Projet de loi Climat & Résilience - Les députés ont voté les articles du titre V « se nourrir » : ça change quoi dans nos vies ?

Le Lundi 19 avril 2021

Depuis le 29 mars, le projet de loi Climat et Résilience est en examen à l’Assemblée nationale. Après le vote des dispositions du titre I « Consommer », du titre II « Produire et travailler », du titre III « Se déplacer », et du titre IV « Se Loger », les députés viennent de finir l’examen du titre V du texte, intitulé « Se nourrir ». L’objectif : enclencher un changement significatif dans notre manière de nous nourrir pour consommer plus local, plus durable et plus sain, soutenir un système agricole plus respectueux de l’environnement par le développement de l’agroécologie et mieux encadrer le commerce équitable.

La loi Climat & Résilience est une bascule culturelle globale, qui doit nécessairement passer par nos assiettes. Parce que mieux se nourrir est à la fois un enjeu environnemental et de santé publique, je me réjouis des avancées votées par les députés, qui marquent un tournant pour une alimentation plus durable, plus saine et plus locale.

Dans la continuité de la loi EGAlim, les mesures votées par nos députés au sein de la Loi Climat et Résilience consacrent un principe, qui est celui du choix et un combat qui est celui de la qualité au service de notre ambition des aliments servis dans nos cantines : permettre à chacune et chacun d’avoir accès à une alimentation saine, sûre et durable

Julien Denormandie

Les mesures en bref

Soutenir une alimentation saine et durable peu émettrice de gaz à effet de serre pour tous

Quel constat ? 67 % des Français sont prêts à réduire leur consommation de viande

Pour agir, les députés ont voté l’obligation d’une option végétarienne quotidienne en cas de menus multiples dans les cantines de l’Etat, de ses entreprises et établissements publics (dont prisons et les universités). Cette option quotidienne fera également l’objet d’une expérimentation pour les collectivités volontaires. Suite à l’expérimentation concluante issue de la loi EGALIM, les députés ont choisi de pérenniser l’obligation, pour les cantines scolaires, de proposer au moins un menu végétarien par semaine.

Ce qui va changer au quotidien : focus sur des mesures clés qui font entrer l’écologie dans nos vies

Article 59 | Choix quotidien d’un menu végétarien dans les cantines de l’Etat et les universités, menu hebdomadaire dans les cantines scolaires et expérimentation pour les collectivités volontaires

Que dit cet article ? Il permet la mise en place d’une expérimentation à partir de la promulgation de la loi pour qu’un choix végétarien quotidien soit proposé dans les cantines des collectivités volontaires. L’Etat, lui, se veut exemplaire, et proposera dès 2023, quotidiennement un menu végétarien en cas de choix multiples offerts aux convives dans ses cantines et celles de ces établissements publics et entreprises publiques. Il rend également obligatoire un menu végétarien hebdomadaire dans les cantines scolaires, prévue par la loi EGALIM.

Et concrètement

Aujourd'hui : L’expérimentation du menu végétarien hebdomadaire dans les cantines scolaires est en place depuis le 1er novembre 2019 et pour 2 ans.

Les gestionnaires de restauration collective servant plus de 200 repas par jour doivent mettre en œuvre un plan pluriannuel de diversification des sources de protéines.

Demain : Les cantines de l’Etat et les universités qui proposent déjà plusieurs menus devront obligatoirement proposer une option végétarienne.

Les cantines scolaires devront composer un menu végétarien au moins une fois par semaine.

Les collectivités volontaires pourront expérimenter le menu végétarien quotidien et ainsi venir enrichir l’évaluation qui sera conduite par l’Etat.

Article 60 | Extension de l’obligation d’approvisionnement a hauteur d’au moins 50 % de produits durables et de qualité dont au moins 20 % de produits issus de l’agriculture biologique a la restauration collective privée à partir de 2025

Que dit cet article ? Il prévoit que la restauration collective privée (restaurant d’entreprise par exemple) serve dès 2025 des repas contenant 50 % de produits durables et de qualité, dont 20 % de bio, et 60% de viande et de produits de la pêche de qualité dès 2024.

Et concrètement

Aujourd'hui : Seule la restauration collective publique (cantines scolaires, hôpitaux, maisons de retraite...) avait l’obligation de proposer 50 % de produits de qualité dont 20 % de produits bio à compter de 2022.
La viande et les produits de la pêche proposés ne font pas l’objet de critères spécifiques.

Demain : L’ensemble de la restauration collective, publique comme privée, a l’obligation de proposer 50 % de produits de qualité dont 20 % de produits bio à compter de 2022 pour le public, et d’ici 2025 pour le privé.
En 2024, 60% de la viande et des produits de la pêche servis devront respecter les critères de qualité.

Articles 62 et 63 | Trajectoire de réduction des émissions liées a l’utilisation des engrais azotes, avec déclenchement d’une redevance a partir de 2024 si les objectifs ne sont pas tenus

Que disent ces articles ? L’azote est un élément nutritif essentiel pour la croissance des plantes. L’apport d’azote peut cependant, et de façon très variable en fonction des techniques d’épandage et des produits utilisés, générer une pollution importante, notamment en matière d’émissions de polluants atmosphériques et de gaz à effet de serre. Les principaux leviers de réduction de ces émissions sont notamment le choix d’engrais et de méthodes d’incorporation moins émissifs ainsi que l’amélioration de la gestion du cycle de l’azote. La loi va définir une trajectoire annuelle de réduction des émissions de protoxyde d’azote et d’ammoniac du secteur agricole jusqu’en 2030, avec la possibilité de mettre en place une redevance sur les engrais azotés d’origine minérale si cette trajectoire n’est pas tenue deux années consécutives.

Et concrètement

Aujourd'hui : La fertilisation azotée est à l’origine d'environ 35% des émissions de protoxyde d’azote (gaz à effet de serre) et 45% des émissions d’ammoniac (polluant précurseur de particules), tous secteurs confondus.

Demain : Si les objectifs annuels de réduction n’ont pas été tenus et qu’une taxation européenne des engrais azotés d’origine minérale n’est pas encore mise en place, le Gouvernement présentera au vote du Parlement, une redevance différenciée sur les engrais azotés minéraux, avec une entrée en vigueur au 1er janvier de l’année suivante.

Article 64 | Lutte contre la déforestation importée

Que dit cet article ?  La loi consacre la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée en lui donnant une valeur législative. L’Etat s’engage par ailleurs, à compter de 2022, à ne plus se fournir en produits qui auraient contribué à de la déforestation. La France doit se doter d’une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée et s’engage, à compter de 2022, à ne plus se fournir en produits qui auraient contribué à de la déforestation. Par ailleurs, une plateforme de lutte contre la déforestation importée à destination des entreprises sera créée, et les données douanières seront utilisées pour améliorer la transparence et la traçabilité des chaînes d’approvisionnement en matières premières agricoles.

Et concrètement

Aujourd'hui : La France s’est dotée d’une Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, mais c’est un choix du gouvernement et non une obligation. Cette stratégie contient des engagements de l’Etat et des outils à destination des entreprises qui ne sont pas inscrits dans la loi.
Les données douanières ne peuvent pas être utilisées dans ce cadre.

Demain : Cette Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée deviendra obligatoire et sera renforcée. L’engagement de l’Etat de ne plus acheter de produits ayant contribué à la déforestation importée est désormais inscrit dans la loi à compter de 2022.
Certaines données douanières pourront être utilisées dans ce cadre.

Article 66 | Encadrement du label commerce équitable avec des conditions écologiques

Que dit cet article ? Les situations des marques et labels privés sont actuellement très hétérogènes : cet article vient dès lors modifier la loi de 2005 sur les PME dans le but de mettre en place une structure  pour évaluer les labels de responsabilité sociale des entreprises afin de valoriser des produits, des comportements ou des stratégies.

Et concrètement

Aujourd'hui : Le secteur du commerce équitable voit fleurir des dénominations « équitable » sans que les principes du commerce équitable ne soient nécessairement respectés. Et les pratiques agroécologiques ainsi que l’attention à la préservation de la biodiversité ne sont pas inscrites dans la définition légale du commerce équitable.

Demain : Pour être déclaré « Commerce équitable », un label devra être reconnu par la plateforme nationale d'actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises, dite « Plateforme RSE », service du Premier ministre au sein de France Stratégie. Elle comprendra grâce à la loi un député et un sénateur en son sein.

Panorama du titre V

8 articles répartis en 2 chapitres

Chapitre 1er : Soutenir une alimentation saine et durable peu émettrice de gaz à effet de serre pour tous

Article 59
Expérimentation du choix quotidien d’un menu végétarien dans les services de restauration collective dans les collectivités territoriales volontaires

Article 60
Extension de l’obligation d’approvisionnement à hauteur d’au moins 50 % de produits durables et de qualité dont au moins 20 % de produits issus de l’agriculture biologique à la restauration collective privée à partir de 2025

Article 61
Ajout d’une dimension climatique au plan national de l’alimentation et de la nutrition (PNAN)

Chapitre 2 : Développer l’agroécologie

Article 62 et 63
Trajectoire de réduction des émissions liées à l’utilisation des engrais azotés, avec déclenchement d’une taxe à partir de 2024 si les objectifs ne sont pas tenus

Article 64
Création d’un mécanisme d’alerte à destination des entreprises lorsqu’elles importent depuis des zones déforestées

Article 65
Compatibilité des objectifs du futur plan stratégique national avec les stratégies nationales en matière d’environnement

Article 66
Encadrement du label commerce équitable avec des conditions écologiques

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