Publié le 14 février 2017
Mis à jour le 15 janvier 2025
Nanomatériaux
Les substances à l’état nanoparticulaire sont des nanomatériaux sous forme de particules ayant au moins une dimension de l’ordre du nanomètre.
Qu’est-ce qu’un nanomatériau manufacturé ?
Les nanomatériaux manufacturés sont des matériaux façonnés par l’Homme à l’échelle du nanomètre. Depuis une vingtaine d'années, ces matériaux sont passés de la recherche à la commercialisation dans des secteurs aussi variés que la santé, l’énergie, l’environnement, les technologies de l’information et de la communication, ainsi que les transports.
Les substances à l’état nanoparticulaire se présentent sous forme de particules avec au moins une dimension nanométrique entre 1 et 100nm. Ces substances ont été développées pour leurs propriétés uniques liées à leur taille, leur structure ou leur surface spécifique (rapport surface/poids ou surface/volume), ce qui leur permet d’outrepasser certains verrous technologiques. Les nanomatériaux apparaissent donc aujourd’hui comme un enjeu économique et sociétal majeur.
Cependant, le développement récent de ces substances implique une compréhension encore limitée de leurs risques potentiels pour l’Homme et l’environnement. Il est reconnu qu’une substance nanoparticulaire peut présenter un profil de danger différent de celui présentée par sa forme non-nanoparticulaire, comme la capacité à traverser les barrières biologiques, à persister dans l’environnement ou à s’accumuler dans les organismes. Les connaissances sur ces substances restent incomplètes, et les conclusions des études de toxicité et écotoxicité demeurent difficiles à exploiter. Les progrès en métrologie et la définition de lignes directrices communes pour la caractérisation et l’évaluation de ces substances sont donc essentiels.
Une définition qui ne fait pas encore consensus
En 2011, la Commission Européenne a publié une recommandation relative à la définition des nanomatériaux. Cette définition a été adaptée dans différents règlements européens relevant de la législation des produits chimiques (Cosmétiques, REACH, Nouveaux aliments, Produits Biocides et Produits Phytosanitaires). Cette définition n’a pas permis d’atteindre l’objectif d’harmonisation souhaité.
Aussi, la Commission Européenne a publié en 2022 une nouvelle recommandation relative à la définition venant abroger la précédente. Cette nouvelle recommandation a fait l’objet d’un avis de l’Anses en date d’avril 2023, qui a souligné des lacunes dans cette définition.
Cette recommandation doit être inscrite dans les textes européens afin de devenir juridiquement opposable. En ce sens, un acte délégué amendant la définition de nanomatériaux manufacturés dans le règlement européen (UE) 2015/2283 « Nouveaux aliments », au profit de la recommandation de 2022 a été publié par la Commission Européenne en mars 2024. Le Parlement européen s’est toutefois opposé à l’entrée en vigueur de cet acte délégué aux motifs que la définition méconnaissait le principe de précaution et ne prenait pas en considération les progrès scientifiques et techniques en proposant un seuil de 50% de particules en nombre.
Les révisions futures des règlements, parmi lesquels le règlement REACH et le règlement relatif aux produits cosmétiques, devraient être l’occasion de revoir les dispositions relatives aux nanomatériaux en s’appuyant sur cette nouvelle définition.
Le dispositif national de déclaration des substances à l’état nanoparticulaire : R-nano
Afin de connaitre les différents secteurs d’utilisation des nanomatériaux et suivre leur évolution sur le marché français, la France a été le premier pays à légiférer sur le sujet des nanomatériaux en mettant en place un dispositif de déclaration. Ce dispositif, issu du Grenelle de l’environnement, est encadré par les lois Grenelle I et II (créant notamment les articles L. 523-1 à 5 du code de l’environnement). Les dispositions législatives ont été déclinées par le décret en Conseil d’Etat du 17 février 2012. L’arrêté du 6 août 2012 a précisé la teneur des informations à déclarer.
Entré en vigueur en 2013, ce système de déclaration communément appelé « R-nano » est géré par l’Anses. Il oblige les producteurs, importateurs et distributeurs auprès du dernier utilisateur professionnel à déclarer annuellement des informations sur les substances à l’état nanoparticulaire mises sur le marché français à plus de 100 grammes par an. Ces informations incluent l’identité, la quantité, l’usage des substances, ainsi que l’identité des utilisateurs professionnels à qui elles ont été cédées.
Ce dispositif a pour objectif de répondre au besoin d’améliorer l’information du public, des consommateurs et des professionnels. Il vise à mieux connaître les substances mises sur le marché, leurs volumes et leurs usages, de disposer d’une traçabilité des filières d’utilisation et de collecter les informations disponibles sur les propriétés physico-chimiques de ces substances. L’ensemble de ces données doivent permettre d’alimenter les études toxicologiques et éco-toxicologiques nécessaires in fine à l’évaluation du risque.
Une partie des données collectées grâce à ce dispositif est rendue publique, dans le respect des dispositions de protection des données prévues par la loi :
Données récentes issues de la déclaration annuelle
Les données les plus récentes montrent qu'en 2022, environ 1 100 entités françaises ont déclaré au moins une substance nanoparticulaire. Ce chiffre est en baisse depuis quelques années, tout comme celui du nombre de notifications soumises qui avoisine les 9800 pour cette même année. Cela représente un volume total déclaré de 305 000 tonnes de substances produites et importées en France.
Les catégories de substances les plus produites par ordre de tonnage sont : la silice, le noir de carbone, le dioxyde de titane, le silicate de magnésium et le copolymère de chlorure de vinylidene. Elles représentent 98 % de la masse totale de substances à l’état nanoparticulaire produites en France en 2022 et déclarées en 2023. Parallèlement, les substances les plus importées par ordre de tonnage sont quant à elle : le noir de carbone, le carbonate de calcium, la silice, l’oxyde d’aluminium, le Pigment red 48:2.
Chaque année, l’exercice de déclaration témoigne d’une utilisation très largement répandue dans divers secteurs d’activité. Le secteur qui réalise le plus de déclaration en nombre est celui de l’ « Agriculture, sylviculture, pêche » suivi de la « Formulation [mélange] de préparations et/ou reconditionnement (sauf alliages) » puis de la « Fabrication générale, p. ex. machines, équipements, véhicules, autres matériels de transport »
Actions au niveau national et européen
Au niveau national, le 4ème Plan National Santé Environnement (2021-2024) prévoit une action (action n°13) visant à mieux gérer les risques sanitaires et environnementaux liés aux nanomatériaux. Cette action comporte 5 volets:
- Partie 1 : Appuyer l’adoption d’une définition harmonisée des nanomatériaux au niveau européen
- Partie 2 : Améliorer la connaissance sur l’usage des nanomatériaux (registre national R-Nano, réalisation de contrôles du respect des obligations REACH et de déclaration dans le registre R-Nano)
- Partie 3 : Améliorer les connaissances sur les risques sanitaires et environnementaux associés à ces nanomatériaux
- Partie 4 : Mieux respecter les obligations relatives à la présence de nanomatériaux dans les objets du quotidien et étendre celles relatives à l’étiquetage à d’autres secteurs
- Partie 5 : Encadrer les nanomatériaux qui ne présentent pas une utilité forte et qui peuvent présenter des risques.
Plusieurs ministères ainsi que les opérateurs, agences et instituts tels que l’Anses, l’INERIS, l’INRS, Santé publique France et l’ANSM travaillent conjointement à la mise en place d’actions permettant de répondre à ces objectifs.
L’Anses, en particulier, a publié plusieurs avis et rapports récents soulignant les risques liés à ces substances. A titre d’exemple, l’évaluation par l’Anses de la forme nanoparticulaire du dioxyde de titane a mené à l’interdiction de son utilisation en tant qu’additif alimentaire (E171) en 2020. Depuis, l’arrêté portant suspension de la mise sur le marché des denrées alimentaires contenant cet additif est renouvelé chaque année. Une mesure similaire a été reprise à l’échelle de l’union européenne en 2022.
Les contrôles auprès des industriels ou sur les produits de grande consommation ont été renforcés au cours de ces dernières années afin de vérifier le respect de la réglementation.
Les autorités françaises se mobilisent également fortement dans le cadre des discussions européennes pour faire évoluer la réglementation sur les nanomatériaux et sont également parties prenantes à l’Initiative de Malte dont l’objectif est d’accroitre le nombre de méthodes validées pour la caractérisation des nanomatériaux. Elles participent également aux travaux de l’OCDE (Organisation pour la Coopération et le Développement Economique) sur la sécurité des nanomatériaux manufacturés notamment pour l’élaboration de lignes directrices pour la caractérisation et l’évaluation des risques potentiels de ces substances.
A l’instar de la France, la Belgique, le Danemark et la Suède ont mis en place un dispositif de déclaration national similaire à R-nano.
Les Meilleures techniques à envisager pour la mise en œuvre des substances à l'état nanoparticulaire
L'utilisation des nanomatériaux permet de nombreuses applications innovantes, notamment dans le secteur industriel. Le dispositif national de déclaration des substances à l'état nanoparticulaire permet de mieux connaitre la réalité de la production et de l'utilisation de ces substances. En complément, le Ministère a élaboré un guide présentant les meilleures techniques à envisager pour la mise en œuvre des substances à l'état nanoparticulaire. Ce référentiel, élaboré par des inspecteurs de l'environnement avec l'appui de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), s'adresse principalement aux inspecteurs et aux exploitants des Installations Classées pour la Protection de l'environnement (ICPE) qui fabriquent ou utilisent des substances à l'état nanoparticulaire. Il décrit les techniques qui peuvent être mises en œuvre dans ces installations et sert de support aux échanges entre les inspecteurs et les exploitants sur la thématique des nanomatériaux.