Le commerce et l'environnement

Le Lundi 7 octobre 2019

Les inquiétudes exprimées par la société civile, autour de la négociation du traité commercial entre l’Union européenne et le Canada, ont mis en évidence les préoccupations sur l'impact environnemental du commerce et la nécessité pour les pouvoirs publics de se saisir de cette question, notamment en vue de la négociation de futurs accords commerciaux. Le ministère de l’environnement a engagé des travaux pour mieux évaluer les liens entre commerce et environnement, afin d’améliorer la prise en compte des enjeux environnementaux dans les accords commerciaux.

Il participe, en collaboration avec la direction générale du trésor, au groupe de travail conjoint sur les échanges et l’environnement de l’OCDE, principale instance où sont abordés les liens entre commerce et environnement.

L’impact du commerce international sur l’environnement demeure difficile à évaluer car il résulte de la combinaison de trois effets qui ne vont pas tous dans le même sens :

  • L’effet « d’échelle », lié à l’accroissement des échanges, des transports et de la production (allocation des ressources plus efficace) est généralement négatif pour l’environnement. Le commerce peut ainsi être une source de pressions sur le climat (émissions de gaz à effet de serre générées directement ou indirectement par le transport, l’augmentation de l’activité économique...), la biodiversité (la circulation de marchandises favorisant la colonisation d’espèces exotiques envahissantes, de pathogènes, de ravageurs), la qualité de l’air et de l’eau (pollutions du transport routier, maritime ou aérien).
  • L’effet « technique » du commerce : facilitation de la mise à disposition et du déploiement de technologies propres (énergies renouvelables...), et réduction de leur coût. Cet effet est bénéfique pour l’environnement.
  • L’effet « de composition » correspond enfin au fait que l’ensemble des biens produits par une région peut évoluer en fonction de ses avantages comparatifs et de leur plus ou moins grande exploitation suite à l’ouverture commerciale. Une région peut par exemple se spécialiser dans certaines productions plus propres ou au contraire, modifier l’utilisation des terres (la spécialisation productive, selon l’avantage comparatif de chaque pays, dans les secteurs de l’agriculture et l’élevage pouvant contribuer à déplacer des fronts pionniers et à la déforestation). L’effet sur l’environnement qui en résulte peut être positif ou négatif en fonction des types de biens et de services produits.

L’atteinte des objectifs français en matière de climat, de biodiversité et de préservation des sols nécessite de mieux articuler la politique commerciale de l’Union européenne avec de légitimes ambitions environnementales. Avec de l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris et de l’adoption des objectifs de développement durable des Nations unies, il convient donc d’être en mesure d’évaluer les pressions environnementales du commerce pour mieux les éviter, les réduire et les compenser, tout en essayant de maximiser les effets positifs du commerce sur l’environnement.

L’expérience acquise au sein du groupe de travail conjoint sur les échanges et l’environnement de l’OCDE et les échanges avec de nombreux économistes ont permis, en janvier 2017, l’évaluation de la compatibilité du CETA (Comprehensive and Economic Trade Agreement), accord commercial entre l’Union européenne et le Canada, avec l’Accord de Paris, formulant 10 recommandations pour faire de cet accord un levier de lutte contre le changement climatique.

Vers des accords de troisième génération ?

La controverse liée au CETA  (Comprehensive and Economic Trade Agreement) et la difficile mise en oeuvre du « plan d’action CETA » révèlent que le modèle actuel des accords de deuxième génération ne permet pas de porter l’ambition française d’un profond renouvellement de la politique commerciale européenne. Par conséquent, la France pourrait proposer un nouveau modèle d’accord commercial « de troisième génération » permettant de réconcilier politiques environnementales et commerciales et de faire du commerce un levier pour l’atteinte des objectifs environnementaux.

Pour ce faire, le commerce doit être pensé comme un moyen d’améliorer le bien-être des populations, et non comme une finalité en soi.

L’enjeu est au moins triple :

  • Mettre en cohérence la politique commerciale avec les grands objectifs environnementaux (climat, biodiversité, qualité de l’air...).
  • Réconcilier les citoyens avec la politique commerciale européenne.
  • Inciter à la mise en oeuvre des accords multilatéraux environnementaux en liant les concessions commerciales à l’atteinte de leurs objectifs.
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