Maîtrise de l’antibiorésistance : lancement d’un programme interministériel

Le Vendredi 18 novembre 2016


Crédits : Shaskin. Fotolia

Chaque année en France, 12 500 décès sont liés à une infection à bactérie résistante aux antibiotiques. La feuille de route gouvernementale présentée jeudi 17 novembre vise à mieux maîtriser l’antibiorésistance.

La résistance des bactéries à des antibiotiques est un phénomène naturel qui a toujours existé, mais, avec près de 13 000 morts par an directement lié à l’antibiorésistance en France, l’impact de son développement sur la santé publique est aujourd’hui préoccupant.

L’OMS affirme que la résistance à des antibiotiques constitue l’une des plus graves menaces pesant sur la santé mondiale. Actuellement, les décès dus aux bactéries multi-résistantes se multiplient et très peu de nouvelles molécules antibiotiques sont attendues dans un avenir proche. Le phénomène ne pouvant plus être facilement contré, les scientifiques évoquent une ère post-antibiotique.

Il est difficile d’estimer les coûts du développement de l’antibiorésistance, mais il est certain qu’ils seront élevés, comme l’a rappelé en mai 2016 l’économiste Jim O’ Neil en prédisant plus de 10 millions de décès dans le monde à horizon 2050. Un peu après, en septembre 2016, la banque mondiale a publié une étude sur les aspects économiques de la menace que représentent les infections bactériennes résistantes aux traitements antibiotiques dans le monde, en particulier dans les pays les plus pauvres, avec un risque d’aggravation de la pauvreté. De 2017 à 2050, elle évoque un impact comparable à la crise financière de 2008. Et contrairement à la crise de 2008, elle n’envisage pas de possibilité de reprise cyclique à moyen terme en raison d’un impact persistant sur l’économie. La banque mondiale évoque un risque d’anéantissement des gains de développement économique tels qu’ils reculeraient la fin de l’extrême pauvreté, les pays les plus pauvres n’ayant pas les moyens de supporter le coût de l’inaction. Les projections économiques font état d’une baisse annuelle du PIB mondial de 1,1 à 3,8 %, d’un impact sur le commerce mondial, sur le coût des soins de santé et sur l’élevage. Les crises des secteurs de la santé humaine, de la santé animale et de l’environnement aggravant le phénomène.

Il paraît donc essentiel, de mener une lutte coordonnée contre l’antibiorésistance qui prenne en compte tous les aspects du problème : humaine, animale et environnementale.

Les ministères de la santé, de l’agriculture et de l’environnement ont organisé le 17 novembre un colloque sur les enjeux économiques de l’antibiorésistance et de sa maitrise qui a réuni 300 personnes, médecins, vétérinaires, écologues, agronomes, agriculteurs, industriels, étudiants sur le sujet. Comme évoqué au cours de cette journée, il reste beaucoup à faire pour connaitre le rôle de l’environnement dans le développement de l’antibiorésistance, tout l’enjeu du colloque a été d’en faire prendre conscience aux différents participants.

Par ailleurs, le ministère de l’environnement prends très au sérieux cette menace et soutient ou met en œuvre de nombreuses actions qui vont dans le sens d’une meilleure compréhension du phénomène :

  • Participation aux travaux interministériels dans le cadre du comité interministériel de santé qui a abouti à une feuille de route en 40 actions, visant à diminuer la consommation d’antibiotiques de 25% d’ici 2018 et à en réduire les conséquences sanitaires et environnementales.
  • Saisine, le 16 novembre de l’ANSES sur les mécanismes de développement de l’antibiorésistance dans l’environnement ainsi que l’état de la contamination des différents milieux en antibiotiques, résidus et bactéries résistantes afin de disposer d’une cartographie présentant un état des lieux de cette contamination en France.
  • Lancement d’une revue systématique de la littérature scientifique pour identifier des solutions efficaces pour lutter contre la contamination des milieux par les antibiotiques, leurs résidus et les gènes de résistance. Cette revue, qui sera portée par l’INSERM sous la direction du professeur Andremont, mettra en lumière les éventuels manques en matière de recherche et donnera des conseils de gestion à destination des décideurs ;
  • Soutien, au sein du plan ÉcoAntibio d’un projet de recherche sur l’antibiorésistance dans les sols, porté par Sylvie Nazaret, chercheur au CNRS, domaine peu exploré, mais essentiel dans la transmission et la dégradation des antibiotiques et des gènes de résistance ;
  • Lancement le 20 octobre 2016, dans le cadre Programme National de Recherche en Environnement Santé Travail de l’ANSES d’un appel à des projets de recherche sur l’antibiorésistance dans l’environnement.

 

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