit aussi rapide que possible. Dans l’attente de l’amélioration de cette cartographie par les exploitants, ils imposent aussi pour les chantiers les plus sensibles la réalisation d’investigations complémentaires permettant d’améliorer, dans la phase de préparation des projets de travaux, la cartographie des réseaux enterrés existants au droit de l’emprise des travaux prévus. Ils fixent enfin des obligations de compétences pour les maîtres d’ouvrage et pour les entreprises de travaux et encadrent les techniques de travaux employées par ces dernières à proximité immédiate des réseaux.

Ils concernent les collectivités locales à différents titres : en tant que maîtres d’ouvrage publics de travaux, en tant qu’exploitants de réseaux, parfois en tant qu’exécutant de travaux en régie, et aussi en tant que coordonnateurs des travaux effectués sur la voirie et dans le domaine public, et responsables de la police de la sécurité sur le territoire communal.

Ils promeuvent la dématérialisation des démarches administratives préalables aux travaux et l’interopérabilité des acteurs. Notamment, les formulaires de déclaration (DT-DICT) et de récépissé de déclaration sont des formulaires Cerfa numériques. Totalement pré-remplis par le guichet unique, ils peuvent en outre depuis la fin 2014 être envoyés sous forme dématérialisée à tous les exploitants compatibles avec la dématérialisation. Plus de 85 % des déclarations sont désormais dématérialisées en 2016, contre 20 % début 2014.

Les principales mesures sont entrées en application le 1er juillet 2012. Elles sont encadrées par les articles L. 554-1 à 4 et R. 554-1 à 38 du code de l’environnement et par de nombreux arrêtés d’application, en particulier l’arrêté du 15 février 2012 modifié ainsi que par des guides techniques approuvés par l’Etat. L’ensemble des textes sont accessibles sur le site du guichet unique.

A chaque étape de la mise en œuvre de la réforme, des expérimentations préalables ont été menées pour en vérifier la pertinence et l’efficacité. En 2011 et 2012, l’ensemble de la réforme a été testé sur 2 territoires, l’agglomération d’Orléans et celle de Perpignan. En 2015, le contrôle des compétences des intervenants, qui entre en vigueur au 1er janvier 2018 et concernera plus de 100 000 personnes chaque année, a été expérimenté afin de valider avec une vingtaine de centres d’examen répartis sur tout le territoire les modalités de l’encadrement du télé-examen par QCM sur une plateforme dédiée du ministère de l’environnement.

Les actions de contrôle

Les actions de contrôle menées par la DGPR et les DREAL portent sur :

  • les actions régionales d’information et sensibilisation des 3 acteurs concernés – maîtres d’ouvrage de travaux, exploitants de réseaux, entreprises de travaux – à l’application de la réforme, avec l’appui notamment des Observatoires régionaux DT-DICT

  • la surveillance des chantiers de travaux, par des inspections programmées et inopinées d’une part, et des inspections réactives à la suite d’accidents d’autre part ;

  • la gestion des rappels à l’ordre, avertissements, et sanctions administratives et pénales consécutifs aux inspections ;

 

Les premiers résultats

Fin 2015, le nombre total de dommages aux réseaux a diminué d’environ 1/3 depuis 2008, tous réseaux confondus (hors réseaux d’eau et d’assainissement pour lesquels les données ne sont pas disponibles). Il est évalué aujourd’hui à 65 000 dommages par an, soit 260 par jour ouvrable.

Pour les seuls réseaux de gaz et de matières dangereuses, la réduction du nombre des dommages a été encore plus sensible, de 53 % entre 2008 et 2015, et de plus de 30 % depuis 2012, année d’entrée en vigueur de la réforme. Leur nombre résiduel est inférieur à 3 000 par an.

La réforme n’a cependant pas encore produit tous ses effets, notamment pour les travaux à proximité des réseaux aériens pour lesquels les mesures à venir relatives aux compétences des acteurs devraient être déterminantes.

De même, s’agissant de l’amélioration de la cartographie des réseaux, les travaux du CNIG qui ont abouti en juin 2015 à la normalisation des fonds de plan à très grande échelle (plan corps de rue simplifié – PCRS) permettront progressivement à tous les exploitants de réseaux, publics et privés, d’utiliser les mêmes fonds de plan pour afficher la cartographie de l’ensemble des réseaux présents dans une même zone.