Intervention de Barbara Pompili lors de la Convention des entreprises pour le climat à Nantes le 3 décembre 2021

Le Lundi 6 décembre 2021

Seul le prononcé fait foi

Mesdames et Messieurs,
Bonjour à toutes et à tous,

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Vous avez décidé de participer à cette formidable expérience de la Convention des entreprises pour le climat.
Vous savez donc que nous sommes face à un enjeu de transformation majeur.
En quelques années, nous allons devoir, ensemble, sortir de 150 ans de dépendance aux énergies fossiles.
C’est un défi immense, mais aussi une formidable opportunité.

Opportunité d’être exemplaire, d’être à la hauteur du siècle, de construire un monde durable pour les prochaines générations, mais aussi très prosaïquement de développer vos entreprises, de garnir vos bons de commandes, de créer des emplois.
On a beaucoup parlé d’ubérisation de l’économie il y a quelques années. Face à ce phénomène, notre économie a dû s’adapter, en régulant, mais aussi en accélérant la numérisation de nos entreprises.

C’est la même chose pour la transition écologique : c’est ce que j’appelle la « Tesla-isation ». Chacun peut mesurer les performances exceptionnelles d’une entreprise qui a tout misé sur la voiture électrique :

  • En 2009 Tesla produisait ses 150 premières voitures.
  • 10 ans après, l’entreprise en produit un demi-million et sa capitalisation boursière est plus importante que celle de l’ensemble des constructeurs mondiaux.
  • C’est pour cela que les Etats, les constructeurs, les consommateurs : tous prennent le tournant de l’électrique.
  • Cette révolution industrielle de l’automobile concernera bientôt tous les secteurs d’activités. Il faut s’y préparer.   

Face au dérèglement climatique, nous allons effectivement devoir, plus que jamais, innover, repenser notre modèle de société, réinventer notre économie.

Et s’il revient à l’Etat de fixer le cadre, d’investir, d’accompagner… les entreprises ont vocation à être les premiers acteurs de cette transformation.

Alors, cette Convention qui nous réunit aujourd’hui est une initiative d’autant plus précieuse.
Une initiative qui rassemble TPE, PME et grandes groupes… les entreprises engagées de longue date dans la transition écologique, comme les nouvelles arrivées… et qui doit permettre de partager les bonnes pratiques, d’identifier les verrous qui restent à lever à cette nécessaire transformation, avec l’objectif d’essaimer très rapidement dans notre tissu économique …
En bref, c’est une initiative comme on aimerait en voir plus souvent !

Alors, je suis très heureuse d’être avec vous aujourd’hui, entre les murs de cet amphithéâtre, pour la troisième session de la Convention des entreprises pour le climat !

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Aujourd’hui, nous le savons, prendre le tournant de la transition écologique est une question existentielle pour une entreprise dans n’importe quel secteur.
Ne pas le faire c’est prendre le risque de disparaître.
Le faire, c’est saisir une formidable opportunité.
Prendre ce tournant est d’abord une responsabilité collective.

L’urgence environnementale se fait chaque jour plus pressante.
Le dernier rapport du GIEC le rappelle : au rythme actuel des émissions de gaz à effet de serre, le réchauffement climatique pourrait dépasser les 3 degrés au cours de ce siècle.
Et ce, avec des conséquences dramatiques pour notre société dans son ensemble.

Disons-le : nous nous trouvons à la croisée des chemins. Nous avons une fenêtre de dix ans pour enrayer cette dynamique, avant qu’il ne soit trop tard.
Déjà beaucoup a été fait et le rythme de réduction des émissions de gaz à effet de serre a doublé au cours de ces dernières années en France.  
Mais ce n’est pas suffisant. Parce que nous sommes encore dépendants à plus de 60% des énergies fossiles, parce que le rythme d’émissions actuel n’est pas soutenable, mais aussi parce que nous importons massivement des produits venus de pays très émetteurs. Nous avons notre part de responsabilité et devons donc agir en conséquence.
C’est pour cela que nous avons soutenu la volonté de l’Union européenne de fixer un objectif de baisse des émissions du continent de -55% d’ici 2030.  
Avec un cap clair à l’horizon : atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.

C’est un objectif ambitieux.
Et nous ne pourrons l’atteindre qu’avec l’implication de tous
Et particulièrement de nos entreprises, qui doivent contribuer à cette décarbonation, comme les autres acteurs…
… mais aussi et surtout doivent nous aider à inventer les solutions dont nous avons besoin pour réussir la transition écologique.

Oui, cette transition, qui est source de défis, est aussi une opportunité de créer de nouvelles richesses, d’inventer, d’innover, et de transformer nos manières de faire, dans tous les domaines !

Pour ma part, j’ai la conviction que les entreprises qui ont de l’avenir sont celles qui auront pris suffisamment tôt  le virage de la transition écologique.

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C’est pourquoi nous avons débloqué des moyens en faveur de la transformation des entreprises dans le cadre du plan de relance – et désormais de France 2030,  qui va être pour moitié consacré à la transition écologique, à hauteur de 15 milliards d’euros.
Cet effort supplémentaire s’ajoute aux moyens du PIA4, consacrés pour un tiers à l’innovation verte.
Et parce que le manque de financement ne doit pas être un frein à leur transition, le prêt vert de BPI, dans le cadre du plan France relance, permet aux entreprises de financer leurs projets de transition écologique.

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Et pourtant, les sondages réalisés auprès des chefs d’entreprises le montrent : si la prise de conscience est réelle… Je lisais par exemple un sondage réalisé par bpifrance le lab en début d’année montrant que 80 % des dirigeants interrogés considèrent que le changement climatique appelle à une réaction d’urgence et 86 % se sentent concernés par les objectifs mondiaux de baisse des émissions carbone.
… les entreprises sont encore trop peu nombreuses à franchir le pas.
… et trop souvent encore, la transition écologique est associée aux écogestes, alors qu’elle doit être intégrée au cœur de la stratégie des entreprises.

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Alors mon rôle en tant que ministre de transition écologique c’est de faire en sorte que les conditions soient réunies pour enclencher véritablement cette transition…
et nous mettre en situation d’atteindre les objectifs que nous nous sommes collectivement fixés.

Dans cette perspective, ce moment d’échange qui nous réunit aujourd’hui est crucial.
Nous devons voir ensemble comment déployer à plus grande échelle la transition écologique sur la base de votre expérience, lever les verrous qui subsisteraient, améliorer nos dispositifs d’accompagnement.
Mais je voudrais commencer par partager avec vous trois axes de réflexion.

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Le premier axe de travail, c’est la lisibilité des dispositifs d’accompagnement, qui reste un frein à la transition de nos entreprises.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Si 80% des dirigeants de PME et ETI ont conscience de l’urgence climatique, moins de 15% déclarent pouvoir réduire de manière importante leurs émissions à court terme… avec pour principal obstacle le manque de financements. Pourtant, ces financements existent !
Nous avons donc travaillé à améliorer leur accessibilité et leur intelligibilité, à travers un guichet unique.

Alors, je suis très heureuse de vous annoncer aujourd’hui le lancement du portail « Mission Transition écologique » !

Ce moteur de recherche réunira l’ensemble des aides proposées à la transition écologique des entreprises, de l’Etat et des collectivités, soit près de 500 dispositifs.
Cette plateforme proposera aussi la possibilité d’être rappelé par un conseiller expert de la transition écologique, qui saura répondre à vos questions et vous réorienter vers les bons contacts.
Je vous invite donc à utiliser cette plateforme et à nous faire part de vos remarques pour l’améliorer !

Le deuxième axe c’est l’accompagnement des entreprises dès les premiers stades de leur transformation.
Je vous le disais, nous mettons en œuvre des moyens sans précédent dans le cadre de France Relance et de France 2030 pour accompagner la décarbonation des entreprises.
Pour autant si nous voulons atteindre nos objectifs climatiques, nous devons massifier encore plus la démarche.
C’est pourquoi sur le modèle des « diag éco-flux », qui ont connu un très grand succès, avec plus de 700 entreprises accompagnées en un an, nous lançons un nouveau dispositif, intitulé « décarbon’Action ».
Cette aide développée en partenariat par l’ADEME et Bpifrance vise à accompagner les PME qu’elles puissent définir leur plan de réduction de leurs émissions. Cette aide permettra également de mettre en place les premières actions, au sein de l’entreprise et en lien avec leurs principaux clients et fournisseurs.  Nous visons 400 entreprises accompagnées d’ici 2023.

Le troisième axe de travail, c’est la définition de feuilles de route de décarbonation partagées à la maille des grandes filières économiques.

J’étais ce matin aux Chantiers de l’Atlantique. Le secteur du transport maritime est emblématique des opportunités et des difficultés de la décarbonation de l'économie, avec des choix technologiques structurants et un besoin de synchronisation des acteurs publics et privés, notamment pour assurer  la disponibilité des carburants bas carbone, ou encore le déploiement des infrastructures portuaires de décarbonation.
C’est pour permettre à chacun de savoir où il va et comment il peut tirer son épingle du jeu  que je suis heureuse de vous annoncer aujourd’hui  qu’avec Bruno Le Maire nous engagerons un grand travail  d’élaboration de feuilles de routes de décarbonation, partagées entre filières économiques et pouvoirs publics!

Ce processus, prévu par la loi Climat et résilience qui a été adoptée cet été, sera mené en lien étroit avec les acteurs économiques.

J’insiste là-dessus : il ne s’agit pas d’une démarche verticale, mais au contraire d’une co-construction, avec les représentants des filières économiques, le Gouvernement et les représentants des collectivités territoriales.
C’est la marque d’une nouvelle forme de relation entre l’Etat et les entreprises, adaptée aux enjeux de ce siècle.

Oui, nous savons que les coûts, les défis techniques, l’ampleur de la décarbonation peuvent engendrer des incertitudes… voire des inquiétudes, au sein des entreprises.
Dans ce grand mouvement de décarbonation, l’Etat doit contribuer à réduire ces incertitudes que peuvent rencontrer les entreprises.

L’objectif sera, pour chaque filière,  d’identifier et de coordonner les actions mises en oeuvre par les acteurs privés et les pouvoirs publics pour atteindre les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre.

Afin d’être le plus efficaces possibles – car le temps nous est compté - nous allons nous concentrer sur les usages les plus émetteurs.
Je pense aux transports, bien sûr, qui représentent 30% de nos émissions totales en France.
Nos travaux concerneront également l’agriculture, l’usage des bâtiments résidentiels ou professionnels, le traitement centralisé des déchets mais aussi le numérique…
Nous concentrerons aussi nos efforts sur l’industrie, où des feuilles de route de décarbonation ont déjà été établies par certaines filières, et pourront être renforcées et servir de modèle.

***

Mesdames et messieurs,
Voici ce que je voulais vous dire en quelques mots aujourd’hui en introduction.
Vous l’avez compris, la tâche qui nous attend est considérable.
Dans ce contexte, vos propositions et suggestions seront essentielles pour réinventer, ensemble, un modèle économique plus durable.
Car les entreprises de demain ne pourront pas se contenter d’être performantes économiquement : elles devront aussi être durables, plus justes et plus vertes.

Ce travail que vous avez déjà commencé, que nous poursuivons ensemble aujourd’hui, c’est une première pierre à l’édifice.
Et pas n’importe laquelle : c’est une pierre fondatrice, dont dépendra le succès de nos actions à venir pour le climat.

Je me réjouis d’échanger sur ces sujets, dès maintenant, avec vous !

Je vous remercie.

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