Publié le 12 octobre 2023
Discours d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique Colloque : « Sobriété énergétique : 1 an après, on continue ! »
Jeudi 12 octobre 2023 - Seul prononcé fait foi
Mesdames et Messieurs,
Que n’avons-nous pas entendu, en juin 2022, lorsque j’ai annoncé la préparation d’un plan de sobriété énergétique ? Que notre économie allait s’effondrer ! Que nous n’y arriverions pas ! Que personne ne nous suivrait ! Un an quasi jour pour jour après le lancement de ce plan, je crois que nous pouvons dire que nous avons collectivement beaucoup appris, mais surtout, beaucoup démontré.
Nous avons d’abord démontré n’en déplaise à certains que sobriété ne rimait pas avec décroissance.
Notre pays a réduit sa consommation d’électricité et de gaz, tout en tenant son objectif de croissance.
Car la sobriété c’est avant toute chose du bon sens. J’aime d’ailleurs rappeler que l’équivalent anglophone de la sobriété, c’est la « sufficiency ». C’est utiliser juste ce dont on a besoin.
Nous avons ensuite démontré dans la lignée des travaux des experts français de RTE et internationaux du GIEC que la sobriété énergétique était un levier incontournable pour lutter contre le dérèglement climatique.
Grâce aux efforts engagés, la baisse de nos émissions de gaz à effet de serre s’accélère. Avec 2,7% en 2022, nous nous plaçons à l’avant-garde des pays du G7. Et cette tendance s’accentue puisque, au premier semestre, nos émissions ont baissé de 4,3%.
Et ce message que la sobriété doit être présente dans nos politiques de lutte contre le dérèglement climatique, je le porte au niveau de l’Union européenne et à l’international.
Nous avons enfin démontré qu’il n’était pas nécessaire d’empiler les normes et les interdictions pour produire des effets. Bien au contraire. Sans contrainte, sans sanction, en faisant appel à la responsabilité des grands acteurs, nous avons dépassé l’objectif de baisse de 10% de notre consommation cumulée d’électricité et de gaz – en la corrigeant bien sûr des effets météorologiques.
Pour cela, je le dis aux Français : merci !
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Ces résultats, ils sont le fruit d’un très gros travail collectif engagé dès ma prise de fonction. Vous êtes nombreux, dans cette salle, à y avoir participé et je vous en remercie. Dès l’été 2022, notamment dans le contexte, que je n’ignore pas, du passage de l’hiver et de la hausse des prix, nous avons réuni, secteur par secteur, plus de 300 fédérations professionnelles.
Aux côtés de mes collègues du Gouvernement j’ai travaillé avec chacun en partant de la réalité du terrain pour déterminer les meilleures manières de réduire la consommation d’énergie. Le plan, que j’ai présenté l’année dernière, partait d’une idée simple : avant de demander des efforts aux Français, c’est aux grands acteurs de se mobiliser. Car il n’a jamais été question de demander des efforts aux Français les plus vulnérables qui sont déjà par exemple dans l’impossibilité de correctement se chauffer.
Et en matière de grands acteurs, le premier qui doit être exemplaire, je l’ai souvent répété, c’est l’Etat.
J’ai souhaité que l’Etat prenne toute sa part et qu’il soit même précurseur : sur l’éclairage et le chauffage bien sûr, mais également sur les 110 km/h, sur le télétravail ou encore sur les téléphones reconditionnés, y compris pour les ministres !
Mon collègue, Stanislas Guerini, y reviendra tout à l’heure.
Et cette méthode d’un Etat exemplaire et précurseur, nous souhaitons qu’elle s’applique à l’ensemble de notre action pour la planification écologique et énergétique.
En matière de grands acteurs, j’ai également souhaité que les plus grandes entreprises se mobilisent.
Lors de l’acte 2 du plan que j’ai présenté cet été, j’ai demandé des efforts particuliers aux entreprises du CAC 40 qui se sont notamment engagées sur le télétravail ou sur la réduction de la consommation de carburant dans les déplacements de leurs salariés.
Aujourd’hui, j’élargis cette mobilisation du CAC 40 aux 120 plus grandes entreprises françaises du SBF 120.
Certaines sont sur scène, d’autres dans la salle. Toutes sont invitées à nous rejoindre pour s’engager en faveur de la sobriété énergétique.
Je compte sur ces grandes entreprises pour inscrire la baisse de leur consommation d’énergie au coeur de leurs politiques environnementales et de leur dialogue social.
Je compte aussi sur elles pour faire de la sobriété un élément clé de leur gestion du télétravail, du déplacement de leurs salariés ou encore de leur stratégie de formation.
Au-delà de l’Etat, des collectivités locales et des grandes entreprises, ce plan de sobriété énergétique s’est décliné, dans chaque secteur : la culture, le sport, la publicité, les grandes enseignes, le tourisme, les acteurs du bâtiment… Et je pourrai continuer comme cela longtemps.
J’ai souhaité enfin que nous accompagnions chaque Français. Pour cela, nous avons pris de nombreuses mesures depuis un an : par exemple pour favoriser le covoiturage ou pour faire connaître les bons gestes à adopter.
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Aujourd’hui, nous poursuivons cet accompagnement avec de nouvelles mesures.
Pour permettre aux ménages d’avoir la bonne température, au bon endroit, au bon moment, je vous annonce le lancement d’un « plan thermostat » autour d’une mobilisation conjointe de l’Etat, des fournisseurs d’énergie et des enseignes de bricolage.
Les Français seront à la fois mieux informés et aidés financièrement pour acheter ces outils qui permettent de faire 15% d’économie d’énergie.
Nous prenons aussi des mesures pour favoriser le passage aux mobilités douces quand cela est possible. Je pense notamment au vélo, que nous incitons financièrement les entreprises à promouvoir auprès de leurs salariés.
Et pour continuer d’aller plus loin, dans le cadre de la nouvelle application de participation citoyenne du Gouvernement, Agora, j’ai lancé une consultation sur la sobriété énergétique. Nous avons déjà plus de 10 000 réponses. Elles nous permettront d’identifier les freins au changement de comportement de nos concitoyens et ainsi, de déterminer comment nous pouvons les lever.
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Mesdames et Messieurs, un an après le lancement du plan de sobriété, nous nous sommes habitués à de nouveaux comportements, à de nouveaux gestes…
Nous avons pour la première fois depuis longtemps réinterrogé certains usages.
Mais cet effort doit se poursuivre. Nous devons inscrire la sobriété dans la durée, pour lui donner un horizon qui dépasse un ou deux hivers : celui de la transition énergétique et de l’objectif de neutralité carbone que nous nous sommes fixés en 2050. Il nous faudra, pour cela, inscrire la sobriété comme un essentiel incontournable de la conception de toutes nos politiques publiques.
A l’avenir, nous devrons avoir une attente de tous les instants à la juste utilisation des ressources dont nous disposons. C’est ce que nous avons commencé à faire : avec ce plan de sobriété énergétique bien sûr, mais aussi avec le « plan eau » ou même encore avec la sobriété foncière du Zéro Artificialisation Nette adopté durant le précédent quinquennat.
De nombreux universitaires, de nombreux acteurs associatifs et même les Français, dans le cadre de la concertation sur l’avenir de notre mix énergétique que j’ai menée entre octobre 2022 et mars 2023, nous appellent à aller plus loin. Et à déployer les infrastructures nécessaires pour que les Français s’en saisissent.
Je partage cette vision, et je m’y attèle.
Je me réjouis d’ailleurs d’avoir, à l’animation de cet événement, la députée Olga Givernet, que je remercie.
Elle a co-piloté le groupe de travail sur la sobriété énergétique ; l’un des sept groupes de travail réunissant parlementaires, élus locaux, partenaires sociaux, ONG et fédérations professionnelles que j’ai lancé, en mai, pour préparer la future stratégie française sur l’énergie et le climat, ainsi que la loi énergie que je présenterai en fin d’année.
Une loi qui devra nécessairement inclure la baisse de notre consommation d’énergie et la sobriété énergétique. C’est crucial pour inscrire cette pratique dans le long-terme.
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Mais pour l’inscrire dans le long terme, il faut aussi prouver que la sobriété, chacun a à y gagner.
- A y gagner sur son portefeuille :
Les gestes que nous mettons en avant depuis 1 an, sur le chauffage, l’éclairage, les usages numériques, permettent bien sûr de faire la différence sur la facture d’énergie.
Mais pour aller plus loin, j’ai demandé aux fournisseurs de faire des offres pour valoriser efforts de sobriété de leurs clients au-delà du seul effet de baisse de consommation. Certains en présentent aujourd’hui et je les en remercie.
- La sobriété, chacun à y gagner aussi sur sa santé. Et je remercie Michel Cymes d’être présent aujourd’hui avec nous.
Il pourra sûrement vous rappeler que dormir à 19°c et même à moins, ce n’est pas seulement bon pour le pouvoir d’achat, c’est aussi bon pour la santé.
Il pourra également rappeler que moins de voiture,c’est moins de pollution de l’air, donc moins de maladies respiratoires comme la bronchiolite ou l’asthme qui explosent chez les jeunes enfants.
- La sobriété, nous avons enfin à y gagner sur la qualité de vie.
Un exemple de cela sur la pollution lumineuse. Avec ma collègue Sarah El Haïry, nous avons mené une consultation publique sur cet enjeu.
Et sur cette base, nous mettons dès à présent à la consultation de l’ensemble des acteurs un arrêté pour éteindre les éclairages des vitrines et des bureaux quand plus personne n’est au travail. A nouveau, c’est du bon sens et ça peut paraître anecdotique.
Mais repenser l’éclairage de nos villes, réduire la pollution lumineuse, c’est améliorer la biodiversité. Cela permettra notamment, au plus grand plaisir des enfants, de faire réapparaître certaines espèces, notamment des insectes, que l’abondance de lumière avait fait fuir.
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Mesdames et Messieurs, vous l’avez compris, la sobriété énergétique n’est pas prête de sortir de nos vies. En un an, nous avons montré la sobriété à laquelle nous croyions : une sobriété des grands acteurs et du bon sens et donc de l’équité et de l’efficacité.
Je tiens à remercier les différents invités qui nous font le plaisir d’être là aujourd’hui. Je voudrais remercier en particulier Jamy Gourmaud, dont les émissions de vulgarisation ont bercé notre enfance et nous éduquent encore aujourd’hui.
Je tiens aussi à remercier les jeunes qui nous écoutent. Notre mobilisation pour la sobriété, c’est aussi pour vous. Pour que vous n’ayez pas, d’ici quelques années, à vous voir imposer des gestes beaucoup plus drastiques que ceux que nous pouvons choisir de prendre aujourd’hui.
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Et pour conclure mes propos, je tenais à vous dévoiler, en toute exclusivité, notre nouvelle campagne de communication.
Une campagne pour dire qu’un an après, l’effort doit continuer.
Une campagne dont vous connaissez la musique entêtante, le fameux « Je baisse, j’éteins, je décale et je lève le pied » qui a parfois pu amuser l’hiver dernier.
Une campagne pour rappeler les gestes les plus efficaces pour baisser la consommation ; des gestes qui n’ont pas changés et qui, je l’espère continueront d’être massivement adoptés par les Français !
Je vous laisse découvrir et je vous remercie !